Ce 6 avril, l’artiste vénissiane Sonia Viel recevait ses amis à la Fabrique des colombes. Devenue centre d’art et du livre, cette ancienne usine textile de Sainte-Colombe-sur-Gand, dans la Loire, a été rachetée par l’éditeur Andrea Iacovella — qui, lui aussi, a grandi à Vénissieux — et son épouse Dominique pour leur maison d’édition La Rumeur libre, à laquelle est désormais rattaché l’Espace Pandora.
Modeste, Sonia sourit lorsqu’on la traite d’« artiste ». Pourtant, elle a tâté du documentaire (dont un sur Madeleine Lambert), elle chante, écrit et réalise des collages, sujet de cette expo, Dans l’atelier de Sonia, que l’on peut voir jusqu’au 11 mai. Collages qui ont servi d’affiche à l’une des éditions de Hors-cadre (festival du cinéma Gérard-Philipe) et à de nombreuses couvertures de livres édités à La Rumeur libre.
« Pourquoi ai-je besoin de faire cela ?, se questionnait Sonia. Tous les jours, des choses m’interpellent, belles, poétiques ou violentes. Sur la vingtaine de minutes de trajet qui relie mon domicile à mon travail, je vois des arbres en fleurs, des chats, un château d’eau, des chaises pour les points de deal, des voitures déglinguées, la torche de Feyzin, je sens la bonne odeur qui provient d’une boulangerie… Ce qui me plaît, ce sont les associations inédites, drôles, improbables, qui rassemblent tout ce que j’aime. Je fais mon marché d’images, je trie et… ça me saute aux yeux. J’aime ainsi faire se côtoyer des personnalités qui auraient eu des choses à se raconter si elles s’étaient fréquentées. »
Elle cite ainsi Joséphine Baker et Marguerite Duras à Marrakech ou une improbable rencontre entre Dali et Marilyn Monroe écoutant Chet Baker à Cadaqués. Bien sûr, Prévert aimait ce genre de collages et Sonia ajoute : « Qu’est-ce qu’on se serait marré, tous les deux ! »
Elle emprunte ainsi ses images aux mondes de la musique, du cinéma ou de la littérature, aux femmes célèbres (ou pas) et affirme : « Je suis une voleuse. C’est ainsi que je voudrais voler deux mots à Emmanuel Merle, le tragique et la joie. J’aime ainsi beaucoup l’artiste italien Pippo Delbono, qui fait se côtoyer les deux. »
Au fil des collages, on admire des hommages à Boris Vian ou Pier Paolo Pasolini, on apprécie ces mariages inédits de photos et de peintures, de noir et blanc et de couleurs, qui attirent l’œil et l’impressionnent. La poésie baigne tout cela.
Maîtres des lieux, Andrea et Dominique Iacovella expliquaient que Dans l’atelier de Sonia faisait partie de ces manifestations se déroulant à la Fabrique et bénéficiant de l’aide de la Drac (Direction régionale des affaires culturelles). Ils se réjouissaient d’accueillir ainsi la première exposition personnelle de Sonia Viel. D’autres sont à venir, la prochaine sur des livres d’artistes, une autre encore à l’automne, conçue par Alain Garland et Gérard Bourget, qui fera partie du off de la prochaine Biennale de l’art contemporain.
Puis vint le temps des lectures, faites par Thierry Renard et Emmanuel Merle et tirées du deuxième livre écrit ensemble, La Nuit passante. Adapté d’une forme littéraire persane, le ghazal, ce dialogue poétique alternait des vers écrits par l’un et par l’autre. Une merveilleuse façon de clore ce vernissage avant le temps des agapes.
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