Jeudi 27 avril, Michèle Picard avait rendez-vous au tribunal administratif. Comme tous les ans ou presque (*), le maire de Vénissieux était appelé à défendre ses arrêtés pris fin mars, interdisant, sur le territoire de la commune, les expulsions locatives sans solution de relogement, les coupures d’électricité et de gaz, les saisies mobilières.
Michèle Picard avait, au cours de l’audience, expliqué que « les effets des crises sont encore plus violents dans les villes populaires », formant « un tableau déjà noir auquel se rajoutent l’hyperinflation, l’envolée des prix de l’énergie et des produits alimentaires ». « Je reste persuadée qu’il est de mon devoir de maire de protéger mes concitoyens plongés dans une détresse sociale inextricable, assurait le maire. Mais jusqu’à quand pourrons-nous jouer ce rôle d’amortisseur social ? Le pic n’est pas atteint, nous le savons, et les mois à venir seront encore plus difficiles. De par mes pouvoirs de police, il est aussi de ma responsabilité d’assurer le bon ordre, la tranquillité, la salubrité publique et la sécurité des habitants contre les accidents dus aux moyens de substitution d’énergies notamment. »
Le préfet, pour sa part, estimait qu’un maire « n’a pas la compétence requise pour prendre de tels arrêtés, qui constituent un détournement de pouvoir, violent l’autorité de la chose jugée et portent atteinte à la liberté du commerce et de l’industrie ».
Le tribunal administratif est allé dans le sens du préfet et a, peu après, décidé de suspendre les arrêtés pris par Michèle Picard.
« Cette décision n’affaiblit en rien ma détermination, a commenté, dans un communiqué de presse, Michèle Picard. Mon objectif n’est pas d’obtenir le rejet de la requête en suspension initiée par la Préfecture. Mon objectif est constant : faire jurisprudence, sur le fond, pour que la loi évolue, pour que chaque citoyen puisse vivre et non pas survivre. (…) Je ne me résoudrai jamais à laisser des familles plonger dans la spirale de l’exclusion, privées de toute dignité dans une zone de non-droits constitutionnels. »
(*) En 2020, en raison de la crise du Covid-19, la trêve hivernale avait été prolongée jusqu’au 10 juillet, et le gouvernement avait demandé aux préfets « de ne pas recourir à la force publique sans solution de relogement ». Michèle Picard avait alors estimé qu’il n’était pas nécessaire de prendre des arrêtés contre les expulsions locatives.
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