On commence à y voir un peu plus clair dans le dossier « Marché-Monmousseau-Balmes ». Quatre ans après la signature de la convention signée avec l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), le projet de réaménagement de ce secteur des Minguettes s’affine.
2023 marque le début de la phase de concertation. Les élus métropolitains et municipaux ont matière à présenter plus précisément le futur visage de la Zone d’aménagement concerté (Zac) qui « agrafera » le Plateau et le centre-ville. Les éléments présentés lors de la réunion publique du jeudi 23 mars en attestent : d’ici à 2035, cette bande de 22 hectares, située entre le château d’eau et l’hôtel de ville, sera transfigurée.
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À commencer par l’habitat. L’implosion de la grande barre ICF, en 2021, avait donné le ton. Les grands ensembles ont fait leur temps. La petite barre Monmousseau et les trois tours Alliade ne survivront pas à ce grand chamboulement. Les relogements ont déjà commencé. À terme, 500 HLM seront démolis.
Seulement 8 % de logements sociaux
À la place, on reconstruira, moins haut, plus aéré et plus diversifié. Selon la première version du projet, 1 110 logements sortiront de terre, répartis sur 13 îlots. Dont 705 côté Balmes, entre la rue Gaston-Monmousseau et le parc Louis-Dupic. Comme dans tous les projets impulsés par l’Anru, l’idée de favoriser la mixité sociale est bien présente. « Il n’y aura que 80 logements sociaux, précise Pierre-Alain Millet, adjoint municipal au logement, développement durable et Grand projet de ville. Même si, pour nous, la règle n’est pas bonne, l’État nous interdit d’en construire de nouveaux dans le périmètre. »
La future configuration du secteur soulève de nombreuses questions. Un jeune de Monmousseau, visiblement attaché à sa vie de quartier, interroge : « À qui s’adresse vraiment ce projet » ?
« On n’en est pas à notre première rénovation, rappelle le maire, Michèle Picard. Personne n’est chassé de la ville. Le but, c’est de diversifier les logements. Comme à Vénissy, où on retrouve du social et de l’accession. On n’est plus dans les années 70. À l’époque, les gens qui voulaient acheter aux Minguettes étaient très limités dans leurs choix, en dehors des quelques propriétés en accession le long du boulevard Lénine. »
Des propriétaires inquiets
Le dévoilement de la maquette et des plans fait également tiquer certains propriétaires. « Vous allez passer le bulldozer partout », s’émeut un retraité domicilié dans une des maisons de la petite rue Antoine-Billon. « Je n’ai pas eu connaissance de ce projet quand j’ai déposé mon permis de construire en 2018, interpelle un autre riverain de cette montée. Vous allez faire tomber des maisons avec jardins pour mieux intégrer des logements dans le paysage. N’est-ce pas antinomique ? »
La Métropole est claire à ce sujet : elle ne fera pas du neuf avec du vieux. Et, pour cela, elle devra maîtriser l’ensemble du foncier… En reprenant la main sur les propriétés en bas de l’avenue d’Oschatz et côté rue Billon. « On les achètera au fur et à mesure, assure Béatrice Vessiller (EELV), vice-présidente chargée de l’urbanisme et du cadre de vie. Il y a une vingtaine de maisons à acquérir, si possible, à l’amiable. On ne le souhaite pas mais d’ici dix ans, on pourrait discuter d’une Déclaration d’utilité publique pouvant aller jusqu’à l’expropriation. »
Repères
- La Zac en bref
– Démolition d’environ 500 logements.
– Construction de 1 110 logements diversifiés.
– Requalification de la place du marché des Minguettes (310 forains), avec notamment la création d’une halle (1 000 m2).
– Création du parc arboré de la Balme sur trois plateaux pour relier la place du marché et le parc Louis-Dupic.
– Reconstruction du gymnase Jacques-Brel.
– Construction d’une crèche (500 m2).
– Création de cinq nouvelles rues à sens unique et prolongement ou modification de trois voies à double sens (rues Général Pâris-de-Bollardière, Président Édouard-Herriot et Gaston-Monmousseau).
– 129 nouvelles places de stationnement. 1 000 places privatives sont prévues, plus 250 places publiques, dont 100 servant les matinées de marché.
– Un projet à 62,7 millions d’euros. La Métropole de Lyon finance près des deux tiers du projet (38,6 M€). 20 % du budget d’aménagement sont liés au produit de la vente des terrains cédés par la Métropole aux promoteurs et bailleurs sociaux. L’État, via l’Anru (7,2 M€) et la Ville de Vénissieux (4,3 M€) apportent également leur pierre à l’édifice.
- Quelles échéances ?
L’aménagement de la Zac devrait s’étaler sur 10 à 15 ans. Pour l’heure, les études de conception sont en cours. Le maître d’œuvre n’est pas encore retenu. Selon Laurence Boffet, vice-présidente de la Métropole de Lyon chargée de la participation et des initiatives citoyennes, « les travaux de préparation devraient démarrer entre 2024 et 2026, pour finaliser le parc et réaliser les espaces publics comme la place et les nouvelles voies. » L’élue « Métropole en commun » (étiquetée à gauche) voit les constructions de logements « s’échelonner sans doute à partir de 2027 pour quasiment dix ans. »
Des temps de discussion avec les habitants et des balades urbaines seront programmés au printemps pour découvrir le parc. La concertation réglementaire dans le cadre de l’évaluation environnementale est prévue pour 2024.
Encore une barre et trois tours à démolir
Le 2 avril 2021, le spectaculaire dynamitage de la barre ICF avait donné le coup d’envoi du NPNRU. La phase de relogement des 197 familles aura duré trois ans, de mai 2016 à juillet 2019. 55 % des locataires présents en début d’opération ont pu retrouver un appartement à Vénissieux.
Depuis décembre 2020, l’Immobilière des chemins de fer habitat Sud-Est Méditerranée (ICF) doit trouver un toit aux 77 ménages logés dans la petite barre d’à côté (87 logements). « En mars 2023, il ne reste plus que 22 familles à reloger, précise Roxane Michel, directrice territoriale chez ICF. 67 % des 55 ménages déjà relogés l’ont été à Vénissieux, principalement dans notre patrimoine, qui représente ici 789 logements. » Surplombant la place du marché, les tours Alliade (192 logements) se vident elles aussi. Depuis janvier 2022, le bailleur cherche un point de chute à 180 occupants. 71 d’entre eux ont déjà accepté une solution de relogement. « L’opération a très bien démarré, indiquent les services d’Alliade. Nous estimons qu’elle sera terminée d’ici trois ans. »
Dans quelque temps, de petits îlots résidentiels bien délimités remplaceront les grands ensembles. Ces espaces accueilleront des constructions comprises entre deux et sept étages. En lieu et place des tours trônera le nouveau gymnase, flanqué d’un parking de quarante places.
3 questions à Pierre-Alain Millet, adjoint au maire au logement et au Grand projet de ville
« C’est un chantier énorme qui durera plusieurs années »
Expressions : toutes les maisons situées dans le périmètre de la Zac seront-elles rachetées par la Métropole ?
Pierre-Alain Millet : Cela concerne une vingtaine de propriétaires. Forcément, cela entraîne des perturbations. On va les accompagner dans leur projet. Beaucoup vont choisir de vendre dans de bonnes conditions. Ils ne seront pas perdants. La Métropole achète mais n’impose pas le prix de vente. C’est France Domaines qui évalue les biens en tenant compte de l’évolution des prix du marché. La création de la Zac va faire monter les prix. Dans une opération publique, le prix de vente est avantageux. Certains peuvent se dire qu’il vaut mieux attendre le dernier moment. Mais en cas de Déclaration d’utilité publique, tout devient très réglementé. Pas sûr qu’une décision judiciaire soit en faveur du propriétaire.
Il y aura également environ 500 locataires du parc social à reloger. Comment les choses se passent ?
Généralement, chaque locataire reçoit plus de trois propositions de relogement. Certains en reçoivent dix ! Tous sont prioritaires et peuvent compter sur une équipe pour les guider. Le déménagement est entièrement pris en charge. Le problème, c’est que les logements neufs sont plus petits que les anciens. Quand on passe d’un T4 de 100 m2 à un T4 de 70 m2, on se demande où on va mettre ses meubles. Pour ce type d’opérations, 60 % des locataires souhaitent rester à Vénissieux. À l’arrivée, la moitié finit par rester dans la ville, une fois toutes les propositions étudiées.
Que va devenir le marché des Minguettes pendant les travaux sur la place ?
Rien n’est encore tranché. Ce qui est sûr, c’est qu’il persistera, sur un espace provisoire. Il existe des emplacements à aménager temporairement au-dessus de Monmousseau. Si on démarre par la halle, cela va déjà libérer un bout du marché. C’est un chantier énorme qui durera plusieurs années mais toute la place ne sera pas réaménagée en une fois. Quand on regarde les travaux de La Part-Dieu et qu’on constate que l’activité du centre commercial et de la gare est maintenue, on peut faire confiance à l’ingénierie.
Une vraie place pour le marché des Minguettes
Tous les jeudis et samedis, plus de 300 exposants déplient leurs étals au pied du château d’eau. Si le marché des Minguettes est considéré comme l’un des plus importants de la région Auvergne Rhône-Alpes, la place qui accueille les forains offre-t-elle un cadre agréable aux habitants et visiteurs ?
Ce grand espace goudronné, sur lequel pourraient tenir deux terrains de football, paraît bien vide en dehors des matins de marché. Sa requalification devrait permettre d’y organiser divers événements. « Cette place est délaissée et, parfois, détournée de son usage d’origine, » observe Myriam Gabriel, de l’agence Dumetier Design.
Une halle recouvrant la place, comme celle du marché alimentaire des États-Unis (Lyon 8e) avait été évoquée. Son financement n’a pas été validé par l’Anru. Finalement, seule une couverture de 1 000 m2 sera positionnée à l’angle de l’avenue Jean-Cagne et de la rue Général Pâris-de-Bollardière. Elle abritera une partie des étals. « On garde le nombre de forains et on laisse une possibilité au marché de s’étendre », précise Myriam Gabriel.
2005-2035 : trente ans pour transformer les Minguettes
Le Nouveau programme de renouvellement urbain, validé en 2020, succède à la première phase lancée en 2005.
La Zac Marché-Monmousseau-Balmes est le plus gros morceau du NPRNU (Nouveau programme national de renouvellement urbain) du QPV Minguettes-Clochettes. La seule réhabilitation de la Zac « mangera » un bon quart de l’enveloppe réservée à la métamorphose de ce quartier prioritaire à cheval entre Vénissieux et Saint-Fons.
Pour réaménager cette poche de 23 600 habitants, le montant global du projet de démolition-reconstruction représente 262 millions d’euros. Selon la convention signée avec l’Anru (Agence nationale pour la rénovation urbaine), la participation de l’État s’élève à 72,5 millions d’euros. On parle ici d’un projet à 15 ans.
À noter que certaines réalisations concomitantes, comme la construction de la nouvelle piscine Auguste-Delaune ou la réhabilitation du collège Elsa-Triolet, n’entreront pas dans le cadre du NPNRU.
Dans les grandes lignes, il s’agira de désenclaver les secteurs Pyramide et Léo-Lagrange en aérant l’habitat et en perçant de nouvelles voies. Le secteur des tours de la Darnaise sera également repensé, avec l’ambition de renforcer l’attrait économique de cette entrée de ville. Chaque opération sonnera la fin du tout HLM – ou presque – en diversifiant l’offre de logements. 852 logements sociaux sont promis à la destruction, tandis que 1 934 seront résidencialisés. Objectif: passer d’un taux de 77 % de logements aidés à 64 % en une quinzaine d’années. Enfin, l’Anneau des Parcs consistera à créer un réseau de voies vertes entre Vénissieux et Saint-Fons, sur un périmètre de plus de 200 hectares.
Tout a commencé avec Vénissy, Armstrong et le Cerisier
Avant de lancer le NPNRU, les pouvoirs publics avaient programmé le premier volet : le PNRU (Programme national de rénovation urbaine) pour la période 2005-2015. Cette première phase est en voie d’achèvement. Le long du tracé du tramway T4, le PNRU a remodelé le secteur Démocratie et offert aux Minguettes un centre dynamique, avec les commerces de Vénissy, le mail Armstrong et le pôle culturel du Cerisier. 170 millions d’euros ont été investis. 1 000 logements neufs auront été créés et 2 000 logements aidés et 1 000 logements en copropriété, réhabilités.
« L’objectif du PNRU était de désenclaver les cinq quartiers du Plateau pour mieux circuler, résume le maire, Michèle Picard. Il fallait les relier entre eux, à l’image du mail entre Vénissy et Armstrong qui a été aménagé à la place de la barre. Le NPNRU vise à faciliter les déplacements entre les Minguettes et le centre-ville, mais pas seulement. La Darnaise et la Rotonde, avec la requalification du boulevard Yves-Farge, sont reliés à Saint-Fons. Le parc de la Zac permettra de traverser jusqu’à la future piscine, le parc des Minguettes et l’Anneau des Parcs qui ira jusqu’à Saint-Fons. »
Une pépinière et une usine à terres dès 2024
Avant l’aménagement définitif du parc linéaire à l’horizon 2030 et la construction des habitations, la pente des Balmes sera aménagée de manière temporaire. Sans doute à partir de 2024, pour une durée de trois ans minimum.
De part et d’autre d’un cheminement reliant les rues Gambetta Monmousseau, une pépinière horticole de 9 000 m2 devrait investir les lieux. L’idée est d’y faire pousser de petits arbustes et des plants maraîchers. Côté avenue d’Oschatz, juste en dessous du vieux gymnase, un emplacement de 6 000 m2 est réservé à une usine à terres. Cette fabrique permettra de produire une terre fertile à partir de biodéchets. Le foncier appartient déjà en grande partie à la Métropole : l’espace était occupé par l’ancien lycée Jacques-Brel.
Ces aménagements entrent dans le cadre du programme « Quartiers fertiles » que l’Anru promeut pour encourager l’agriculture urbaine. La Ville de Vénissieux, lauréate de l’appel à projets, développe le sien. Elle l’a nommé « Plateau fertile ».
« Le mot ‘usine à terres’ peut paraître bizarre, a concédé Pierre-Alain Millet. Il s’agit simplement de tas de terre avec un petit bulldozer pour les retourner. Il existe une fabrique de ce type à Confluence. Pourquoi ne pas la visiter ensemble ? »
Fabrice Dufaud
6 avril 2023 à 15 h 00 min
Bonjour,
Modification effectuée. Vous pouvez agrandir les plans en cliquant dessus.
Cordialement.
J.Mollaret
6 avril 2023 à 13 h 40 min
Bonjour,
Photos et plans, très bien mais trop petit pour décrypter les noms des rues et pas moyen de les agrandir.
Cordialement.