Sans faire injure à votre carrière d’athlète de haut niveau, on ne vous connaît finalement que depuis peu, alors que vous êtes quinquagénaire…
– L’explication est simple. J’ai toujours été sportif dans l’âme, mais j’ai commencé l’athlétisme très tard, vers l’âge de 22 ans, alors que la plupart des athlètes débutent dès l’enfance, vers 6 ou 7 ans. Moi j’ai d’abord goûté au vélo, au tennis… Le passage dans une école de sport puis à l’UFRAPS m’a confirmé que j’aimais courir. À 22 ans, j’ai rejoint le LOU, mon premier club. Dès ma deuxième année, je bousculais la hiérarchie régionale en réalisant par exemple 10,87 s sur 100 m à Parilly.
Vous aviez des prédispositions pour le sprint ?
– Oui je pense. Mais j’ai aussi eu la chance d’être pris en main par Zoran Denoix, un entraîneur et préparateur physique qui a largement contribué à mon épanouissement. Non seulement il m’a aidé sur le plan technique et physique, mais il a également mis l’accent sur l’importance de la récupération et des soins pour maintenir un haut niveau de performance. Je me suis éclaté jusqu’à mes 25 ans.
Pourtant, vous n’apparaissez que rarement sur les tablettes…
– À l’âge de 26 ans, j’ai dû accomplir mon service militaire en intégrant le bataillon de chasseurs alpins à Bourg Saint-Maurice composé de sportifs de haut niveau, ça a été très dur physiquement. Et puis la grosse tuile : arrachement osseux de la jambe droite avec fracture. J’ai attendu six mois pour être rapatrié à l’hôpital Desgenettes, puis six mois supplémentaires de rééducation. En clair, j’ai perdu plus d’une année et pour retrouver un bon niveau, il a fallu que je bataille.
Comment expliquer qu’on ne retrouve vos traces de sprinter de premier plan, qu’à partir des années 2012-2013 ?
– L’athlétisme ne nourrit pas son homme et sa famille. J’ai décidé de faire un gros break de 2005 à 2013 pour me remettre au boulot, et pour être plus présent avec ma famille. Fort de mon bac pro en productique, et après avoir fait des jobs d’été dans la logistique, j’ai tout axé sur la stabilité avec des postes de chef d’équipe ou responsable d’équipe chez Codir, Elior, Intersport, Géodis. Aujourd’hui je suis coordinateur logistique régional chez STEF.
Vous revenez dans l’athlétisme à quel moment, et pourquoi ?
– J’avais remplacé le sprint par des trails, des courses au long cours pour m’entretenir. En 2013, je retrouve Zoran et d’autres connaissances au club d’athlétisme de Tassin. J’accepte de donner un coup de main aux jeunes, en leur apprenant à s’échauffer et à avoir la bonne gestuelle. Ça m’a donné envie de recourir. C’était reparti comme athlète vétéran.
Et les résultats ont immédiatement suivi ?
– Absolument. Contrairement aux athlètes qui atteignent leur pic de performance vers l’âge de 28 à 30 ans, j’avais encore beaucoup à donner à 39 ans. J’étais en mesure d’apporter de la fraîcheur et de la motivation. Pouvoir réaliser un chrono de 11,19 s sur 100 m alors que j’approchais de la quarantaine a été une véritable surprise. Il faut dire que dans ma tête tout allait bien, tant sur le plan personnel que professionnel. Mon entreprise me finance pour mes longs déplacements lors de compétitions internationales. Il faut savoir que la fédération n’aide pas les athlètes quand ils sont vétérans…
Quels ont été les temps forts de votre incroyable carrière de vétéran ?
– Outre les 26 titres de champions de France, j’ai pu m’illustrer lors de championnats d’Europe et du monde. En 2015, j’ai été vice-champion du monde chez les plus de 40 ans sur le relais 4×100 mètres en 43,26 s – nouveau record de France. En 2019, j’ai décroché une autre médaille d’argent en individuel sur 200 m (23,32 s) aux Mondiaux Masters de Torun (Pologne). Sans oublier mon titre européen, toujours en Pologne, en mars dernier sur 200 m chez les vétérans 50 ans (23’38 s). Titre complété par une médaille d’argent avec l’équipe de France, sur 4x200m mixte.