Au milieu du XXe siècle, les jardins ouvriers foisonnaient à Vénissieux. Ce n’est plus vraiment le cas aujourd’hui. Ces espaces cultivables, désormais appelés « jardins familiaux », sont au nombre de quatre en 2023 : les jardins de la Garraine (ex-Renault Trucks) et de l’Espéranto se trouvent à la pointe sud de la ville. Au nord, ceux de Keolis Lyon et de l’Abbé Billot se situent de part et d’autre du boulevard périphérique. Trois ont disparu dans un passé proche : ceux de l’Espérance, de la SNCF et Borelli.
Il subsiste pourtant une demande pour ces lopins urbains. Ces rectangles fertiles restent prisés des mordus du jardinage. Les associations gestionnaires, à la tête de près de 330 parcelles, ne manquent pas de candidats. La liste d’attente pour espérer planter tomates et courges en échange d’une cotisation est longue comme un manche de pioche.
Aux jardins de Keolis Lyon, Jacqueline et Jean-Jacques ne lâcheraient leur terrain pour rien au monde. « On est là depuis le 6 janvier 1998, ça fait 25 ans, » lâche le mari, retraité des TCL.
Cette immense zone regroupe environ 130 parcelles sur plus de six hectares. Ce paradis des jardiniers est préservé du tumulte du trafic routier, pourtant tout proche. Le fond sonore que génère le périph’ s’apparenterait presque à un bruit blanc.
Au bord des rangées de salades et de petits pois, certains cabanons ont presque des allures de mobil-homes. Celui du couple, parfaitement entretenu, présente toutes les commodités. Dès l’arrivée des beaux jours, les allers-retours depuis leur appartement du quartier Jules-Guesde se font de plus en plus fréquents.
« On a tout refait, y compris notre cabane, racontent-il en préparant le café. On s’est débrouillé pour tout refaire nous-mêmes. L’été, on invite notre famille ici. » Les canisses de la pergola garantiront la fraîcheur pour tous. Dotés de cinq récupérateurs d’eau de pluie de 1 000 litres chacun, plus un panneau solaire, Jacqueline et Jean-Jacques mettent toutes les chances de leur côté. Soigneusement alignés sur des étagères à l’abri des intempéries, les godets à semis promettent une nouvelle fois une profusion de tomates de toutes variétés.
Du bio chez Billot
Encore plus anciens, les jardins de l’Abbé Billot sont exploités depuis 1942 dans le prolongement du parc de Parilly. Au carrefour entre Vénissieux, Lyon 8e et Bron, 53 amateurs s’affairent sur des parcelles de 200 m2. « On n’est ni politisés ni religieux, prévient Denis Badard, dirigeant de la section pour l’association des jardins du Lyonnais et de la Xavière. Cet endroit, on l’appelle le jardin Billot, tout court. ‘Billot’, ça ressemble à ‘bio’ ! »
L’association tente d’établir une certaine unité autour de pratiques respectueuses de l’environnement. « On fait la chasse aux produits phytosanitaires, admet le quadragénaire. Avec les anciens, c’est parfois un peu compliqué ! Certaines habitudes sont tenaces. Mais on parvient à entretenir un écosystème. On aperçoit des bébés hérissons. On aimerait bien avoir un apiculteur. »
Cet attrait pour la biodiversité trouve un écho parmi les adhérents. Dans son espace entretenu au cordeau, Patrice est partageur. Son hôtel à insectes et son nichoir à oiseaux pourraient être classés cinq étoiles. « Les mésanges font des allers-retours depuis les arbres du bord du périphérique », fait-il remarquer. Les jeunes générations s’y mettent également. Depuis un peu plus d’un an, la petite Héloïse découvre les joies du jardinage avec Florent, son papa. « J’ai planté des fleurs pour attirer les abeilles et les coccinelles », explique fièrement la fillette.
Si, à Billot, le jardinage n’est pas une course, d’aucuns considèrent que le numéro un, c’est Manu. « Son rendement rendrait jaloux n’importe quelle multinationale », s’amuse Denis Badard. Selon Manu, le sens de l’observation et l’assiduité seraient les clés du succès : « Je suis abonné à plusieurs revues spécialisées. Et le matin, je suis là à 8 heures pile ! »
F.D.
Jardins partagés : la passion aux pieds des tours
La commune compte plusieurs jardins dits « partagés ». À la Darnaise, le jardin de la Passion fleurit à l’aide des bénévoles et du centre social des Minguettes.
À la Darnaise, il fait partie du décor depuis 2011. Le jardin de la Passion, baptisé ainsi par les habitants du quartier, s’étend sur près de 800 m2 au bas des tours 63 et 35 du boulevard Lénine. Un petit îlot de fraîcheur que les passants prennent le temps d’admirer et de contempler, surtout quand les beaux jours font leur apparition.
Ce jeudi 13 avril, il y a foule. Les enfants des centres sociaux des Minguettes sont présents pour réaliser des herbiers de fleurs et personnaliser des galets de décoration. Tandis que les jardiniers, tous bénévoles, écoutent attentivement les précieux conseils de Mathieu, de l’association vénissiane Graines de Bio-Divers-Cité.
« Nous avons pu voir que pendant la fermeture, il y avait eu une explosion de fleurs sauvages, décrit Mathieu. J’ai pris le temps de toutes les présenter et de préciser comment on pouvait les intégrer aux futures plantations. Ensuite, les jardiniers amateurs ont pu faire leur choix. Les coquelicots, les marguerites et les nielles des blés ont été parmi les favorites. »
Ce jardin a été créé grâce à un financement public de la Ville, de la Métropole, de l’État et du bailleur Grand Lyon Habitat, ce dernier étant propriétaire du terrain. Chaque mardi et jeudi, les bénévoles s’y activent en plantant, récoltant ou coupant les mauvaises herbes.
À l’image de Salmata Mmadi, qui fréquente le jardin de la Passion depuis bientôt dix ans. Ce qu’elle apprécie par-dessus tout, c’est la fierté ressentie lorsqu’elle cuisine ce qu’elle a récolté. Elle vit à Léo-Lagrange et fait le déplacement à la Darnaise chaque jeudi : « J’apprends beaucoup de choses sur les variétés de tomates, de pommes de terre ou de fleurs. Mes parents avaient un potager, ça me rappelle mon enfance… J’aime rester dans ce jardin, je m’y sens bien. »
P.G.
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Le jardin de la Passion est ouvert tous les mardis et jeudis de 14 h à 17 h. Le centre social des Minguettes recherche des bénévoles pour rejoindre l’équipe de jardiniers. Pour plus d’informations : 04 72 21 50 80 (Roger-Vailland) ou 04 78 70 19 78 (Eugénie-Cotton).
Jardin de l’Envol : là où l’on sème des graines pour son avenir
Rue de la Démocratie, le jardin de l’Envol présente une vocation sociale. Depuis 2004, des centaines de jardiniers y ont trouvé un appui pour, parfois, se reconstruire.
Dire que le Jardin de l’Envol est solidement implanté à Vénissieux relèverait presque du doux euphémisme : pensez donc ! Cela fait désormais 19 ans qu’il a ouvert ses portes, rue de la Démocratie, à quelques encablures du centre de Vénissieux et du plateau des Minguettes. Sauf que cet espace, de plus de 2 500 m2, n’est pas un jardin comme les autres. Il présente en effet une vocation d’insertion sociale.
« C’est l’essence même de cet espace de nature en cœur de ville, explique Clara Gaulme, de l’association Le Passe Jardins, qui en assure l’animation tout au long de l’année. Pour cela, beaucoup de partenariats sont noués, que ce soit avec des structures d’accompagnement social, des associations culturelles, solidaires et citoyennes… L’idée, c’est que passer au Jardin de l’Envol permet de découvrir d’autres structures, en plus de retrouver un contact avec la nature, en fonction de ses besoins et de ses attentes. C’est pourquoi les profils sont très variés parmi toutes les personnes qui font vivre ce lieu, que ce soit ponctuellement ou régulièrement. »
Illustration le 13 avril, alors qu’une dizaine de jardiniers tentent de passer entre les gouttes pour quelques plantations printanières. Ici, on partage de beaux moments, mais aussi, on produit de quoi se nourrir et nourrir les autres : le Jardin de l’Envol, ce n’est pas que pour s’occuper l’esprit. « Je ne travaille pas en ce moment, témoigne une passionnée de nature. Le Jardin de l’Envol m’offre un espace pour reprendre les bases techniques du jardinage, dans le cadre d’un projet professionnel en rapport avec ce domaine. Le tout, dans la bonne humeur, tout le monde s’entend bien et échange sur son parcours. Et puis, je vis en appartement, ça fait du bien de retrouver un contact régulier avec la nature. C’est pourquoi je viens ici deux fois par semaine, au moins, depuis plus de deux mois. »
Plus loin, une autre jardinière est occupée à planter des graines de cerinthe major. Elle explique avoir fait son entrée au Jardin, en 2005, quand elle ne travaillait pas. « À l’époque, j’étais à la recherche d’un lieu pour me ressourcer. L’Envol m’a beaucoup aidée moralement, c’était très difficile, le chômage. Depuis, j’ai gardé l’habitude de m’y rendre. En ce moment, je travaille dans les écoles, donc j’y vais plutôt en week-end, ou pendant les vacances scolaires. Mais pour rien au monde je ne pourrais me priver de ce moment hors du temps, à cultiver fleurs, fruits et légumes… »
G.M.
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Jardin de l’Envol : 1A, rue de la Démocratie. Le jardin est ouvert tous les mardis, jeudis et vendredis de 9 heures à 12 heures. Accueil sans inscription ni adhésion.
Aux Mains vertes, le vendredi, c’est semis
Au printemps 2022, un jardin potager école s’est implanté sur le site de l’Afpa. Au pied des bâtiments du centre de formation professionnelle, les jardiniers du vendredi sont partis d’une feuille blanche. Ou plutôt d’une double parcelle de 250 m2 totalement vierge, jusqu’alors entièrement enherbée et pentue.
« Au départ, la terre était très minérale, similaire à de la roche, se souvient Jérémy Gay, qui dispense des cours hebdomadaires pour le compte de l’association Les Mains vertes. Aujourd’hui, on a un jardin productif qu’on travaille exclusivement à la main. » Un an après, le maraîcher apprécie la qualité du travail de ses élèves. Ces derniers, des amateurs inscrits pour se ressourcer durant quatre saisons, ne rechignent pas à la tâche. En pleine transition printanière, tous bichonnent cette terre. En cette fin de semaine, ils épandent de l’engrais vert, apportent du compost et empoignent la grelinette pour aérer le sol. L’espace est optimisé. Les légumes à forte valeur ajoutée, comme les carottes fanes et la roquette, y trouvent une place de choix. Les techniques inspirées de la permaculture garantissent des légumes sains et savoureux.
« On est des pionniers, ici, fait remarquer Sarah, en enroulant le tuyau d’arrosage. Heureusement, on apprend beaucoup de choses au contact d’un professionnel. La théorie, alliée à la pratique, permet de tout enregistrer. »
Nabiha, une autre maman de Vénissieux, monte également en compétence chaque vendredi : « Après tous ces confinements c’était hyper dur. Je voulais voir la vie renaître. Venir ici, c’est thérapeutique. » En dehors des cours, les adhérents des Mains vertes ont la possibilité de cultiver un petit lopin d’une vingtaine de mètres carrés pour parfaire leur apprentissage et se faire plaisir.
F.D.
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Renseignements et inscriptions : hello@les-mains-vertes.org / 06 71 34 57 67.
Plateau fertile : « Un projet pensé avec et pour les habitants »
Les espaces verts et cultivés de Vénissieux viendront bientôt s’enrichir de nouveaux espaces, dans le cadre du projet Plateau Fertile, animés par les groupements « Pistyles – Parcs et Sports – Terres fertiles » et « Le Passe-Jardins – Graines de Bio-Divers-Cité« . Ainsi, dans le secteur Monmousseau/Les Balmes, à proximité de l’ancienne barre Monmousseau (démolie en 2021), une pépinière horticole va voir le jour sur plus de 9 000 m². Avenue d’Oschatz, sur 6 000 m², une usine à terre fertile permettra de refertiliser les sols à partir de bio déchets. Avenue Marcel-Cachin, c’est une ferme maraîchère et pédagogique qui s’installera sur un terrain de 6 500 m². Elle produira des légumes, des aromates et des fruits, qui pourront être vendus en direct aux habitants.
Enfin, un lieu dédié au jardinage, à la biodiversité et à l’alimentation sera installé sur un terrain de près de 3 000 m², à l’angle des rues Pierre-Dupont et Georges-Charpak. Il pourra accueillir des initiatives citoyennes ou associatives.
« Notre objectif, c’est de créer des espaces pensés avec et pour les habitants, explique Clara Gaulme, de l’association Le Passe Jardins. Nous aimerions proposer des animations en plus de la vie ‘normale’ d’un espace de jardinage : des ateliers pour apprendre les bases de la discipline, des observations de la nature et des oiseaux, un inventaire de la biodiversité… »
Si les équipes en sont encore à la phase de préparation de ces espaces, ils pourraient s’animer un peu plus dès cet été. Et les premières inaugurations pourraient intervenir à la rentrée.
G.M.
Maison, jardins et balcons fleuris : participez au concours !
Les inscriptions pour le concours 2023 des maisons, jardins et balcons fleuris sont ouvertes : vous avez jusqu’au 30 juin pour rejoindre les dizaines de jardiniers vénissians qui participent tous les ans à l’événement. Rappelons que ce concours s’adresse aux particuliers, ainsi qu’aux organismes gestionnaires de logements collectifs et aux associations représentatives de résidents.
Le concours 2023 propose 6 catégories : « Maison avec jardin visible de la rue », « Balcon, terrasse ou fenêtres visibles de la rue », « Immeuble collectif », « Établissements commerciaux », « Jardin potager fleuri » et « Jardin pédagogique ». Un jury, composé de deux professionnels, d’un élu municipal et d’un citoyen de Vénissieux, visitera les espaces verts des participants, et attribuera des points quant à la qualité du fleurissement, dans le courant du mois de juillet. La remise des prix aura lieu au plus tard en décembre 2023.
Par ailleurs, des portes ouvertes des serres municipales sont organisées le mercredi 10 mai, de 14 heures à 19 heures. « De nombreuses animations vous attendent au programme de cet après-midi, indique-t-on à l’hôtel de ville : plantation de jardinières, taille d’arbustes et de rosiers, décoration florale, conseils pour jardiner en préservant notre environnement… L’occasion aussi de découvrir les fleurs et les plantes cultivées qui orneront cet été, les massifs de la ville. Enfin, les jardiniers municipaux répondront à toutes vos questions ! »
G.M.
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Pour plus d’informations, contacter le service Espaces verts au 04 72 21 44 33.