Sa décision, le 17 mai dernier, de rendre sa carte du PCF pour protester contre la signature d’un accord d’union de la gauche impulsé par la France insoumise, n’était pas un accès de colère. À 76 ans, André Gerin est déterminé à engager « une bataille politique hors normes », qui s’appuiera sur une tournée de conférences et la publication prochaine d’un livre.
Son ambition ? Déclencher « un aggiornamento du PCF et de la gauche pour réconcilier la France ». Pour l’instant – l’ancien député-maire de Vénissieux le concède – il est esseulé dans cette entreprise, même s’il précise être en contact avec des personnalités qui partagent ses convictions. Le 30 juin, dans les locaux du Club de la presse de Lyon, il n’était entouré que de quelques fidèles camarades pour lancer ce qu’il espère être un « Big Bang ».
« Le danger, c’est de s’aligner sur le gauchisme et le nihilisme de Jean-Luc Mélenchon, affirme-t-il. C’est l’existence même du PCF et du PS historique et même de la droite républicaine dont il est question. » Avançant « l’hypothèse qui doit être prise très au sérieux d’une Marine Le Pen présidente en 2027 », il estime « absolument nécessaire d’entendre ces 13 millions d’électeurs du Rassemblement national et les 26 millions d’abstentionnistes. La crise politique est majeure. Une fracture culturelle se creuse entre l’élite et la France profonde. (…) Se questionner sur les électeurs du RN devrait être une évidence ».
Et cette crise, il en tient d’abord pour responsable la gauche, qui « s’est brouillée avec les notions de lucidité, réalisme et pragmatisme (…), n’a cessé de se défausser sur tous les grands sujets : insécurité, immigration de masse, islam et islamisme, identité de la France ».
Pour « l’intelligence des compromis »
Si l’évocation de ces thèmes identitaires ne surprend pas chez celui qui fut à l’origine, en 2009, de la loi interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public, André Gerin étonne davantage quand il aborde les questions économiques. Il plaide ainsi pour « une approche objective des apports du capitalisme dans l’évolution industrielle des deux derniers siècles », et préconise « l’intelligence des compromis ». Y compris avec le patronat, mais dans le cadre d’« un capitalisme de la production, des métiers et des savoir-faire, contre les ogres de la finance, ceux qui spéculent et font de l’argent en dormant ».
Dans son analyse et ses propositions, l’industrie tient une place centrale : « La désindustrialisation de la France a constitué une catastrophe nationale. C’est un véritable plan Marshall qu’il faut aujourd’hui engager. L’explication principale de la crise politique vient de là : une méconnaissance profonde de l’ensemble de la classe politique de la réalité du monde du travail. (…) J’hallucine lorsque j’entends le mot ‘écocide’ pour justifier la décroissance. »
L’ancien élu communiste invite en particulier à envisager le rapport capital/travail sous un autre angle idéologique. « Il faut en finir avec les dogmes de la compétitivité et de la réduction du coût du travail, assène-t-il. Je pense que la clé est, au contraire, dans une augmentation des salaires. Nous savons avec Marx que le travail est un investissement, le moteur de l’économie et de la création de richesses. Donc c’est une question qui est au cœur de la crise que nous vivons. »
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