À propos des Nuits de Fourvière, on pourrait paraphraser Victor Hugo en remplaçant le nom de Paris par celui du festival lyonnais qui s’achève le 28 juillet. Dans Choses vues, le poète écrirait ainsi : « Qui regarde au fond de Fourvière a le vertige. Rien de plus fantasque, rien de plus tragique, rien de plus superbe. »
Ces trois qualificatifs collent en effet aux différents spectacles qui se sont déjà déroulés dans les théâtres romains de Fourvière mais aussi à l’Opéra, l’Ensatt, La Renaissance, Le Radiant ou à la Croix-Rousse. Et ils s’appliqueront sans aucun doute à ceux qui sont encore à venir.
Parmi toutes ces choses vues, que de coups de cœur, que d’émotions ! Par où commencer ? Puisqu’il est question de vertige, parlons de celui suscité par Maria Pagés qui, reprenant les mille et nuits de Shéhérazade, nous a offert, les 10 et 11 juillet, une chorégraphie puissante. Flamenco et magie orientale faisaient bon ménage et il fallait voir et entendre la grande Maria martelant le plancher d’un bâton tandis que sa compagnie reprenait la même rythmique avec les talons.
Vertige encore que ces deux spectacles présentés à l’Ensatt du 11 au 13 juillet. Ils étaient adaptés de Kafka (Rapport pour une académie) et Delphine Horvilleur (Il n’y a pas de Ajar) et interprétés par deux comédiens hors pair : Manuel Le Lièvre dans le rôle d’un singe avec Kafka, Johanna Nizard dans celui du fils d’un écrivain imaginaire pour Horvilleur. Les deux textes questionnaient avec intelligence l’identité, humaine ou animale pour le premier, religieuse ou sexuelle avec le second.
Fantasque, tragique et superbe, voici encore des adjectifs qui pourront s’accoler aux très belles prestations de Bernard Lavilliers (22 juin) et d’Avishai Cohen (17 juillet). Et comment qualifier autrement le très beau Himmelerde découvert à l’Opéra de Lyon les 6 et 7 juillet ? Théâtre de masques, musique classique revivifiée et danse contemporaine balayaient les idées reçues que l’on pouvait avoir sur un petit village tyrolien d’où provenaient les musiciens de la Musicbanda Franui, associés ici au collectif berlinois Familie Floz. Un régal !
Il faudrait encore parler des Sorcières de Mona Chollet, que Ariane Ascaride, Constance Dollé, Clotilde Hesme, Louise Orry-Diquéro, Franky Gogo et P.R2B ont proposées au théâtre de la Croix-Rousse du 15 au 17 juin. L’autrice interrogeait d’une manière humoristique les sociétés passées, présentes et futures sur leur vision de la femme.
Il y aurait encore tant à écrire sur toute la programmation. Retenons plutôt les spectacles qui restent encore. Celles et ceux qui apprécient les actrices savoureront la brune Isabelle (Adjani) faisant revivre la blonde Marilyn (Monroe). Ce sera au Radiant de Caluire les 20 et 21 juillet. La musique sera encore bien représentée avec Imany et Souad Massi (20 juillet), Tamino (21 juillet), French 79 et Irène Drésel (22 juillet), Kaynixe — que l’on a pu applaudir aux dernières Fêtes escales — et Mehdi Kerkouche (23 juillet), Thylacine (24 juillet), The Blaze (25 juillet), Pomme (26 juillet) et Jeanne Added (27 juillet). Sans parler de la fabuleuse Nuit mexicaine qui, le 28 juillet, achèvera en beauté le festival. À noter que ce soir-là, aux côtés de Lila Downs et Son Rompe Pera, on pourra entendre le groupe mexicano-lyonnais Kumbia Boruka. Lequel, le 2 décembre prochain, fera vibrer de chaleureux sons latinos les vitres de la médiathèque Lucie-Aubrac.
« La vraie et grande éloquence, écrivait encore Hugo dans Choses vues, est celle dans laquelle, même aux moments calmes, on sent le grondement d’une foudre. » Appliquez cette citation au talent et vous comprendrez combien de fois a grondé et grondera encore le festival lyonnais.
Dernière minute : Un concert vient de s’ajouter qui clôturera effectivement les Nuits de Fourvière 2023 : celui d’Indochine, le 29 juillet. Billetterie ici.
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