Émir Chelabi, alias L’Allemand, continue son ascension dans le rap Français. Avec des featurings incontournables et des projets plein la tête, celui qui se décrit comme un « pur Vénissian », reste modeste face à son succès.
108 millions de vues totalisées sur Youtube, dont 10 millions pour son clip, C’est ça les rats. L’Allemand – Émir Chelabi de son vrai nom – est un artiste majeur à Vénissieux, et même en France. En très peu de temps, le jeune homme de 26 ans s’est imposé dans le rap français. « J’ai pourtant mis du temps à me dire que le rap c’était mon travail, souligne-t-il. Pour moi, c’est d’abord une passion, quelque chose que j’aime faire. »
Tout a commencé fin 2016 avec son premier morceau Elle t’a quitté. « Je le répétais tous les jours, je trouvais qu’il sortait bien. Mais j’avais la crainte que ça ne plaise pas, je ne connaissais rien, j’avais aucune expérience. » Après l’avoir fait écouter à ses amis, il surmonte ses peurs et le publie sur Youtube, sans clip, avec seulement un audio. « En cinq jours, j’ai fait 10 000 vues, ça m’a fait énormément plaisir« , se souvient Émir. Il sort ensuite d’autres titres, et atteint vite les millions de vues. « Là j’ai pensé ‘allez, pourquoi pas. Si j’arrive à faire un million de vues, c’est qu’il y a un truc à faire’. »
Depuis, tout s’enchaîne. Les showcases en France, en Allemagne, les concerts, les titres, les featurings avec des rappeurs français comme Mister You, Hornett la Frappe ou encore Jul, une véritable consécration pour le jeune homme. « Dès que j’ai commencé le rap, je me suis dit, ‘si un jour, j’arrive à faire un feat avec Jul, ça y est, j’arrête’. Et j’ai réussi … j’ai pris un plaisir comme on ne peut pas imaginer. J’étais vraiment heureux. »
« Vénissieux, c’est toute ma vie »
L’Allemand ne se voyait pas devenir rappeur. « À la base, je voulais être footballeur, j’étais joueur à l’AS Minguettes, en senior, puis je me suis fait les ligaments croisés. » Pourtant, depuis qu’il est tout jeune, Émir écrit. Il s’inspire de Vénissieux, de sa vie, de ses amis et de sa famille. Ce « pur Vénissian« , comme il se décrit, a grandi aux Minguettes, à la Pyramide.
« Vénissieux, c’est toute ma vie. C’est là où je me sens le mieux, où j’ai mes meilleurs souvenirs, je suis trop bien ici. Mon quartier, mes amis, ça a été ma force. C’est leur motivation qui m’a poussé. J’avais la crainte d’être critiqué et ils m’ont donné confiance en moi. C’est grâce à eux que j’en suis là aujourd’hui. »
Celui que l’on surnomme L’Allemand à cause de ses yeux bleus et ses cheveux blonds vient d’une famille algérienne. Et au début, il a eu peur de la réaction de ses proches face à sa musique. « Dans ma famille, la religion est importante et la musique, ça ne va pas trop avec la vie qu’on mène. Je voyais mon père me virer de chez moi. En fait, ils me soutiennent, ils voient que je gagne un salaire tous les mois, que c’est sérieux. »
Même s’il ne vit plus au quartier Pyramide, il y revient régulièrement pour passer du temps. Et quand il y est, il ne passe plus inaperçu. « Maintenant, on me reconnaît, on vient me parler, je ne peux plus faire n’importe quoi« , s’amuse le jeune homme.
« Il faut croire en soi »
Son parcours n’a pas non plus été sans embûche. En 2017, il effectue un court passage en prison. « La case prison, ça m’a marqué. J’ai pu voir ce que c’est, et comme on dit à Lyon, ‘ça pue sa mère’. J’ai fait plein d’erreurs, mais je ne les ai jamais faites deux fois. J’ai appris à chaque fois, j’ai compris qu’on peut faire mieux, tranquillement. »
Puis en 2018, il décide de tourner un clip aux Minguettes où il réunit de nombreux jeunes. L’évènement génère des incidents et l’intervention des forces de l’ordre. « Je n’étais plus sur place quand ça a débordé, je n’étais pas au courant, se dédouane-t-il. On reproche tout à l’artiste parce que nous avons fait venir les jeunes, mais quand ils sont beaucoup comme ça, ils se croient invincibles, c’est compliqué. J’incite personne à la violence ou à caillasser la police. »
Depuis, le jeune homme a mûri et face à son succès, Émir sait rester humble. Avec une timidité non dissimulée, il prend toujours autant de plaisir à « entendre un de (s)es sons dans une voiture qui passe dans la rue. Ou de voir des jeunes s’ambiancer sur (s)a musique, les voir sourire, danser… »
Ce qui l’impressionne toujours autant, c’est la réaction de ses fans. « J’ai vu des jeunes pleurer en me voyant, ça fait bizarre. Ils ne comprennent pas que c’est que de la musique… Ça me fait plaisir et en même temps ça m’attriste. Faut pas pleurer !«
Dans ses morceaux, drogue, arme et violence sont souvent évoquées mais aussi l’amour, et la peur de l’avenir. « Parler drogue, c’est aussi parler de ce qu’on vit quotidiennement, justifie L’Allemand. Je sais que ce n’est pas banal, mais ça fait partie de notre vie. Puis dans mes textes, parfois, je joue des rôles, la musique ça reste de la fiction, on peut raconter notre vie, mais aussi rentrer dans un délire. Les jeunes, ils savent que je ne suis pas un bandit, un méchant. »
Pour réussir, insiste-t-il, « il faut croire en soi, rien n’est impossible, il faut travailler dur, le chemin est long. Il y a beaucoup d’artistes, de talents dans toute la France donc il faut bosser pour y arriver. »
Des projets plein la tête
Alors qu’il est encore à l’aube de sa carrière, le jeune homme envisage de développer d’autres projets dont un album. Entre ses autres collaborations en préparation, le tournage de prochains clips, L’Allemand ne prévoit pas de stopper son ascension.
Il envisage même de monter un projet collectif avec des rappeurs lyonnais afin de faire rayonner les artistes locaux. « J’ai eu cette idée en 2017, mais ça ne s’est jamais fait. Il y a pas mal de bons artistes sur Lyon. La porte n’est toujours pas fermée, ça serait bien ! »
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