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Dix ans de compagnonnage avec Emmaüs

Emmaüs fête le 10e anniversaire de son implantation à Vénissieux. Reportage dans les coulisses d’une communauté où salariés, bénévoles et compagnons partagent un même engagement.

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La « librairie » Emmaüs : grand choix et petits prix

 

Emmaüs Vénissieux, c’est… 59 compagnons, dont 11 femmes. 160 bénévoles. 6 salariés. 11 nationalités. Des locaux mis à disposition par l’Opac du Rhône. Une cinquantaine de chambres individuelles. 3 000 m2 de surface de vente. 4 000 m2 d’ateliers. 6 000 m2 de dépôt. Mais Emmaüs à Vénissieux, ce sont surtout des histoires. Des hommes et des femmes souvent abîmés par la vie et ses épreuves, qui viennent chercher plus qu’un toit sous lequel dormir et des repas : un nouveau sens à leurs existences.

“Un compagnon, c’est quelqu’un qui frappe à notre porte et demande si nous avons de la place, explique Geneviève Soudan, vice-présidente de l’association Emmaüs Lyon. Si c’est le cas, alors il peut s’installer parmi nous après une semaine d’observation mutuelle, qui sert à vérifier que le “candidat” est apte à vivre en communauté et selon ses règles.”
Car la règle est de fournir un travail au sein du magasin bric-à-brac, en échange d’un logement et des repas quotidiens. Il faut ainsi être à 8 heures à son poste, reprendre à 14 heures après un repas pris en commun, et finir la journée quatre heures plus tard. “C’est comme ça depuis dix ans, rappelle Raul, le directeur. Et ça fonctionne plutôt bien !”

Voilà en effet presque dix ans, jour pour jour, que la communauté Emmaüs a ouvert ses portes entre la rue des Frères-Amadéo et l’avenue Marius-Berliet. C’était le samedi 23 avril 2005. Le bric-à-brac de Vénissieux, qui reste le 3e plus grand de France, succédait à celui de Saint-Germain-au-Mont-d’Or, devenu trop petit et inadapté. Son succès est immédiat : dès la première matinée, plus de 500 clients étaient enregistrés.

“Acheter à Emmaüs, c’est comme faire un don”

“Si la structure a si bien fonctionné dès le départ, explique Geneviève Soudan, c’est qu’il y avait une attente de la part de la clientèle traditionnelle d’Emmaüs. Beaucoup pensaient que notre installation à Vénissieux ne nous amènerait qu’une clientèle populaire dans les rayons. On sait aujourd’hui que c’est faux. La clientèle est de trois types : il y a d’abord ceux qui sont dans le besoin, qui ne peuvent pas acheter dans le commerce. Ensuite, les “bobos”, qui chinent et recherchent des objets vintages. Et enfin, ceux qui viennent par conviction : ils pensent qu’il n’est pas utile d’acheter neuf et que venir à Emmaüs est aussi, d’une certaine manière, faire un don.” “C’est un cercle vertueux”, complète Raul.

Un cercle vertueux rendu possible par le travail des compagnons. Derrière le magasin, au-delà des rayons, s’affairent des dizaines de mains. Jouets, jeux, vêtements, meubles, livres, bijoux, bibelots, chaussures, articles de sport, tableaux, vaisselle, antiquités, disques, appareils photo, petit et gros électroménager… Les compagnons trient, réparent, complètent, vérifient les dons reçus. Ils en font parfois une passion : l’un d’eux, pour vérifier que les puzzles donnés sont bien complets, les emporte pour les faire ; un autre est devenu “spécialiste des Barbies” ; un troisième a l’œil aussi affûté que celui d’un antiquaire pour distinguer les objets de valeur des vieilleries à vendre pour une poignée d’euros. Des chandeliers en verre moulé ont ainsi été vendus 160 euros pièce, il y a quelques semaines. Avec l’aide d’un commissaire-priseur, les compagnons ont aussi pu proposer un tableau vendu aux enchères 3 200 euros ! “Les compagnons, les bénévoles et les salariés forment le triptyque de la communauté, comme l’avait souhaité l’abbé Pierre, assure Raul. Ils gèrent tout le site : le standard, les dons, les réparations, les ventes, les livraisons… Sans eux, nous disparaissons.”

Une nouvelle résidence

De disparition de la communauté Emmaüs de Vénissieux, il n’est absolument pas question. Au contraire. La communauté se développe. Vingt-neuf logements sont en construction le long de l’avenue Marius-Berliet, sur le site dit du Thioley : la livraison est prévue pour l’automne. La nouvelle résidence comprendra des T1 et des T2, avec buanderie et espaces communs, kitchenettes et salles de bain privatives. “Ces logements ne vont pas remplacer ceux que nous avons actuellement, précise Geneviève Soudan. Ils vont s’y ajouter. Nous compterons alors à peu près 50 % de compagnons en plus. Ce sera un gros changement pour la communauté.”

Les nouveaux compagnons pourront participer à l’autre projet de la communauté de Vénissieux : rayonner sur l’agglomération. “En mai, nous allons ouvrir un magasin bric-à-brac d’environ 300 m2 à Villeurbanne, dans le quartier des Gratte-Ciel. Il viendra toucher une population ouvrière, en complément du magasin ouvert en 2012 qui est situé dans le 6e arrondissement de Lyon, lequel capte une clientèle à plus fort pouvoir d’achat. Emmaüs Rhône-Alpes essaie de fonctionner de façon commune. Nous voulons prendre part à cet effort.”

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