Si le mouvement contre la réforme des retraites n’a pas obtenu le retrait du texte, il a au moins permis aux syndicats d’enregistrer de nouvelles adhésions. Et ce, à un rythme « inédit, signe de la colère des Français contre une réforme profondément injuste », commente-t-on chez Force Ouvrière (FO).
« Depuis le début de l’année, nous avons enregistré deux fois plus de nouvelles adhésions que sur la même période d’une année classique, témoigne Gilles De Gea, secrétaire de l’Union locale CGT Vénissieux-Saint-Fons-Feyzin. Nous en sommes donc à cinquante adhérents de plus, tous motivés par le mouvement social en cours bien sûr. Dans les entreprises aussi, les contacts ont été beaucoup plus nombreux. Si pour l’instant nous n’avons pas obtenu satisfaction sur le dossier des retraites, le mouvement syndical dans son ensemble va sortir renforcé. »
Même constat à la CFDT : « Dans la région, de nombreux salariés sont venus nous voir pour la première fois de leur vie pour savoir comment s’impliquer, que ce soit pour donner un coup de main lors des journées de mobilisation, s’informer sur leurs droits et les conséquences de la réforme sur leur carrière, suivre les évolutions du mouvement social ou bien sûr pour adhérer, explique un cadre du syndicat. Nous avons aussi constaté des retours, avec des camarades qui s’étaient éloignés des syndicats, par désaccord sur certains dossiers ou par manque de temps par exemple, et qui sont revenus en nous disant ‘Là, ce n’est pas possible ce qu’il se passe, on marche sur la tête’. C’est de bon augure pour la défense, dans les années à venir, du droit du travail. »
Côté chiffres, la CFDT renvoie aux données nationales. Celles-ci font état, depuis le début de l’année, de 31 000 nouveaux adhérents. Un chiffre en hausse de +40% en comparaison annuelle. Même « score » ou presque pour la CGT, avec 30 000 nouvelles adhésions… Ce qui représente +200% d’adhésions par rapport à la même période en 2021 ! Et ce, avec un profil plus jeune (35% de moins de 35 ans) et plus féminin (47% de femmes).
« Un bagage technique et argumentaire
« Moi, je n’avais jamais vraiment envisagé de rejoindre la CGT ou tout autre syndicat, témoigne Loïc, salarié du secteur privé, croisé lors de la dernière manifestation contre la réforme des retraites. J’en avais une image un peu vieillissante, de luttes perdues d’avance. Mais quand le gouvernement a annoncé vouloir porter l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans, j’ai voulu montrer que je n’étais pas d’accord. Le problème ? Je ne savais pas quoi faire, par quoi commencer, comment être utile. Marcher dans la rue, c’est bien, mais un mouvement social, ça doit se structurer, se faire connaître, échanger avec les autres. Alors j’ai contacté le syndicat présent dans mon entreprise. »
« Rejoindre la CFDT m’a permis d’avoir un bagage technique et argumentaire pour m’impliquer dans le mouvement social, témoigne Marion, cadre dans le public. Et puis quand on lutte, c’est bien d’avoir des camarades. Ça aide à rester motivé, parce que clairement, on a pris des coups — au sens propre comme au sens figuré d’ailleurs — depuis le début du mouvement. »
Notons que les deux poids lourds du monde syndical ne sont pas les seuls à constater une hausse des adhésions ces derniers mois. Chez Force Ouvrière, on estime à +30% les nouvelles demandes de cartes — même chiffre au niveau national. À la CFTC, 6500 adhésions ont été enregistrées en France pendant le premier trimestre (+50% en comparaison annuelle). Même constat à l’Unsa, la FSU ou encore la CFE-CGC — cette dernière ne communiquera ses chiffres qu’en fin d’année, mais elle indique avoir constaté « des adhésions supplémentaires, sous l’effet conjugué de la mobilisation et de la médiatisation de celle-ci ».
Restera à installer, dans la durée, ces nouvelles adhésions. « Les raisons de se mobiliser ne vont pas manquer dans les mois à venir », anticipe Gilles De Gea.
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