C’est une rentrée de vacances agitée qui s’est déroulée dans les collèges de Vénissieux. De nombreuses actions ont été menées ces lundi 29 et mardi 30 avril pour dénoncer la réforme du « choc des savoirs« , présentée en décembre dernier par Gabriel Attal, actuel Premier ministre, qui était alors ministre de l’Éducation nationale.
Au collège Elsa-Triolet, la mobilisation a été bien suivie. Au total, près de la moitié des enseignants de l’établissement étaient en grève. « Cette réforme me met en rogne« , dit Laetitia, professeure de SVT au collège Elsa-Triolet depuis 2009. L’enseignante estime que ces changements vont « détruire la structure pédagogique de ces élèves déjà fragiles et sensibles aux changements. » « On ne nous écoute pas, rajoute Chloé Gamaz, enseignante d’anglais. Pourtant, on est avec ces élèves presque tous les jours, on les connaît, on sait comment ils évoluent. Avec cette réforme, on va participer au tri social des élèves et tuer l’enseignement public volontairement.«
Avec les collèges Paul-Éluard et Aragon, Elsa-Triolet a décidé d’organiser un pique-nique revendicatif dans le parc des Minguettes, avant de rejoindre un rassemblement avec d’autres établissements de la Métropole. Au total, une quarantaine d’enseignants, parents et élèves se sont rassemblés dans le parc pour échanger sur les contours de cette réforme. La plupart des familles s’inquiètent des « groupes de besoins » annoncés par le gouvernement, qui permettraient de répartir les enfants dans des groupes selon leur niveau pour les cours de français et de mathématiques, afin qu’ils puissent progresser dans ces deux matières. D’après les professeurs, cette mesure « renforcera les différences de niveaux et n’aidera en rien les élèves« .
De nombreux élus municipaux étaient présents au pique-nique revendicatif dont Véronique Forestier, adjointe en charge de l’éducation : “Cette réforme signale la fin du collège unique et c’est grave. Il y a une forme de ségrégation qui s’installe au niveau du collège”, alerte-t-elle. Idir Boumertit, député de la 14e circonscription, a pour sa part réagi par le biais d’un communiqué en date du 26 avril, en affirmant que les “principales mesures de ce plan vont désorganiser le système scolaire dans son ensemble. (…) La création de groupes de niveau détériorera les conditions d’apprentissage. Elle remet en question le principe même d’entraide entre les élèves qui est pourtant valorisé par les professeurs comme par la recherche scientifique”. Il affirme également avoir demandé à “Madame la ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse de renoncer à ces mesures par une lettre en date du 25 avril”.
Des heures perdues en REP et REP +
« Tous les établissements ont reçu des heures en plus pour mettre en place ces groupes de niveau, explique Pascal Favriou, enseignant à Elsa-Triolet et membre du syndicat CGT Éduc’action. Et ces heures, elles ont été récupérées chez les REP et REP + où des options vont donc être supprimées à la rentrée. On va aussi se retrouver avec plus de groupes de besoin que de classes, alors que le gouvernement a des difficultés à trouver des professeurs de mathématiques et de français. On fait une réforme alors qu’on n’a pas de moyens, il y a un vrai problème.”
Du côté des enseignants de Paul-Éluard, la mobilisation a été moins forte que d’habitude le lundi 29 avril : « Il y a une certaine lassitude. Nous sommes classés REP+, mais on nous enlève des heures et on nous ferme des classes alors qu’on en a le plus besoin. Cela entraîne beaucoup d’incompréhension. De notre côté, nous pensons utiliser toute la marge de liberté dont nous disposerons. Dans l’immédiat, nous prévoyons de jouer aux imbéciles : on va former des groupes à notre façon et ils seront hétérogènes« , prévient Mathilde Mangadot, professeure d’allemand.
« Collège désert »
Ce mardi, la mobilisation a continué. Parents et enseignants se sont unis pour montrer leur désaccord en organisant des « collèges déserts » : les parents étaient invités à ne pas envoyer leurs enfants à l’école pour montrer leur mécontentement.
À Vénissieux, l’opération a été menée avec succès. Au collège Elsa-Triolet, 32 élèves étaient présents le mardi 30 avril et à Paul-Eluard, ils étaient seulement une vingtaine. “C’était vraiment inespéré, témoigne Aliénor Méniolle, professeure coordinatrice du dispositif Ulis. Jamais nous n’avions eu un tel investissement de la part des parents. Certains étaient même présents pour informer les élèves et les familles de la situation devant le collège.” Pour leur dernière action, les enseignants de la métropole s’étaient donné rendez-vous au rectorat. Même s’ils étaient un peu moins nombreux, tous se déclaraient satisfaits de ces deux jours de mobilisation.
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