C’est au café des « footeux », situé au 122 avenue Jules-Guesde, que le rendez-vous est fixé. Dans ce bar-tabac tenu par Karim, ancien dirigeant de l’AS Minguettes, d’anciens joueurs de Vénissieux, Saint-Genis-Laval, Lyon La Duchère ou Saint-Priest ont l’habitude de se retrouver. Ici, on « Refait le match », pour reprendre le titre de la fameuse émission de radio créée par Eugène Saccomano, en 2001, sur RTL.
Enzo Reale est installé tranquillement sur un bout de table. Il vient d’annoncer sa retraite sportive à l’âge de 33 ans. On lui en donne à peine vingt-cinq, résultat d’une hygiène de vie irréprochable. « J’arrête à cause de douleurs persistantes aux adducteurs (pubalgie) qui ont eu raison de ma carrière, J’ai tout tenté pour revenir à 100 % sur les terrains : repos, rééducation, kiné, renforcement musculaire… J’ai même dû passer sur le billard à Toulouse en décembre 2023, chez un chirurgien spécialiste. Il y a eu une légère amélioration, mais jamais de réelle guérison. » Enzo, victime d’avoir trop joué au football ? On peut le penser.
Le ballon dans la peau
« J’ai commencé à jouer au foot à 4 ans et demi », rappelle Enzo. Très tôt, le football devient une seconde nature pour lui. À l’école, il ne se sépare jamais de son ballon, souvent plus imposant que son cartable. Même ses peluches ou doudous se transforment en ballons improvisés. À 7 ans, il se distingue déjà dans les tournois et rejoint l’Olympique Lyonnais. Pour le Vénissian, tout s’accélère alors. Il gravit rapidement les échelons dans toutes les catégories de jeunes à l’OL. Des entraîneurs comme Armand Garrido, Cyrille Dolce ou Robert Valette, louent sa technique, sa vision de jeu et sa détermination. Enzo leur retourne le compliment : « Le bagage reçu au centre de formation nous permettait de voyager sans soucis. Et après avoir côtoyé Armand, tu es prêt à jouer au haut niveau. »
En juin 2012, alors qu’il espère intégrer l’équipe première de l’OL, Enzo voit arriver Steed Malbranque, un meneur de jeu expérimenté. « J’ai eu l’impression que le club n’avait plus besoin de moi, même si je me sentais prêt. Je revenais d’un prêt à Boulogne, en Ligue 2, où ça s’était bien passé, et on m’avait promis du temps de jeu. J’étais déçu, d’autant que je suis un enfant de Lyon et que j’ai toujours voulu rester fidèle à ce club. » Ce fut le début de la fin de son aventure à l’OL.
Un univers impitoyable
Après avoir rejoint Lorient en 2012, Enzo peine à s’imposer sous les ordres de Christian Gourcuff. En deux saisons et demie, il ne dispute que 22 matchs en Ligue 1. Déçu par son manque de temps de jeu, il demande à être prêté à Clermont. Mais là encore, le climat n’est pas favorable : « Avec Corinne Diacre, ce n’était pas la bonne alchimie. Nos visions du jeu étaient trop différentes. »
Il poursuit sa carrière dans des clubs moins prestigieux : Lyon Duchère, Cholet, Béziers, et même en Espagne, en troisième division. En 2023 enfin, il rejoint Chasselay, plus précisément le FC GOAL, et contribue à l’accession du club en National. Mais la blessure persistante finit par avoir raison de lui. « C’est frustrant de se rendre sur un terrain et de ne pas pouvoir jouer comme on le voudrait, parce que le corps ne suit plus. Je n’ai peut-être pas accompli la carrière dont j’avais rêvé, mais j’ai une certaine fierté de mon parcours. J’ai été champion d’Europe avec l’Équipe de France U19, c’est un beau souvenir. Je m’en rappellerai toute ma vie. Je jouais notamment avec Alexandre Lacazette et Antoine Griezmann. »
Aujourd’hui, Enzo se tourne vers l’avenir, avec des projets de reconversion. « Je veux rester dans le milieu du football, peut-être en tant que scout ou directeur sportif, pour bâtir une équipe et encadrer un staff. Cela m’intéresse vraiment. Je vais aussi passer mes diplômes d’entraîneur, ce qui me donnera un bagage supplémentaire. »
En attendant, il s’entraîne à transmettre son savoir-faire en coachant, pour le plaisir, l’équipe des avocats du barreau de Lyon. C’est son frère Tony, avocat, qui lui a proposé de prendre en charge cette équipe amateur.
Par ailleurs, Enzo se familiarise avec les médias en intervenant chaque semaine en tant que consultant dans l’émission 100% OL intitulée « Tant qu’il y aura des gones », disponible sur YouTube. Un moyen pour lui d’explorer la communication et de rester proche du monde du football.