Le projet porté par SNCF Réseau (ex-RFF) consiste à élargir cette section ferroviaire, aujourd’hui étroite et saturée. Le dossier est encore peu connu du grand public. Mais les membres de la fédération Fracture, qui regroupe dix associations actives dans 28 communes, le connaissent sur le bout des doigts.
La réunion de synthèse de la concertation publique, organisée jeudi 1er juin à Saint-Priest, a regroupé une soixantaine de participants. De nombreux adhérents ont tiré la sonnette d’alarme. Si bien que l’événement a démarré avec quelques minutes de retard. L’association du Sud lyonnais « Le Fer autrement » a manifesté son mécontentement sur le parvis de la salle Concorde, avant de boycotter la réunion. « En participant, on leur sert de faire-valoir, nous a confié le président Gilbert Barnachon. Mieux vaut ça que de contribuer à un projet qui entérine le passage du fret sur nos territoires et qui, par conséquent, rajouterait des risques. »
« On n’en a rien à faire, du circuit bleu et du circuit rouge ! »
Si la méthode diffère, la position du responsable associatif rejoint celle de ses compagnons de lutte. Les associations sont favorables à l’élargissement de la section Saint-Fons-Grenay sur la ligne Lyon-Grenoble… Mais seulement pour le transport de passagers.
Or, SNCF Réseau compte sur cet aménagement pour attirer non seulement deux fois plus de trains de voyageurs, mais aussi pour multiplier le passage de fret par deux. Selon le décompte du maître d’ouvrage, au premier trimestre 2023, la ligne Lyon-Grenoble voit circuler quotidiennement 180 trains de voyageurs et 20 trains de marchandises.
Du 24 avril au 4 juin, le public était invité à s’exprimer sur ce projet facturé à plus d’un milliard d’euros. Tout au long de cette concertation, SNCF Réseau a détaillé les variantes d’implantations des voies à créer. Sur chacun des six tronçons qui composent les 19 km de la section, deux tracés sont étudiés : un « bleu » et un « rouge ».
« On n’en a rien à faire, du circuit bleu et du circuit rouge, a balayé Gilles Renevier, président de Fracture. Ce qu’on veut, c’est qu’il n’y ait pas d’augmentation du fret. »
Marc Rea, ex-président de cette même fédération, a rappelé : « En 2001, nous avions rencontré le préfet Besse. Il incitait à sortir le fret, non seulement de La Part-Dieu, mais plus largement de l’agglomération. Il faut que le CFAL sud démarre avant la fin des travaux de la mise à quatre voies. Or, sur votre agenda, il démarre un an après (en 2033, ndlr). Il ne se fera jamais ! »
Le CFAL est l’acronyme de « Contournement ferroviaire de l’agglomération lyonnaise ». Scindé en deux fuseaux, nord et sud, ce contournement a pour objectif de fluidifier le trafic et éloigner les trains de fret des villes.
Pour certains, sa réalisation serait une bonne solution… À condition que sa partie sud passe très à l’est, loin des secteurs résidentiels et des zones industrielles à risques, et ne soit pas connectée à la gare de triage de Sibelin (Feyzin et Solaize). « À Sibelin, le jour où ça va faire ‘boum’, on ne sera peut-être plus là », a averti Gérard Laroze, président d’Apache.
« Le CFAL nord a fait l’objet d’une Déclaration d’utilité publique (DUP) et le tracé est officiellement connu, » a confirmé Jean-François Borella (SNCF Réseau). Avant de concéder : « Au sud, il n’y a pas de DUP. À ce stade, le tracé ne peut pas être mentionné. »
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Le dossier complet est consultable en ligne sur le site de l’Etoile ferroviaire lyonnaise.
Quels impacts pour Vénissieux ?
Du 24 avril au 31 mai 2023, 150 personnes ont participé aux permanences et ateliers organisés dans les cinq communes que traverse la section Saint-Fons/Grenay. À Vénissieux, la concertation publique n’a pas déplacé les foules, loin de là. Seules 11 personnes se sont présentées à la Halle à grains, le 10 mai. Aucune n’a poussé les portes de la permanence, prévue le même jour.
L’élargissement de la section concerne pourtant pleinement Vénissieux, dont la gare est l’un des principaux pôles d’échanges multimodaux de la Métropole de Lyon. Dans le projet, le tronçon de 2,4 km allant de la rue Pierre-Sémard (ouest de la gare) au chemin du Charbonnier est directement touché. SNCF Réseau ajoutera une voie nouvelle à cette portion, actuellement limitée à trois voies. Le franchissement de la gare ne fait pas débat : l’emprise, côté sud, avait été prévue lors de la construction de la gare. En revanche, dans le prolongement des quais, en direction de Grenay, deux variantes d’implantation sont étudiées. Un tracé « bleu » fait passer la quatrième voie au nord des trois existantes à l’aide d’une bascule de voies. Un tracé « rouge » consiste à avancer en ligne droite, en créant cette voie au sud de la ligne historique. Cette option « rectiligne » ne serait pas sans conséquences : elle aboutirait à la démolition-reconstruction du Pont Berliet, sur lequel circulent 17 200 véhicules chaque jour, et à une réduction de voirie chemin du Charbonnier.
Un projet à un milliard
Le coût prévisionnel du projet est estimé à 1,06 milliard d’euros. Quatre financeurs se partagent la note : l’Union européenne (32 %), la Région Auvergne-Rhône-Alpes (28 %), l’État (26 %) et la Métropole de Lyon (14 %). 6,5 % millions d’euros ont été engagés pour financer la phase d’études préliminaires.
Le CFAL et la section Saint-Fons/Grenay considérés comme urgents
Dans son rapport de février 2023, le Conseil d’orientation des infrastructures (COI) détaille les échéances de six grands projets ferroviaires qui concernent directement l’agglomération lyonnaise. Outre la section Saint-Fons/Grenay, dont la réalisation est envisagée pour la période 2028-2032, l’instance ministérielle réinscrit le projet alternatif à l’A45 (2023-2027), le nouveau franchissement sud du Rhône (2028-2032), le CFAL nord (2028-2037), le CFAL sud (2033-2037) et la liaison Lyon-Turin, dont les travaux complémentaires pourraient se poursuivre après 2043.
Le COI estime que le CFAL et l’élargissement de la section Saint-Fons/Grenay sont « urgents » mais « ne peuvent être réalisés en moins d’une douzaine d’années. » Pour aménager ces deux infrastructures, ses experts tablent sur un investissement de 2,9 milliards d’euros.
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