Des “missions supplémentaires” pour les enseignants, en échange d’une augmentation de salaire de près de 20 % ? C’est l’une des annonces du président de la République en septembre dernier, dans une lettre adressée au personnel de l’Éducation nationale. Une mesure confirmée par le ministre de l’Éducation, Pap Ndiaye, en ce début d’année sur BFM TV : « Les augmentations promises aux enseignants et aux personnels de l’Éducation nationale à la rentrée 2023 auront lieu. Elles prendront deux formes : une revalorisation générale pour tous et des rémunérations liées à de nouvelles missions.”
Ces “missions supplémentaires” font grincer des dents les professeurs, notamment quand ils en apprennent le contenu. Même si les discussions restent en cours entre les syndicats et le ministère, quelques pistes sont d’ores et déjà évoquées : formation des enseignants pendant les vacances scolaires, participation à des projets dans les établissements, accompagnement des élèves avec du tutorat ou des stages pendant les vacances… Des missions qui sont, pour la plupart, déjà réalisées par les professeurs… sans aucune compensation financière !
“Cette annonce est hypocrite car ces missions existent déjà, affirme Gabrielle Leflaive, enseignante d’histoire-géographie au collège Aragon et déléguée syndicale Sud-Éducation. Sauf que cela se fait peu car nous avons déjà des emplois du temps surchargés et très peu de créneaux possibles pour les réaliser. »
Des emplois du temps surchargés
“Beaucoup imaginent qu’il n’y a que nos heures de cours et qu’après, notre journée est terminée, témoigne une autre professeure du collège Aragon. Sauf que c’est faux, il y a aussi tout un travail invisible. J’ai 20 heures de cours par semaine, mais je dois les préparer, corriger les copies, préparer les conseils de classe, rédiger les bulletins… Notre charge de travail peut varier en fonction des semaines, mais est quand même très lourde.”
En effet, d’après une note d’information, publiée en octobre dernier par l’Éducation nationale, la moitié des enseignants affirment travailler au moins 43 heures par semaine. Et pour les professeurs du second degré, la majorité du temps de travail est consacrée à la préparation des cours et la correction des copies. Sans oublier que pour les professeurs principaux, le nombre d’heures peut être bien supérieur à 43 heures, avec les autres tâches qui leur reviennent, pour une centaine d’euros supplémentaires sur le salaire.
Des missions de qualité ?
Alors, pour les enseignants, la question reste de savoir s’ils auront le temps d’accomplir de nouvelles missions, afin d’obtenir un salaire supérieur. « Pour moi, c’est hors de question, assure Diane Gilbert-Jeantet, professeure de SVT au collège Balzac et professeure principale. À la fin de mes cours, je suis exténuée, on n’imagine pas le dynamisme nécessaire pour parler devant une classe, garder l’attention des élèves. Pendant les vacances scolaires, au moins une semaine est occupée par la préparation des cours ou la correction des copies. Nous avons déjà beaucoup de travail. Des professeurs vont faire ces missions en espérant gagner plus, mais est-ce que ça sera qualitatif ? »
La question de la qualité des missions assurées est d’autant plus importante qu’en septembre, il manquait de nombreux professeurs, les candidats ne se bousculant pas à cause d’un manque d’attractivité (conditions de travail, niveau de rémunération, reconnaissance…) de la profession. L’Éducation nationale a donc engagé des contractuels pour assurer le maintien des classes. Ceux-ci seront-ils en mesure de remplir ces nouvelles missions ?
« Avant, le métier de professeur était reconnu, illustre même, résume une professeure du collège Aragon à Vénissieux. Quand on voit la façon dont on nous considère, c’est décourageant, ça nous mine. Ça ne nous donne pas envie de continuer. »
Venir au chevet de « l’homme malade du système scolaire”, “là où se creusent les écarts de niveau entre élèves« . C’est l’objectif du gouvernement, et c’est avec ces mots que le ministre de l’Éducation nationale, Pap Ndiaye, a décrit le niveau des collèges en France.
Suite aux récentes évaluations nationales des élèves de 6e, le constat est en effet alarmant : 27% des élèves n’ont pas le niveau requis en français et près d’un tiers en mathématiques. Alors pour améliorer ces résultats, le ministre a annoncé une réforme des collèges dès la rentrée prochaine. Il prévoit la mise en place d’une heure « d’approfondissement en français et en mathématiques » pour les élèves de 6e qui viendra remplacer l’heure de technologie. Ils seront repartis par niveaux et, à la grande surprise du corps enseignant, le cours sera donné par les professeurs des écoles.
“Quand aurons-nous le temps d’aller au collège ? C’est complètement irréalisable et je trouve que cela donne une image négative des professeurs au collège, c’est comme si on disait qu’ils ne sont pas capables de le faire”, dénonce Camille Bastien, enseignante en primaire et déléguée syndicale SNUIPP.
Pap Ndiaye souhaite aussi amplifier la pratique de la dictée, de la rédaction, du calcul mental et la généralisation du dispositif “devoir faits”, qui permet aux collégiens de rester deux heures de plus au collège afin de faire leurs devoirs dans l’établissement.
Aubry
29 janvier 2023 à 16 h 19 min
Merci pour cet article malheureusement bien en dessous de la réalité.
En plus de la charge de plus en plus considérable des enseignants, il y a les conditions de travail déplorables, et la confrontation quotidienne à des personnels et des élèves en souffrance.
Aucun soutien, aucune médecine du travail, aucun interlocuteur.
En outre, l’employeur Education Nationale ne fournit pas les outils nécessaires à ses personnels. Pour exemple, les enseignants sont contraints de payer leurs propres ordinateurs, leurs imprimantes avec l’encre qui va avec, etc. Cela crée une disparité qui rejaillit forcément sur les élèves.
Avant d’attribuer de nouvelles missions aux enseignants, le ministère ferait mieux de s’assurer qu’il garantit des conditions adéquates pour réaliser les missions premières des enseignants, dans un climat favorable aux apprentissages de TOUS LES ELEVES SUR TOUS LES TERRITOIRES.
France
29 janvier 2023 à 9 h 45 min
Pourquoi quand vous appelez des enseignants, ne considérez. Ous que les prof de collèges et lycées?
Pensez vous que dans le 1er degré les préparations, les corrections, les bulletins, l’accompagnement des élèves..n’existent pas?
Nous sommes 25h en classe et enseigner toutes les matières, sans compter les rdv avec les parents, les surveillances de récréations car il n’y a pas de vie scolaire, des conseils d’école, des onseils de maîtres et de cycles, et des formations le soir de 17h15 à 19h30 tandis que dans le 2nd degré cela se fait sur le temps de cours. Nous sommes professeurs principaux également sans toucher de prime, de même pour les cOnseils d’école… Au final, il peut y avoir 300 € d’écart entre ces mêmes professions, les mêmes missions, avec un même diplôme !
Il serait donc bien que enseignements ne rime pas avec collège et lycée !
Delbaere
28 janvier 2023 à 15 h 20 min
Pourquoi ne pas faire profiter d’heures supplémentaires en collège en proposant aux AED ou AESH qui le souhaitent de prendre en charge des petits groupes d’élèves afin de revoir certaines notions de mathématiques ou de français ? Bon nombre sont diplômés, pédagogues et largement capables !
Ragna
28 janvier 2023 à 9 h 17 min
Malheureusement c est l élémentaire le problème de fond: trop de « projets », de photocopies, de matieres (certains PE sont nuls en anglais, en sciences et ils font plus de mal que de bien….), de textes à trous et de numérique à la place des méthodes qui ont fait leurs preuves…. c est tout cela qui entraine les élèves vers le fond. A l arrivée en 6eme, il y a un tel ecart de niveau entre les élèves, c est presque trop tard…tout le monde n a pas la chance d être suivi et de travailler « à l ancienne » à la maison.
Rumeau
28 janvier 2023 à 9 h 01 min
Je veux bien moi leur donner des cours de rattrapage en maths car pour rentrer en 6ieme il faut savoir lire écrire compter. Il faut un lien entre le cm2 et la 6ieme.un ancien prof des écoles qui vous parle
De Lajudie
28 janvier 2023 à 8 h 30 min
Bonjour, je lis le mensonge. Les professeurs travailleraient 43 heures par semaine. Donc, il n’existe pas de professeurs qui servent sempiternellement le même cours, ce que justifie parfois la nature immuable des notions à inculquer. 43 heures! Admettons, mais pas sur 52 semaines effectives, ni même 47 semaines ( congés payés) , mais plutôt 33 semaines!
Responsabilité des enseignants : transformer leurs cours en forum de discussion pour répandre la douce moraline. Leurs seules fonctions : inculquer du savoir, du savoir-faire, mais PAS DE SAVOIR-ÊTRE.
Responsabilité des parents : aucune sacralisation de l’école. Retraité, combien de fois je vois des jeunes en âge scolaire accompagner leurs parents dans leurs rallyes consuméristes!
Bref une alliance objective entre enseignants et parents pour faire de l’école un lieu d’animation facultatif, et non le sanctuaire de la connaissance et de la véritable émancipation . Bernard
Amami
28 janvier 2023 à 6 h 53 min
Bonjour, arrêtons les préjugés envers les contractuels, j’en suis une et pourtant j’ai 26 ans d’expérience et j’ai enseigné en Tunisie en tant que fonctionnaire, enseignante titulaire. Il ne faut pas tous les contractuels dans le même sac, il y ‘en a qui sont plus compétents que les titulaires…
Jiji
27 janvier 2023 à 18 h 52 min
Une question me vient à l’esprit : quand on parle d’augmentation… C’est bien faire le même travail mais être payé plus ? Alors pourquoi demande-t-on aux enseignants de travailler plus pour gagner plus ? Ce n’est plus une augmentation non ?
Horvais Rosemberck
27 janvier 2023 à 18 h 10 min
Il est inadmissible qu’on en demande encore plus à des professeurs surchargés voire exténués qui sont obligés de travailler lourdement pendant les vacances pour s’en sortir! Que veulent donc nos dirigeants :tuer les professeurs ou l’école ? N’est on pas en bonne voie ?