Après un pique-nique caniculaire le 14 juillet, les deux dernières soirées des Fêtes escales furent un peu plus ventilées, avec un petit air salutaire qui permettait à l’assistance de mieux se masser devant la grande scène du parc Dupic. Car si la mise en jambes, en fin d’après-midi en compagnie de la sympathique et souriante Kaynixe ou d’El Exquisito, se déroulait chaque fois devant un tout petit public, les spectateurs arrivaient ensuite en nombre.
« Vénissieux, vous êtes chauds ! Faites un maximum de bruit ! » entendit-on régulièrement. Et Vénissieux en fit, pour rendre hommage à Ti’kaniki, Camélia Jordana, Ghetto Kumbe, Radio Kaizman, Chilla, Scylla et Slimka. Tous y mirent du leur pour parvenir à une ambiance de folie, avec des gens qui dansaient, tapaient des mains en mesure et connaissaient la plupart des chansons par cœur.
« C’est une ville de hip-hop, Vénissieux, on le savait déjà ! » Dans la fosse, les musiciens de Radio Kaizman font danser le public, qui se baisse et se relève à la demande — il le fera aussi avec Chilla. Sur les visages, les sourires montrent que le but est atteint sur l’ensemble des concerts.
Bien sûr, dans cette ambiance festive, Scylla vint apporter une note un peu plus grave. Le rappeur belge sait passer des rythmes effrénés aux mélodies douces et tempère, grâce à ses paroles, le sens de la fête. « Je peux pas être en bonne santé dans cette société malade » affirme-t-il dans Écoutez-moi et ce titre tombait bien, on l’écoutait.
Un bilan positif
C’est ce qu’a constaté Grégoire Potin, programmateur et coordinateur des Fêtes escales, qui, après les prestations virtuelles des années Covid, proposait sa première programmation live.
« Les familles ont répondu présentes et le festival a prouvé qu’il était intergénérationnel. Le 14 juillet, la Maîtrise de l’Opéra a drainé son public habituel. Avec l’Opéra, tout est cadré, organisé et l’on sent que les enfants ont bien bossé et ne tombent jamais dans l’amateurisme. Le pique-nique a été plus clairsemé que certaines autres années. Les gens restaient à l’ombre car il faisait 36-37°. Pour cela, Bach à sable a bien fonctionné. »
Installés sur des chaises longues, les spectateurs se laissaient en effet aller à une petite sieste réparatrice en écoutant des airs de piano. « Quand le sable a coulé sous le piano, explique Grégoire, les enfants ont été invités à venir jouer avec. Puis, il y a eu la dictée, qui était drôle, partant dans tous les sens. Thierry Renard en fait un vrai spectacle et il a un public fidèle. »
La « fanfare psychoactive électro stimulante » LGMX — c’est ainsi qu’elle se définit — a ensuite secoué tous ceux qui avaient profité de l’après-midi allongés, avec Bach à sable, Pat Kalla ou la dictée.
« Elle a permis de redynamiser. Je voulais qu’elle casse un moment calme, poétique. Et, après cet échauffement, rien de tel que l’apéro offert par la mairie, que beaucoup attendaient. »
Il fallait ensuite se transporter vers la grande scène. « Quand on ouvre à 18 heures, la première heure est toujours dure. Kaynixe a donné la teinte de la soirée, une ambiance musicale un peu forte pour dynamiser le site. Ensuite, avec le battle mis en scène par le Pockemon Crew, c’est vraiment les enfants du pays qui organisaient. Cela fait des années que ce genre de compétition n’existe plus à Vénissieux. Nous avons eu des danseurs de très bon niveau et tout a très bien fonctionné. Les Pockemon eux-mêmes étaient très contents. »
Sur l’ensemble de la journée du 14 juillet, Grégoire avance une fréquentation de 2 000 personnes, dont plus de 1 000 rien que pour le battle, 300 pour la Maîtrise et 200 pour le pique-nique. Auxquels s’ajoutent tous ceux ayant fait un passage plus ou moins attentif.
« Le 15 juillet, reprend Grégoire, Camélia Jordana a rempli son rôle de locomotive. Elle a su se renouveler et a joué le jeu de la proximité. Camélia a un agenda très chargé entre le cinéma, les concerts et le livre qu’elle est en train d’écrire à la Villa Medicis, à Rome. Ce fut une bonne rampe de lancement pour Ghetto Kumbe, devant lesquels près de 800 personnes sont restées. »
Cette soirée a montré l’intérêt de dresser des ponts entre « Bizarre ! » et le festival. « Ti’kaniki a été accueilli en résidence à « Bizarre ! ». C’était important de faire passer ce projet maloya sur la grande scène, cela permet de ramifier un peu tout. Cette soirée-là a attiré près de 3 000 personnes. »
Enfin, le 16 juillet réunissait des rappeurs de différents univers. « Scylla a fait deux Transbordeur pleins, il va se produire à l’Olympia, ce sont de gros signaux pour lui. Quant à Chilla, je suis très attentif à son parcours. Elle a un public plus jeune. Elle a vécu dans plusieurs villes, dont Lyon, et fait une tournée intense. Enfin, Slimka attire un public encore plus jeune. »
Et, tout aussi important que la satisfaction du public, Grégoire insiste sur celle des artistes, tous ravis de s’être produits dans le parc Louis-Dupic.