Connectez-vous avec nous

Bonjour, que cherchez-vous ?

Actus

Perturbateurs endocriniens : comprendre pour mieux se protéger

Même s’ils nous rendent service dans de nombreuses facettes de notre quotidien, ces substances ne sont pas sans danger pour notre santé.

Photo Emmanuel FOUDROT

Les perturbateurs endocriniens interfèrent avec notre système hormonal. Leur exposition peut entraîner des dérèglements endocriniens et avoir des effets néfastes sur l’organisme. Récemment, la Ville de Vénissieux organisait une semaine de prévention sur cette thématique.

Ces substances chimiques sont omniprésentes dans notre environnement : cosmétiques, produits d’hygiène, d’entretien, alimentation, ameublement, vêtements, jouets… « Elles sont parfois présentes de manière massive sans que les utilisateurs ne le sachent« , alerte Jacqueline Collard, ancienne chercheuse dans l’industrie et présidente de l’association SERA (Santé, Environnement, Auvergne Rhône-Alpes). Elle met en avant une méconnaissance sur les produits du quotidien : « La population pense que sur le marché tout est contrôlé, ce qui est tout à fait illusoire. »

Avec son association, elle œuvre pour établir un lien entre environnement, cadre de vie et santé, en insistant sur la qualité de l’air, de l’eau et de l’alimentation. Elle milite pour une meilleure information du public, tout en soulignant qu’il est difficile de supprimer totalement les perturbateurs endocriniens : il faut donc réduire notre exposition. Ces substances peuvent avoir des effets à court ou long terme, allant des troubles hormonaux aux malformations congénitales, en passant par certains cancers et des défaillances du système immunitaire.

Depuis 2021, la municipalité de Vénissieux a signé la charte « Ville et territoire sans perturbateurs endocriniens ». « Il faut rester en vigilance constante face à ces produits que l’on achète et consomme, estime Sophia Brikh, adjointe en charge de la santé à la mairie de Vénissieux. Nous faisons face à des industriels et des lobbys dont le poids est bien supérieur à celui de notre santé. »

.

Plusieurs actions ont été mises en place au sein de la Ville pour réduire l’exposition à ces substances chimiques. Du 7 au 10 avril dernier, une Semaine sans perturbateurs endocriniens a été organisée. Plusieurs ateliers permettaient d’informer les Vénissians sur les risques liés à ces substances. « On a pu observer de nombreuses préoccupations et on a voulu développer des outils qui soient accessibles à tous pour que chacun puisse agir à son échelle », expliquent Adeline Goudey et Florent Sabour, les coordinateurs du projet.

Delphine Jouassin, conseillère en environnement intérieur aux Hospices civils de Lyon, était présente pour donner des conseils pour limiter l’exposition à la maison : « On peut commencer par des changements simples, durables et non contraignants », explique-t-elle. Parmi les gestes quotidiens recommandés, l’aération du logement est essentielle. En effet, contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’air intérieur est plus pollué que l’air extérieur, d’après Delphine Jouassin. Elle conseille donc d’ouvrir les fenêtres chaque matin et chaque soir pendant une quinzaine de minutes.

Un autre sujet abordé lors de son atelier concernait l’usage des produits ménagers, souvent nocifs pour la santé. « Aujourd’hui, on cherche à avoir un appartement impeccable, mais qu’est-ce que cela signifie vraiment ?, demande-t-elle aux participantes. On veut constamment que tout sente bon et soit débarrassé de toutes les bactéries, alors que notre corps est lui-même constitué de bactéries. Il faut prendre du recul. » Elle recommande donc de revenir à des produits moins nocifs, comme le vinaigre ménager, le savon noir ou encore le bicarbonate de soude, qui sont tout aussi efficaces que les détergents chimiques. Si l’on souhaite malgré tout utiliser des produits industriels, elle conseille d’opter pour ceux portant les labels « Ecocert », « Ecolabel » ou « Nature et Progrès ».

Pour vérifier les produits que vous utilisez au quotidien, vous pouvez vous rendre sur ces sites Internet. À utiliser sans modération !

– Le Groupement des hôpitaux de l’Institut catholique de Lille permet de vérifier toutes les pièces de votre logement. Le site répertorie les risques et propose des solutions pour améliorer votre environnement : www.lesperturbateursendocriniens-mamaison.com

– L’association de consommateurs UFC-Que Choisir permet également de tester vos produits pour connaître leur composition et les dangers qu’ils comportent. Dans la rubrique « Tests », vous pouvez vous renseigner sur de nombreuses thématiques telles que l’alimentation, la santé (y compris les produits de beauté) ainsi que les produits ménagers. www.quechoisir.org

Quelques exemples de perturbateurs endocriniens

Bisphénol A (BPA) : ce composé chimique est utilisé pour fabriquer certains plastiques et résines. On le retrouve dans des produits alimentaires (boîtes de conserve, bouteilles en plastique rigide, contenants alimentaires en plastique) ainsi que dans des produits non alimentaires (tickets de caisse, CD, DVD, jouets en plastique). Depuis 2009, la France a interdit son utilisation dans les biberons et les contenants destinés à l’alimentation des bébés, et depuis 2013 dans les conditionnements, contenants et ustensiles alimentaires ainsi que dans les tickets de caisse ou de métro. Pourtant, d’après l’association de consommateurs UFC-Que Choisir, qui a mené des tests en 2023, cette substance serait encore présente dans de nombreux objets du quotidien vendus en France. Par ailleurs, certains fabricants ont supprimé le BPA pour le remplacer par du bisphénol B ou S, qui seraient tout aussi toxiques pour le corps humain.

Perfluorés (ou PFAS) : ce sont des substances très résistantes à l’eau, à la graisse et à la chaleur. On les appelle également « polluants éternels » car ils peuvent persister longtemps dans l’environnement ou dans notre organisme. On en trouve dans les emballages alimentaires, les poêles antiadhésives (comme celles en téflon), les vêtements imperméables, les tapis ou encore les produits ménagers. Certains perfluorés ont été interdits ou leur usage a été limité, mais ils restent couramment utilisés et peuvent provoquer des problèmes de santé à long terme.

Pesticides : certains pesticides sont considérés comme des perturbateurs endocriniens. Ils sont utilisés pour tuer ou repousser des parasites, insectes, champignons ou mauvaises herbes dans l’agriculture. On en retrouve donc dans des aliments tels que les fruits et légumes non biologiques, les céréales et les produits transformés. Ils sont également présents dans les produits de jardinage, les traitements antiparasitaires pour animaux domestiques (comme les anti-puces ou anti-tiques) et dans les produits pour la maison, tels que les sprays antimoustiques. Les effets sur la santé sont nombreux, incluant des troubles neurologiques, des maladies neurodégénératives, des risques pour le développement de l’enfant, ainsi que des impacts sur le système immunitaire.


SE PROTÉGER

Des alternatives aux produits nocifs

« Éveiller les consciences« , tel est l’objectif de l’association Zéro Déchet. Mardi 8 avril, elle était présente au centre associatif Boris-Vian, dans le cadre de la Semaine sans perturbateurs endocriniens organisée par la Ville de Vénissieux. L’association Zéro Déchet a proposé un atelier de fabrication de déodorant naturel. Lise Kaiser, coordinatrice de l’association, explique : « Tout ce qu’on met sur la peau a un impact sur notre corps. L’objectif est d’éveiller les consciences sur les dangers des perturbateurs endocriniens tout en proposant une alternative économique et saine. » Pour réaliser ce déodorant naturel, les participantes ont utilisé de l’huile de coco non transformée, des perles de cire d’abeille, de la fécule ainsi que du bicarbonate de soude. Tous les ingrédients étaient mélangés dans un bol chauffant, jusqu’à obtention d’une texture homogène. Il fallait ensuite verser la préparation dans un pot avant qu’elle ne refroidisse complètement.

.

Satisfaites de cette initiative, les 13 participantes comptent en parler autour d’elles pour changer le regard porté sur les produits chimiques. « J’ai appris à fabriquer un déodorant naturel qui ne contient ni substances dangereuses ni cancérigènes« , se réjouit Sylvie Abaglo, l’une des Vénissianes présentes. « On voit qu’il y a une prise de conscience sur les perturbateurs endocriniens, apprécie Sauna Gouiri, cadre animatrice. Les gens comprennent que c’est un poison, malgré toutes les publicités qui banalisent ces produits.« 

Johannita Hessou 

Quel impact sur notre santé ?

Aujourd’hui encore, les conséquences des perturbateurs endocriniens sur notre santé restent difficiles à recenser avec précision. « D’une personne à l’autre, d’un âge à l’autre, les effets sont différents, et il est difficile d’identifier la cause exacte des problèmes ou des pathologies liés aux perturbateurs endocriniens », assure Jacqueline Collard, ancienne chercheuse dans l’industrie et présidente de l’association SERA (Santé, Environnement, Auvergne Rhône-Alpes). Elle ajoute : « D’autant plus que la personne malade a souvent été confrontée à de multiples expositions. Nous sommes fréquemment exposés, sans le savoir, à des mélanges de substances par voie aérienne, buccale ou cutanée. »

Les scientifiques alertent sur une altération de nombreuses fonctions du système hormonal, notamment les fonctions reproductives, thyroïdiennes et surrénaliennes. « Il faut particulièrement protéger les femmes enceintes, les fœtus et les bébés, qui sont les plus vulnérables face à ces substances problématiques, insiste Jacqueline Collard. Le corps humain termine sa formation vers l’âge de 21 ans. » De la période prénatale jusqu’à la puberté, l’exposition aux perturbateurs endocriniens nécessite donc une vigilance accrue. Certains spécialistes établissent même un lien entre cette exposition précoce et l’augmentation des maladies chroniques non infectieuses telles que l’obésité, certains cancers, les troubles de la reproduction, l’asthme, les allergies ou encore les troubles du neurodéveloppement.


PFAS : une surveillance renforcée dans la métropole

L’agglomération lyonnaise, en particulier la Vallée de la Chimie, fait face à une situation préoccupante en raison de la pollution aux PFAS et de leur extrême persistance dans l’environnement.

Photo Emmanuel FOUDROT

La problématique des PFAS est devenue une préoccupation majeure dans la région lyonnaise. Située à quelques kilomètres de Vénissieux, la Vallée de la chimie s’étend sur plusieurs communes : Lyon, Pierre-Bénite, Saint-Fons, Irigny, Feyzin, Solaize, Vernaison et Sérézin-du-Rhône. Depuis des décennies, les rejets industriels y contaminent l’environnement local. En 2022, des analyses du chimiste Julien Zovile ont révélé la présence inquiétante de PFAS à Pierre-Bénite, dans l’air, l’eau et les sols. Utilisées dans l’industrie pour leurs propriétés antiadhésives, imperméabilisantes et résistantes à la chaleur, ces substances se retrouvent dans les poêles antiadhésives, les emballages alimentaires, les mousses anti-incendie, ou encore les vêtements imperméables.

Déjà en 2021, 15 communes, dont Vénissieux, signaient la charte « Villes et territoires sans perturbateurs endocriniens », marquant leur engagement à limiter l’exposition des populations à ces substances. Suite aux révélations du chimiste, une action collective a été lancée par 42 communes de la région lyonnaise pour mise en danger d’autrui, mettant en cause certains industriels. De son côté, la Métropole de Lyon a renforcé ses actions : elle effectue désormais une surveillance accrue à l’entrée et à la sortie des stations d’épuration, et analyse les rejets en PFAS des entreprises. En mars 2024, elle a assigné les entreprises Arkema et Daikin en justice pour faire la lumière sur leur responsabilité dans cette pollution et obtenir réparation.

Selon une étude publiée en 2024 par Selectra, sur la base de données du ministère de la Santé, plusieurs communes du sud lyonnais, dont Givors, Grigny, Pierre-Bénite et Solaize présentent des taux de PFAS dans l’eau potable supérieurs aux seuils recommandés. Pour y remédier, un système de filtration au charbon actif, développé par Suez, sera installé d’ici 2026 à l’usine Rhône-Sud. Il comprendra six réacteurs capables de capturer et de piéger ces composés persistants.

Face à cette pollution invisible mais durable, la réglementation évolue. Dès 2026, le gouvernement prévoit une interdiction progressive des PFAS dans certains produits, comme les textiles ou les cosmétiques, avant une interdiction totale dans tous les textiles à partir de 2030. L’eau potable fera également l’objet d’une surveillance renforcée, avec une analyse systématique des PFAS. Le gouvernement s’engage également à soutenir les efforts de dépollution en appliquant le principe du « pollueur-payeur » et en encourageant la recherche pour développer des alternatives.

Un nouvel institut écocitoyen
Le 16 avril, la Métropole a annoncé la création d’un Institut écocitoyen au sein de l’agglomération lyonnaise. Cet organisme indépendant vise à renforcer la production de connaissances sur les pollutions, en collaboration avec des acteurs scientifiques, économiques, institutionnels et citoyens. Sa création répond à la mobilisation de collectifs locaux, d’associations et d’habitants des territoires exposés aux pollutions, notamment aux PFAS. « Face aux pollutions, aux légitimes inquiétudes qu’elles suscitent comme à leurs impacts sanitaires et environnementaux, la Métropole s’engage pour créer un institut écocitoyen au service de la connaissance et de l’action, explique Bruno Bernard, président de la Métropole de Lyon. Cet institut indépendant devra rassembler chercheurs, citoyens, entreprises et pouvoirs publics pour transformer durablement l’industrie et renforcer la transparence et l’information citoyenne. J’en appelle à tous ces acteurs pour qu’ils s’engagent collectivement dans cette démarche ambitieuse et nécessaire. » Un budget de 100 000 € est prévu pour accompagner son lancement.

Cliquer pour commenter

Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous aimerez également

Actus

Onze jeunes, anciens élèves de CM1 et CM2 à Louis-Pergaud, se sont rendus, ce 23 avril, au bunker Valentine à Brême, dans le cadre...

Actus

Mo-Town, le plus grand village moto de France, a accueilli ses premiers visiteurs ce 18 avril.

Actus

Reliant à terme le plateau des Minguettes au parc Louis-Dupic, l’espace vert a désormais un nom : celui de l’ingénieure agronome Ana Maria Primavesi.

Actus

Halima et ses cinq enfants vivaient dans la tour 10. Sans contrat de bail à son nom, cette famille se retrouve sans domicile fixe...

Culture

Du 12 au 14 juillet dans le parc Louis-Dupic, les Fêtes escales sont devenues le rendez-vous incontournable de l’été. Avec, cette année encore, les...