C’est une grande victoire, mais le combat est loin d’être terminé. Le 23 février dernier, l’Assemblée nationale s’est prononcée en faveur de l’extension du délai légal pour effectuer une interruption volontaire de grossesse, qui passe de 12 à 14 semaines.
Cet allongement a longtemps été demandé par de nombreuses associations. “De nombreuses femmes se rendent compte qu’elles sont enceintes au-delà des délais”, rappelle Chloé Dautry, chargée de développement associatif au Planning familial du Rhône.
Cette extension, valable depuis le 3 mars dernier, permet donc à de nombreuses femmes d’avoir un accès prolongé à une IVG et d’éviter une grossesse non désirée ou un voyage à l’étranger, là où la législation est plus favorable. En 2020, l’association rhodanienne a accompagné 315 femmes dans leurs démarches pour un avortement. Parmi elles, 8 % avaient dépassé le délai légal de 12 semaines, dont 26 qui ont choisi de réaliser l’IVG à l’étranger.
“Nous avons des partenariats avec des centres européens comme aux Pays Bas, en Espagne ou au Royaume-Uni, détaille Chloé Dautry. Mais les coûts sont plus importants. En France, la prise en charge est complète alors qu’à l’étranger, il y a le prix de l’acte médical, le trajet, la possible hospitalisation, cela peut coûter entre 700 et 3 000 euros.”
Ouverture aux sages-femmes
Même si le passage de 12 à 14 semaines, est une grande avancée, Chloé Dautry se dit “déçue” concernant le maintien de la clause de conscience. Cette dernière permet à un médecin de « refuser la réalisation d’un acte médical autorisé par la loi, mais qu’il estimerait contraire à ses propres convictions personnelles, professionnelles ou éthiques« , comme le définit le Conseil de l’ordre des médecins.
“Cela donne une image moralisatrice, estime-t-elle. C’est très stigmatisant alors que c’est un acte médical et un accès à la santé. C’est un choix personnel et individuel, il faut respecter la décision de la patiente.” Une clause de conscience qui est souvent invoquée par des hôpitaux, au-delà des 10 semaines de grossesse. Alors pour le Planning familial, cet allongement de deux semaines risque de ne pas changer grand-chose dans les établissements réfractaires.
L’espoir se tourne vers les sages-femmes. Jusqu’à présent, elles ne pouvaient réaliser que les IVG médicamenteuses, mais cette loi prévoit l’ouverture de la pratique de l’IVG instrumentale aux sages-femmes, au sein des hôpitaux. Une bonne nouvelle sur le papier puisque cela permettrait d’avoir plus de professionnels habilités pour réaliser cet acte.
Mais dans la pratique, cela risque de prendre du temps. “Il y a un grand enjeu, la formation, explique Chloé Dautry. Dans leur parcours professionnel initial, elles ne sont pas formées à réaliser des IVG.”
Le Planning familial reste donc prudent. “Même si le droit à l’avortement paraît acquis, il y a encore beaucoup à faire. C’est un droit toujours remis en question, attaqué de partout, il faut rester vigilant”, s’inquiète Chloé Dautry, pour qui la seule solution afin d’assurer le maintien de ce droit est une harmonisation européenne, “afin qu’il devienne intouchable et que chaque femme ait le droit au même accès”.
Où s’adresser ?
La loi sur l’IVG stipule que toute femme enceinte, majeure comme mineure, qui ne souhaite pas poursuivre sa grossesse, a le droit de demander au médecin l’interruption. En France, une IVG peut être pratiquée à l’hôpital, jusqu’à la fin de la 14e semaine de grossesse, soit 16 semaines après le premier jour d’absence des règles.
L’hôpital Femme mère enfant (HFME), le centre hospitalier Lyon-Sud, l’hôpital de la Croix-Rousse accueillent les femmes qui veulent interrompre leur grossesse. À Vénissieux, le centre hospitalier Les Portes du Sud également.
Besoin de conseil ou d’informations, vous pouvez prendre rendez-vous au Centre de Planification et d’Éducation Familiale de Vénissieux, 3 bis place Grandclément, 04 28 67 29 91 ou au Planning familial du Rhône, 2, rue Lakanal, 69100 Villeurbanne, 04 78 89 50 61.
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