Agir à la fois en direction des entreprises et des jeunes, pour aider ces deux mondes à travailler ensemble. Telle est la tâche confiée à Laure G’Meiner par la Mission locale de Vénissieux, qui oriente les jeunes de 16 à 25 ans non scolarisés. L’intitulé de son poste parle de lui-même : conseillère chargée d’accompagnement vers l’entreprise. Dans ce cadre, Laure G’Meiner s’occupe d’une petite cinquantaine de jeunes, qu’elle suit à l’année. Parallèlement, elle est en relation avec une vingtaine de sociétés “partenaires”, qui constituent une partie de son vivier en matière d’emplois.
Pour le directeur de la Mission locale, Martial Guiguet, il s’agit de redonner leur chance à des jeunes qui ignorent tout des codes et des usages du monde du travail. “Lorsque nous avons créé ce poste en 2011, nous avions fait le constat que notre public est parfois très éloigné des attentes du monde de l’entreprise. Certains ont des difficultés à cause de leur parcours et de leur qualification, mais aussi à cause de leur comportement et de leur présentation. Or, quand on connaît la règle du jeu, on joue beaucoup mieux.”
Dire les choses
“Entre les entreprises et les jeunes, il existe parfois un véritable fossé, explique Laure G’Meiner. Certains arrivent à un entretien comme au fast-food ! Ils ont des difficultés à être ponctuels, à adopter une intonation et une tenue vestimentaire adaptées… Ils ne parviennent donc pas à valoriser leurs parcours et leurs compétences. Quant aux employeurs, certains ont une relation sereine et bienveillante avec les jeunes, tandis que d’autres sont plus intransigeants… Notre démarche consiste donc à les aider dans leur recrutement, et à suivre les jeunes qu’ils embauchent. Pour ces entreprises, c’est un gain de temps considérable.”
Le temps, c’est aussi l’une des clefs du succès pour les jeunes. “Ils ont besoin qu’on les suive dans la durée. Je les mets en action d’abord, et j’agis pour eux ensuite. J’ai par exemple demandé à une future vendeuse d’aller voir trois magasins de son choix, de poser des questions à la vendeuse sur place, de regarder les articles et de me parler de tout cela ensuite. L’idée, c’est que la personne puisse s’approprier son projet. Mais c’est parfois très long”.
Pour la conseillère, il ne faut pas hésiter à “dire les choses” lorsque c’est nécessaire. “Je me souviens d’un jeune homme, lors d’un entretien. Il avait les coudes sur le bureau et la tête dans ses mains, dans une posture qu’aucun employeur n’aurait tolérée. Je lui ai clairement fait comprendre qu’à la Mission locale, il devait avoir la même attitude que chez un recruteur. Se tenir correctement, être à l’heure, adopter une présentation discrète…”, relate Laure G’Meiner. Qui insiste aussi sur la valeur du travail. “C’est important d’aller jusqu’au bout de ce qu’on vous demande, ne serait-ce que pour laisser une bonne image de soi.”
Une autre force du dispositif tient à l’essence même de la Mission locale. Même si l’emploi reste le fil conducteur vers l’autonomie, toutes les problématiques des jeunes peuvent y être abordées. “Nous pouvons gérer les problèmes de rupture familiale, de ressources, de santé, de papiers, de mobilité, de petite sœur à garder… C’est un service complet que nous leur offrons […] Et qu’ils soient en situation d’emploi ou pas, ils peuvent toujours voir leur conseiller”, souligne le directeur, Martial Guiguet.
À ce jour, cette action financée à hauteur de 40 000 euros annuels par la Ville et l’État porte bien ses fruits. Sur les 48 jeunes suivis en 2015, 37 sont actuellement “en situation d’emploi”, dont 27 en emploi durable (contrats d’une durée supérieure à un an, ou à durée indéterminée). “Pour nous, les emplois dits précaires ne sont pas nécessairement une mauvaise chose. Six mois dans une entreprise, ça transforme un jeune”, remarque pourtant Martial Guiguet.
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