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Libération de Vénissieux : une commémoration en trois étapes

Trois temps d’hommages, ce 2 septembre, pour le sauvetage d’enfants juifs du camp de Vénissieux le 28 août 1942 et pour la libération de la ville le 2 septembre 1944.

 

Il y a 76 ans, ce 2 septembre, Vénissieux était libérée du joug nazi. La commémoration de cette journée s’est déroulée en trois temps : d’abord autour de la plaque du camp de Vénissieux, d’où 108 enfants ont été sauvés. Puis au monument aux morts, pour un hommage aux combattants. Et à la médiathèque Lucie-Aubrac, qui présente l’exposition « Les juifs de France dans la Shoah » et qui invitait l’historienne Valérie Portheret à dédicacer son livre Vous n’aurez pas les enfants, sur le sauvetage du camp de Vénissieux.

Le maire et plusieurs élus de la majorité municipale étaient présents ce 2 septembre, au niveau du 27, avenue de la République. Mais aussi l’historienne Valérie Portheret, le délégué régional de l’association Fils et filles de déportés juifs de France, Jean Lévy, le consul d’Allemagne et la petite-fille du général de Saint-Vincent, qui résista aux ordres de Vichy.

Là, se tenait en 1942 un camp d’internement où furent rassemblées, après la rafle du 26 août, 1016 juifs étrangers. Dans la nuit du 28 au 29 août 1942, grâce au travail commun de plusieurs organisations confessionnelles et résistantes et à l’appui du cardinal Gerlier, 108 enfants, séparés de leurs parents, purent être sauvés et confiés ensuite à des familles d’accueil. Malgré les efforts de la police de Vichy et du préfet Alexandre Angeli, seuls trois enfants furent repris et déportés.

Parmi les personnalités présentes, on pouvait aussi remarquer celle, émouvante, du père Jean Stern, témoin et survivant du camp.

Les recherches incroyables menées par l’historienne Valérie Portheret aux quatre coins du monde pour retrouver les survivants de cette épopée ont permis de mieux connaître cette histoire formidable. De ce travail acharné sont nés trois livres dont le dernier, Vous n’aurez pas les enfants, sorti en début d’année chez XO Éditions, a été présenté à la médiathèque Lucie-Aubrac ce 2 septembre.

Dans chacun des discours, ceux de Michèle Picard, de Valérie Portheret et de Jean Lévy, et dans le mot envoyé par l’historien Serge Klarsfeld et lu par Jean Lévy, les chiffres étaient là, terribles. « L’un des plus grands crimes de Vichy, rappelait Jean Lévy, est d’avoir livré tant de juifs aux nazis. » En 1942, 33 000 furent raflés en 11 semaines. Des 1016 internés dans le camp Bac Ky, à Vénissieux, 545 furent déportés à Auschwitz via Drancy. Heureusement, plusieurs organisations réussirent à exfiltrer 471 personnes dont les 108 enfants présents dans le camp. « Un épisode marquant de la Shoah, commentait Valérie Portheret, aux conséquences nationales , tant sur le plan politique que spirituel et moral. Une multitude de Français qui ont pris le contre-pied de la politique de Vichy ont sauvé 108 enfants mais aussi l’honneur de la France. »

Puis, Maéjane et Mohamed-Amine, deux enfants du CME (conseil municipal d’enfants) lurent des extraits du livre de Valérie Portheret avant que Jean Lévy ne porte à la connaissance de la nombreuse assemblée le message de Serge Klarsfeld, grand historien de la Shoah et président de l’association des Fils et filles de déportés juifs de France : « Vichy aurait pu répondre non aux injonctions nazies. C’est une tragédie, une déshonorante page d’histoire ineffaçable ! »

Au monument aux morts, Roger Gay, le président de l’ANACR (association nationale des anciens combattants et ami(e)s de la Résistance), rappelait que, parallèlement aux actions menées contre les nazis, « les Allemands et les miliciens arrêtaient massivement, raflaient, torturaient, ouvraient le feu tant sur les passants que sur les Résistants ».

Michèle Picard ramena tous ces événements dans un contexte plus contemporain. « C’est par la solidarité qu’on traverse les crises et qu’on s’en sort plus forts. » Elle évoqua « l’opération de fabrication des masques par les habitants (…) quand l’État a montré de sérieuses défaillances », tout en se refusant à comparer la Seconde Guerre mondiale à la crise du Covid. « Toute proportion gardée, entre le 2 septembre 1944, date de la libération de notre ville, et la crise sanitaire de 2020, une façon de faire bloc dans l’adversité perdure et se déroule comme un fil rouge à travers notre histoire. »

Elle évoqua également des faits beaucoup plus préoccupants, telles « les dégradations odieuses et négationnistes de cet été à Oradour-sur-Glane » et « les deux incendies criminels contre des mosquées de notre agglomération ». « Ils nous appellent à beaucoup plus de vigilance, à combattre, encore et encore, les discours de rejet et de repli (…). À la division, je préfère la cohésion. »

À la médiathèque Lucie-Aubrac, la vision de l’exposition « Les juifs de France dans la Shoah », due à l’association Fils et filles de déportés juifs de France, ravivaient des plaies quant à la politique de Pétain. Il était temps pour Valérie Portheret de parler non seulement de son livre mais de l’accueil qu’elle reçut à Vénissieux en 1992 de la part du maire André Gerin, du futur sénateur Guy Fischer et de Charles Jeannin, directeur du musée communal de la Résistance et de la Déportation.

Vous n’aurez pas les enfants, ce nouveau livre illustré de photos inédites du camp de Vénissieux — elle vient de retrouver une quinzième photo —, fut pour elle « un exercice difficile ». Il s’agissait de partir de sa thèse de 1600 pages, soutenue en 2016 à Lyon 2, et de « permettre au lecteur d’approcher une histoire complexe pour arriver à un récit qui puisse entrer dans toutes les écoles, toutes les maisons ».

Le résultat est un passionnant livre de 230 pages qui se lit comme un roman.

1 Commentaire

1 Commentaire

  1. Kyrszak Maxime

    14 septembre 2020 à 13 h 29 min

    J’ai trouvé ce livre très intéressant et surtout très émouvant.
    Valérie Portheret a engagé la présentation de son livre en évoquant l’ambivalence qui caractérise l’être humain. Pour elle cela explique notamment le comportement du cardinal Gerlier, « couvrant », face aux autorités de Vichy, le sauvetage de 108 enfants Juifs étrangers. Dans la liste des remerciements inscrits dans ce livre, je n’ai pas trouvé le nom de Ch. Jeannin rescapé des camps et Directeur du Musée de la Résistance et de la Déportation de Vénissieux où Valérie a travaillé au temps des emplois jeunes.
    Je remercie Valérie pour ce livre. Je souhaite ardemment son succès et je souhaite qu’une réalisation cinéma le traduise .Ce serait aussi une contribution médiatisée à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme!

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