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Le droit de préemption provoque des remous

Le mécanisme de préemption des locaux du centre-ville est source de tensions. Mal compris voire contesté par certains commerçants, il est au contraire considéré par les pouvoirs publics comme un outil indispensable pour revitaliser le cœur de ville. Explications.

Photo Emmanuel FOUDROT

C’est un mécanisme à l’œuvre dans de nombreuses villes de France, déjà déployé avec succès à Vénissieux sur le secteur de Vénissy. Mais, dans le centre-ville    les places Sublet, Barbusse et de la Paix, ainsi qu’une partie de la rue Gambetta, de l’avenue Jean-Jaurès, de la rue Paul-Bert et du boulevard Laurent-Gerin – la préemption à l’œuvre est source de tensions avec un certain nombre de commerçants.

Pour mieux comprendre, rappelons d’abord le principe : chaque fois qu’un propriétaire de murs commerciaux d’une zone déterminée veut vendre son bien, la SEM Patrimoniale, la  structure métropolitaine qui a pour mission de favoriser le développement économique de zones considérées comme peu attractives, se positionne et achète le local concerné, même si le propriétaire avait un accord avec un acquéreur. L’objectif de la Métropole et de la Ville, à travers cette démarche systématique, est de reprendre la main sur les locaux pour faire coller au mieux l’offre commerciale aux besoins des habitants, dans un but de redynamisation du secteur concerné.

Trois opérations de cession-achat ont fait parler d’elles ces derniers mois : elles concernent le restaurant Beb’s Asian Food (rue Gambetta), la pâtisserie Dallery-Pittié (place Léon-Sublet) et l’ancienne bijouterie de l’avenue Jean-Jaurès — ces deux derniers locaux étant convoités, respectivement, par Alexandre Dallery et Farid Ben Moussa, conseillers municipaux d’opposition. À chaque fois, comme elle le fait pour tous les autres locaux mis en vente, la SEM Patrimoniale a préempté.

« Cela nous enlève cette visibilité sur l’avenir qui est créée en acquérant les murs de nos locaux, a dénoncé, dans un communiqué de presse, Alexandre Dallery. Incompréhensible dans une ville qui se meurt, où les taux de chômage et de pauvreté sont les plus élevés de la Métropole. (…) Le risque à présent pour la pâtisserie de la place Léon-Sublet est de mettre la clé sous la porte et de licencier 10 salariés. »

Pour se faire entendre, Farid Ben Moussa et Bernard Au Appavou (Beb’s Asian Food) ont, pour leur part, déposé en 2022 une requête au tribunal administratif de Lyon. Ils ont obtenu du juge une suspension de l’arrêté de préemption, en attendant que l’affaire soit étudiée sur le fond.

Un mécanisme automatique et obligatoire

Alors, pouvait-il en être autrement ? La Métropole aurait-elle pu choisir de ne pas préempter ces locaux, en raison des activités que les acquéreurs souhaitaient y développer ou y maintenir ? Accusation plus grave que l’on a pu lire dans certains titres de presse ou sur les réseaux sociaux, la mairie se sert-elle de ce mécanisme pour gêner des élus d’opposition ? « La préemption par la Métropole est obligatoire et automatique, explique Yolande Peytavin, première adjointe au maire de Vénissieux. Imaginons l’inverse : que dirait-on si l’on ne préemptait pas un local parce que l’on connaît l’acheteur, parce que c’est un élu, de la majorité ou de l’opposition, alors que celui d’à côté a fait l’objet d’un arrêté de préemption ? Le mécanisme se déclenche donc pour toutes les ventes du périmètre. Peu importe le projet, peu importe l’acheteur. »

« La préemption, c’est un outil pour l’avenir du centre de Vénissieux, ajoute Nicolas Porret, adjoint au maire en charge des commerces. Elle va permettre de maîtriser l’offre et d’attirer de nouveaux commerces, alors qu’on le voit, compter uniquement sur l’investissement privé ne fonctionne pas. L’acquisition d’un local par la SEM Patrimoniale ne signifie absolument pas que le locataire va être mis dehors, bien au contraire : dans le cas d’Alexandre Dallery, par exemple, il peut bien sûr rester dans les murs, en tant que locataire. C’est ce qu’il s’est passé récemment pour l’enseigne Casino, sans aucun souci. »

Quant au deux dossiers « bloqués » par le tribunal administratif, Yolande Peytavin en est convaincue : « Quand ils seront étudiés sur le fond, le bien-fondé du mécanisme de préemption sera reconnu ». Et l’élue de rappeler : « Ce mécanisme fait partie d’un tout. Le centre de Vénissieux est appelé à changer dans les prochaines années, avec le passage du T10 et la requalification des places Sublet et Barbusse — pour cette opération, les études sont en cours, en lien avec la Métropole. À la fin, ce sont les Vénissians qui seront gagnants, avec une offre renouvelée et cohérente en termes de commerces. »

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