Lorsqu’elle célébrait son centenaire, en 2022, TSV n’était pas en forme olympique. Cette vieille entreprise, spécialisée dans la maintenance et la réparation de transformateurs électriques, restait sur plusieurs exercices déficitaires. C’est en cette année d’anniversaire que l’ancienne usine du groupe Areva fut rachetée, alors que les prétendants ne se bousculaient pas au portillon.
Deux ans après, le courant ne passe pas toujours entre la nouvelle direction et les élus CGT de TSV. Ces derniers restent sceptiques quant au projet industriel que mène AK Group, acteur national indépendant du secteur électrique à très haute tension. « De nombreux points d’interrogation demeurent quant à la santé de l’entreprise et des salariés », pointe l’Union locale CGT de Vénissieux, Saint-Fons et Feyzin, via un communiqué de presse en date du 2 août. « Entre mépris de la direction face aux promesses non tenues suite au mouvement des salariés en avril dernier, et la dégradation constante des conditions de travail, la CGT dénonce une stratégie de la direction visant à laisser la production à l’abandon », est-il mentionné dans le document.
Deux représentants syndicaux dénoncent des départs en cascade entraînant une réorganisation d’entreprise intenable. « On était entre 115 et 120, déclarent Magali Grandsire et Ludovic Depetris. Lors du dernier CSE, nous n’étions plus que 91. La précédente direction avait pris de mauvaises décisions. Aujourd’hui, les Prêts garantis par l’État (PGE) sont en train d’être remboursés. Alors on avance avec des boulets aux pieds. On n’est plus en mesure de répondre à la demande qui elle, est croissante. »
TSV, acteur dans un secteur stratégique
Le président d’AK Group, habitué à racheter des structures en difficulté, a une lecture différente de la situation. « J’ai licencié dix membres de l’ancienne direction dès le début, affirme Abdeslam Koulouh, présent sur site ce jeudi 8 août. Si les effectifs sont passés de 120 à 90 salariés, c’est parce que nous avons aussi intégré 15 personnes à notre nouvelle entité MRA, qui travaille sur de petits transformateurs. Enfin, 5 personnes travaillent aujourd’hui dans le labo. Nous avons enregistré cinq ou six démissions mais en contrepartie, nous avons embauché 11 personnes. On n’a jamais autant formé que maintenant. Il n’y aura aucun plan social. Nos salariés ont bénéficié d’une augmentation de 5 % l’an dernier. Aujourd’hui, on recrute des régleurs, des bobiniers, ou encore des chefs de projets. Le PGE ? Sans ces 3 millions d’euros, que nous aurons fini de rembourser dans deux ans, TSV n’existerait plus. »
Le président du groupe voit en TSV un potentiel indéniable : « Notre point fort, c’est notre atelier, déclare le chef d’entreprise, entre deux transformateurs de plusieurs tonnes posés sur rails. Nos concurrents, eux, ne font que de la maintenance sur site client. La demande augmente depuis la crise Covid et la guerre en Ukraine. Nous avons 18 mois de visibilité dans notre carnet de commandes et nous allons les réaliser. Nous allons bénéficier d’environ 500 000 euros de subventions du plan France 2030. Le programme Care, en partenariat avec la SNCF, va nous aider à adapter notre outil de production aux enjeux du XXIe siècle. »
Ces arguments permettront-ils de faire baisser la tension ? Pour l’heure, l’Union locale CGT se dit prête à prendre part dans la bataille. « Nous pourrions recourir au droit d’alerte, avertit Gilles de Gea, depuis ses locaux de la Maison du Peuple. Nos experts étudient le dossier. Nous pensons aussi alerter les pouvoirs publics. Je rappelle qu’en 2007, les élus locaux avaient joué un grand rôle dans la reprise. Il faut vraiment tout faire pour que TSV reste en vie. Sans oublier que de gros clients ont tout intérêt à travailler avec cette entreprise qui revêt un intérêt stratégique. A Vénissieux, on a connu des drames avec Bosch, Savoie Réfractaires et Saint-Jean Industries. Il faut arrêter la casse ! »
Transformateurs Solutions Vénissieux, 102 ans d’expertise
Le groupe TSV a été créé en 1902, sous le nom de Laborde & Kupfer. Alstom en est devenu l’actionnaire principal en 1968. En 2007, la société est devenue une PME indépendante grâce au rachat par ses salariés. Depuis 2022, elle est une entité de AK Group, présent sur six sites en France et un au Chili. TSV possède 12 000 m² d’ateliers basés près du pont de l’avenue Francis-de-Presenssé. L’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires de 12 millions d’euros en 2023. Elle compte la SNCF, Enedis ou encore RTE parmi ses clients. TSV assure la maintenance préventive et la réparation de tous types de transformateurs qui affichent des puissances allant de 50 kVA (kilovolts-ampères) à 800 MVA (mégavolts-ampères).