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Ouverture du festival de Cannes avec Woody Allen : Paris est une fête !

Owen Wilson dans "Minuit à Paris"

On s’en était rendu compte avec “Vicky Cristina Barcelona” : Woody Allen adore les clichés et filme les villes étrangères comme un parfait touriste. Il réitère avec son nouveau film, “Minuit à Paris”, qui a fait hier soir l’ouverture du festival de Cannes. Les dix premières minutes sont éprouvantes : la caméra nous promène de l’arc de triomphe au Moulin-Rouge, de la butte Montmartre à Notre-Dame de Paris et du Panthéon à la Tour Eiffel. Ne nous y trompons pas : Allen ne s’est pas recyclé vendeur de cartes postales.

Son film, qui appartient au courant fantastique (lequel nourrit son œuvre régulièrement), va surfer sur les clichés pour nous rendre un peu plus attachant son héros, Owen Wilson, scénariste hollywoodien qui meurt d’envie d’écrire un roman et qui veut profiter de son passage dans notre capitale pour étoffer sa sensibilité artistique.
Les clichés entourent ce pauvre Wilson. Sa fiancée est la fille d’un riche Américain républicain : pléonasme ! Le meilleur ami de celle-ci est un intello pédant : pléonasme ! Quand ils vont voir une sculpture de Rodin, la guide est une digne représentante de l’élégance et de la beauté italo-françaises : elle est jouée par Carla Bruni, bonjour le clin d’œil appuyé ! Quant à notre écrivain en herbe, il ne rêve que d’un âge d’or, celui des années vingt où se côtoyaient à Paris les plus grands écrivains, les plus grands peintres, les meilleurs cinéastes, etc.
Ce qui est formidable avec Woody, c’est que chez lui les rêves deviennent facilement réalité : les acteurs peuvent sortir de l’écran (“La rose pourpre du Caire”), l’invisibilité est normale (“Alice”), un homme sans personnalité peut ressembler, tel un caméléon, à ce qui l’entoure (“Zelig”) et un mort peut aider à trouver la solution d’une énigme (“Scoop”).
Alors, il suffit à Owen Wilson d’être un peu seul (et bourré) pour se retrouver dans cette époque bénie des années vingt : Hemingway avait raison, Paris est bien une fête dans laquelle on croise le grand Ernest, bien sûr, mais aussi Scott et Zelda Fitzgerald, Picasso, Matisse, Gertrude Stein, etc. Si un mec se met au piano pour chanter “Let’s Do It”, cherchez pas, il s’agit de Cole Porter. Un taxi stoppe, T.S. Eliot est à l’intérieur et ce moustachu qui vous apostrophe dans un café, c’est Dali, vite rejoint par Buñuel et Man Ray.

Owen Wilson et Rachel McAdams

Autant dire que Woody Allen nous trimballe dans l’imaginaire de son personnage, un beau livre d’images où se rassemblent toutes les figures connues de l’intelligentsia du Paris des années vingt. Le cinéaste joue des clichés qui encombrent l’esprit de ses contemporains, le sien sans doute aussi. Car Allen ne se place jamais au-dessus de ses personnages, il est eux, ils sont lui à un point tel que la diction bredouillante d’Owen Wilson ressemble à s’y méprendre à celle de Woody.
Après la déception de l’an dernier (“Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu” qui, lui aussi, sinuait parmi les clichés mais d’une manière beaucoup plus pénible), “Minuit à Paris” est une bonne surprise : le fantastique léger convient bien à Woody Allen et si cette aventure marquera sans doute moins les esprits que “Annie Hall”, “Manhattan” ou “La rose pourpre du Caire”, elle permet de passer un excellent moment.

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