Consacrée à la lutte contre le cancer du sein, la campagne Octobre Rose aura encore martelé un seul mot d’ordre : faites-vous dépister. À Vénissieux, le message a du mal à passer. Chez les femmes de 50 à 74 ans, à peine plus de la moitié ont participé à un dépistage en 2019.
« Prenez rendez-vous avec vos seins, tous les ans allez chez le médecin. » Tel est le slogan de prévention de la campagne annuelle Octobre Rose pour la sensibilisation au dépistage du cancer du sein. La situation est, en effet, urgente. L’impact du premier confinement se fait encore ressentir.
À l’échelle nationale, une baisse importante de la participation a été observée en 2020, en lien avec la crise sanitaire et la fermeture temporaire des centres de radiologie. Aujourd’hui, les acteurs du dépistage sont à nouveau pleinement opérationnels, et la crise qui perdure ne doit pas empêcher les femmes d’agir pour leur santé.
52,7% des Vénissianes dépistées
À Vénissieux, selon les chiffres issus de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM), seulement 52,7% des femmes âgées entre 50 à 74 ans, les plus exposées, ont participé en 2019 au dépistage gratuit organisé par le Centre régional de coordination des dépistages des cancers (CRCDC). Dans le département du Rhône, ce chiffre atteint 64,1%.
– Chaque année 54000 nouveaux cas sont détectés en France: près de 12000 femmes en décèdent.
– Près de 80% des cancers du sein se développent après 50 ans.
Sur 100 femmes de 50 ans, trois développeront un cancer du sein dans les 10 ans.
– La survie à cinq ans est de 99% pour un cancer du sein détecté à un stade précoce, elle est de 26% pour un cancer métastasé.
Cette situation alerte les spécialistes locaux, comme le Dr Abdelmalik Kehbbeb, gynécologue aux Portes du sud, qui reçoivent dans leur cabinet des femmes qui devront subir chirurgie et des traitements lourds. « Alors que le taux
de guérison est de 97 %, précise-t-il, si le cancer du sein est détecté à un stade précoce » (voir son interview ci-dessous).
On ne répétera jamais assez : le dépistage est primordial car il permet de repérer une éventuelle maladie dès les premiers signes. « Toute grosseur nouvelle au sein ou à l’aisselle, toute modification de la forme ou de la taille de votre sein, tout écoulement par le mamelon, ou encore tout changement notoire de l’aspect de la peau du sein ou de l’aréole – crevasses, pigmentations, etc – doivent être signalées à votre médecin car elles constituent les symptômes visuels les plus répandus et qui doivent alerter« , indique l’Institut national du cancer (INCA). Rappelons que le cancer du sein se présente le plus souvent sous la forme d’une petite boule qui peut être palpée parfois par la patiente elle-même.
Une mammographie tous les deux ans
Un cancer du sein résulte d’un dérèglement de certaines cellules qui se multiplient et forment le plus souvent une masse appelée tumeur. Il en existe différents types qui n’évoluent pas de la même manière. Certains sont agressifs et évoluent très rapidement, d’autres plus lentement. Les cellules cancéreuses peuvent rester dans le sein mais aussi se propager dans d’autres organes, ce qui est une situation encore plus menaçante. On parle alors de métastases.
Contre le cancer du sein, la mammographie de dépistage est à ce jour la meilleure arme. En l’absence de symptômes, elle permet de détecter les lésions précoces pour une prise en charge rapide.
Plus un cancer du sein est détecté tôt, plus les chances de guérison sont importantes. Grâce au dépistage précoce, la moitié des cancers du sein sont décelés alors qu’ils mesurent moins de 2 cm. Ce niveau de détection permet d’atteindre de très hauts taux de guérison tout en réduisant considérablement l’agressivité des traitements appliqués.
Questions à Abdelmalik Khebbeb, gynécologue
aux Portes du sud
« Dès que l’on sent quelque chose d’anormal, il faut consulter »
52,7 % seulement des Vénissianes entre 50 et 74 ans participent au dépistage systématique gratuit du cancer du sein, comment expliquez-vous cette situation ?
– Certaines nous disent qu’elles ont jeté le courrier les invitant à ce dépistage. D’autres ont peur qu’on leur trouve quelque chose et préfèrent ne pas savoir. Enfin il y a celles qui ne se sentent pas concernées. Quand elles viennent en consultation, nous les incitons systématiquement à se faire dépister et prenons du temps pour leur expliquer l’importance de cette démarche. Car il faut rappeler que cette maladie est la première cause de mortalité par cancer chez les femmes.
Quels sont les risques à ne pas réaliser ce dépistage ?
– À partir de 50 ans, le risque de cancer du sein augmente franchement. Si vous développez un cancer du sein et si vous n’avez pas réalisé régulièrement un dépistage, il sera diagnostiqué à un stade plus avancé. Lors de mes consultations, il m’arrive d’accueillir des femmes de 60 ans qui n’ont jamais fait de dépistage et dont la tumeur est très importante. Et dans ce cas, les traitements chirurgicaux et médicaux vont être lourds. Or il faut que les femmes sachent qu’en cas de dépistage précoce, nous obtenons 97% de guérison.
Et l’autopalpation ?
– Elle est indispensable. Aux États-Unis par exemple, 30% des femmes se sont découvert une petite masse grâce à leur autopalpation. Toutes les masses ne sont pas cancéreuses. Mais dès que l’on sent quelque chose d’anormal, il faut consulter .
On parle de l’importance du dépistage des cancers du sein, à partir de 50 ans, qu’en est-il chez les plus jeunes ?
– On propose à partir de 35 ans une échographie mammaire si on trouve une masse, ou si la femme est à risque de cancer du sein. Chez la femme jeune, le pronostic est très « péjoratif »: il est d »emblée métastatique et insensible à la chimiothérapie. On analyse systématiquement le tissu des tumeurs et on sait si oui ou non la chimio sera efficace.
Dans le risque de développer un cancer du sein, on évoque beaucoup des antécédents familiaux ?
– En effet une femme dont la sœur, la mère ou encore la grand-mère ont eu un cancer du sein est à risque. Tout être humain possède des gènes protecteurs, on les appelle les BRCA1, et BRCA2. S’ils mutent, le risque de cancer du sein et de l’ovaire est important.
Dépistage : comment ça marche ?
Le dépistage s’inscrit dans le cadre d’un dispositif national mis en place par les autorités de santé depuis 2004.
Il s’adresse aux femmes de 50 à 74 ans, avec le double objectif de réduire la mortalité liée à cette maladie et d’améliorer l’information ainsi que la qualité des soins dispensés aux personnes concernées. Il garantit notamment à chaque femme un accès égal au dépistage sur l’ensemble du territoire.
Le département du Rhône soutient le dépistage organisé des cancers du sein à travers l’action de l’association Ademas-69 et, depuis 2019, du Centre régional de coordination des dépistages des cancers (CRCDC).
Si vous êtes une Rhodanienne, âgée entre 50 et 74 ans, l’Adémas-69 vous invite tous les deux ans, par courrier, à vous rendre chez un radiologue agréé de votre choix pour une mammographie (examen gratuit). Cette radiographie bénéficie ensuite d’une seconde lecture par un radiologue de l’Adémas-69.
Concrètement, vous recevez une « invitation » par courrier : dès sa réception prenez rendez-vous avec le radiologue agréé de votre choix (sur une liste jointe). Le jour de votre rendez-vous, n’oubliez pas votre carte vitale et le courrier d’invitation.
Si vous avez déjà réalisé une mammographie et que vous êtes en possession de vos clichés, apportez-les. Le radiologue pourra les comparer et identifier plus rapidement les éventuels changements.
Habitante
28 octobre 2021 à 6 h 44 min
Très bon article documenté : un point positif à rappeler aux femmes qui ont peur de la mammographie : un cancer du sein détecté lorsque la tumeur est récente se guérit maintenant rapidement, il ne faut pas attendre et profiter de ce dépistage gratuit, non douloureux et très efficace. Merci d’avoir parlé d’octobre rose pour informer les vénissianes.