Actus

L’extension du dépôt pétrolier inquiète

Classé « Seveso seuil haut », le dépôt pétrolier de Saint-Priest, situé à deux pas du quartier du Charréard de Vénissieux, a reçu le feu vert de la préfecture pour s’agrandir. Mais ce projet n’emballe ni les élus locaux ni les associations de riverains.

Avec son extension, le dépôt de la SDSP augmentera sa capacité de stockage de plus de 45 %.

Depuis sa validation par arrêté préfectoral en décembre 2023, l’extension du dépôt de produits pétroliers, situé à la croisée entre Saint-Priest, Vénissieux et Corbas, semble inéluctable. Le site qu’exploite la Société du dépôt de Saint-Priest (SDSP) entre la rue du Beaujolais, la rue des Pétroles et le chemin du Charbonnier peut stocker actuellement jusqu’à 94 900 tonnes de liquides inflammables dans huit bacs cylindriques aériens, cinq réservoirs enterrés et six cuves aériennes.

Le projet chiffré à 30 millions d’euros consiste à augmenter la capacité de stockage de plus de 45 %, pour passer à 138 000 tonnes, sans pour autant pousser les murs. Cela passe par l’aménagement de 5 réservoirs, d’une zone de stockage d’additifs, de quatre pistes de chargement-déchargement de camions, d’une unité de récupération des vapeurs et de trois pomperies.

Bien que situé en zone industrielle, ce site de près de 10 hectares, classé « Seveso seuil haut », est tout proche d’habitations. Le quartier résidentiel du Charréard, à Vénissieux, n’est qu’à 400 mètres à vol d’oiseaux. Et certains riverains ne voient pas forcément d’un bon œil cette extension. D’autant que l’étude d’impact contenue dans la demande d’autorisation mentionne une nette augmentation du trafic routier dans le secteur. En moyenne, 100 camions citernes supplémentaires pourraient prochainement sortir par la rue des Pétroles — ils sont 200 actuellement.

« On est en pleine agglomération, fait remarquer Enrico Rea, président de l’association Halte au bruit, qui se bat de longue date pour limiter le flux des camions chemin du Charbonnier. Les routes ne sont pas adaptées. On voit déjà des 40 tonnes faire la queue le matin devant chez nous. Ici, les gens ont déjà vécu l’enfer. Le secteur devrait être adapté, avec des accès aménagés à deux voies. »

Une zone d’ombre recouvre l’étude des dangers et risques de l’installation. Classée confidentielle, cette partie du dossier n’est consultable que par la préfecture, en raison de la prévention des actes de terrorisme. En l’absence de ces éléments, et considérant l’impact environnemental négatif, le conseil municipal de Vénissieux avait ainsi formulé, à l’unanimité, un avis défavorable le 19 juin 2023.

« Aujourd’hui, la position de la Ville reste la même, commente Lanouar Sghaier, adjoint à la voirie, au transport, au cadre de vie et à la propreté. Personne n’a accès aux données relatives à la sécurité, y compris les maires et le commissaire enquêteur. Il existe pourtant des risques d’incendie, d’explosion et de pollution des sols. L’évolution de ce site est énorme. Il est probable que l’augmentation du trafic aérien à l’aéroport de Lyon Saint-Exupéry en soit la cause principale. Les compagnies low-cost s’y développent. De plus, le trafic est déjà très chargé dans les environs du dépôt. Cette implantation était judicieuse dans les années 1940. Mais la ville s’est rapprochée et beaucoup de monde transite par ce secteur qui s’est énormément développé économiquement. On parle tout de même de 100 camions supplémentaires, des gros tonnages qui transportent des produits additifs ! »

Un recours juridique à suivre ?

Les municipalités de Saint-Priest, Corbas et Mions ont également exprimé leur désapprobation, toujours dans le cadre de l’enquête publique ouverte entre le 2 mai et le 13 juin 2023. Tout comme la Métropole de Lyon, qui a la charge de sécuriser le site et les habitations alentour dans le cadre du PPRT (Plan de prévention des risques technologiques).

Ce sont ces risques potentiels que redoute le plus Roger Rivat, vice-président de Halte au bruit : « Au-delà d’un accident, qui reste plausible, que se passerait-il si quelqu’un décidait de faire exploser une cuve ? La plus proche n’est qu’à 20 mètres de la route. Et juste de l’autre côté, sur le terminal Novatrans, on retrouve des centaines de wagons-citernes qui contiennent des matières dangereuses. De l’autre côté des voies, Crealis stocke du gaz… A-t-on pensé à la possibilité d’une réaction en chaîne ? »

En conclusion de l’enquête publique, le rapport du commissaire enquêteur avait donné un avis favorable à la demande d’autorisation environnementale. « Je considère que le projet est cohérent, réfléchi, technique, non porteur de risques graves pour l’environnement et qu’il s’inscrit parfaitement dans le processus de transition écologique », estime Yves Valentin. Cependant, cet avis est assorti d’une réserve et de quatre recommandations. Le commissaire enquêteur demande à la SDSP d’abandonner le pompage de la nappe de la molasse pour l’approvisionnement de sa réserve incendie et lui recommande d’assurer l’étanchéité parfaite des cuvettes de rétention, de réduire au minimum les émissions de COV (composés organiques volatils), de faire évoluer son parc de véhicules et de faire valider par la profession pétrolière (GESIP) ses moyens de défense contre l’incendie.

Au regard de ce rapport, la Fédération régionale des associations contre le train de fret en zone urbaine et pour le respect de l’environnement (Fracture) se dit prête à attaquer en justice l’arrêté préfectoral qui en découle.

La SDSP couvre 20 % de la consommation dans la région

Créée en novembre 1994, la SDSP stocke et distribue des liquides énergétiques. À Saint-Priest, son terminal  est connecté par pipeline à la raffinerie de Feyzin, au port pétrolier de Fos-sur-Mer et au pôle pétrochimique de Berre. Il distribue 1,6 millions de mètres cubes de produits par an, soit 20 % de la consommation de carburants et combustibles en Auvergne-Rhône-Alpes.

Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous aimerez également

Copyright © 2022 Expressions, les nouvelles de Vénissieux

Quitter la version mobile