La Biennale d’art contemporain met en résonance plusieurs lieux de l’agglomération. Le label “Focus” attire l’attention sur certaines expositions. Deux se tiendront à l’espace Madeleine-Lambert de la Maison du peuple : Pollution de Niek van de Steeg dès le 16 septembre puis Entrefaites de Damir Radovic en décembre.
À l’espace d’arts plastiques Madeleine-Lambert, l’heure est au montage. Ici, on dégage une fenêtre, là on peint. Des bâches couvrent le sol, des bruits de perceuse écorchent le silence. Au centre de la salle d’exposition, un grand objet est encore recouvert de sa protection plastifiée — c’est un pavillon à vent qui va tourner. On retrouve les techniciens du service arts plastiques, des professeurs des ateliers Henri-Matisse et leur directeur Xavier Jullien. Et l’artiste, Niek van de Steeg, dont l’installation porte le nom de Pollution.
Désignant un écran de télé encore emballé, Xavier Jullien précise qu’une vidéo y sera diffusée : “On voit Niek sur les berges du Rio Tinto, en Andalousie, naturellement riche en cuivre. Les eaux sont rouges et acides et il n’y existe pas de vie. Niek plonge et nage dans ce fleuve naturellement pollué.”
Et puisque c’est sous le titre de Pollution que Niek a rassemblé céramiques, vidéos, photos, sculptures, et installations. Il en parle volontiers : “La question de la pollution est subjective. Le Rio Tinto est tellement chargé en sel de cuivre que pas un poisson, pas une plante ne peuvent y vivre, à l’exception d’une bactérie. La Nasa est même venue l’étudier. Nous vivons dans la pollution de tout. On dit que même l’art est pollué par des concepts qui ne devraient pas y être.”
Niek van de Steeg aime poser des questions auxquelles il n’apporte pas forcément de réponses. Toujours au sujet de la pollution de l’art, il remarque qu’il n’existe pas une expo sans visites organisées de classes. “La médiation pollue-t-elle ? Ou est-elle un enrichissement ? L’art n’est-il pas aussi pollué par le marché, avec la spéculation créée autour de certains artistes ? Dans le même ordre d’idées, on peut aussi se demander si oui ou non le football est pollué par les transferts de joueurs et l’argent ? Il s’agit de savoir en fait si le monde est noir ou blanc. On retrouve beaucoup de cette dialectique dans mes œuvres, avec cette notion de “pour ou contre”. On peut également parler de zones grises, de consensus, d’un entre-deux pas forcément gris mis en balance. Ce sont tous ces concepts qui alimentent mon travail, entre le collectif et le privé, le clair et l’obscur…”
Il prend dans les mains une de ses céramiques qu’il déballe : “Elle est entre le noir et le blanc, qui sont tous deux en même quantité. Elle n’est pas plane et pourtant fonctionne à plat. L’idée du mouvement est aussi rendue par le tourbillon, la spirale qui y est représentée. J’en ai produit cinq identiques mais faites à la main, qui ne sont donc pas de parfaites copies.”
L’artiste mentionne le romancier Georges Perec et “ses histoires dans une histoire dans une histoire”, sa façon d’“épuiser un lieu”. Marcel Duchamp aussi, avec sa Machine célibataire et aussi La Société du spectacle de Guy Debord : “Dans cette surenchère, chaque pays veut son Guggenheim et ses Jeux olympiques.”
Le travail de Niek van de Steeg s’inscrit ainsi de plain-pied dans le monde actuel, son économie et ses problèmes de pollution, en le questionnant. Et le tuyau sortant du mur de l’espace Madeleine-Lambert d’où s’écoulera de l’eau n’en est qu’un des exemples flagrants.
Note : Pollution de Niek van de Steeg, du 16 septembre au 18 novembre à l’espace Madeleine-Lambert (focus de la Biennale d’art contemporain). Ouvert du mercredi au samedi, de 14 h 30 à 18 heures et sur rendez-vous. Entrée gratuite. Vernissage le vendredi 15 septembre à 18 h 30.
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