À Vénissieux, les acteurs du monde associatif redoublent d’effort pendant cette crise sanitaire, afin de venir en aide aux plus précaires. Expressions est allé à leur rencontre.
+116 %. C’est, en juin et en novembre 2020, la hausse constatée à Vénissieux des demandes de secours alimentaires par rapport aux mêmes mois de l’année précédente. C’est dire à quel point la solidarité s’avère incontournable dans la troisième plus grande ville de la Métropole de Lyon, dans laquelle 31 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté. Et où 14,4 % des ménages sont bénéficiaires du RSA (revenu de solidarité active), contre 5,8 % au niveau national.
Les associations et les acteurs de la solidarité ont mis, en cette fin d’année 2020, les bouchées doubles pour venir en aide aux plus démunis. Des « grands noms » du secteur (Restos du cœur, Secours populaire, Secours catholique…) aux groupes d’habitants qui se retrouvent autour de l’envie d’aider leurs voisins (Ymne, ASP…).
La Ville s’est aussi impliquée, afin de permettre aux associations de « passer le cap » du Covid-19. Le conseil municipal a ainsi voté, début décembre, une première série d’attributions de subventions exceptionnelles. D’un montant de 95 600 euros, ces aides entrent dans le cadre du fonds d’urgence de 300 000 euros décidé par l’équipe municipale le 15 juillet dernier.
Parmi les aides validées, après propositions formulées par une commission d’attribution, le Secours populaire percevra 14 000 euros ; le Centre associatif Boris-Vian, 12 000 euros ; les Restos du cœur, 8 000 euros ; le Secours catholique, 2 000 euros ; le Réseau d’alerte et de solidarité, 2 000 euros ; Oyenga Simy Flo, 5 000 euros. « Cette enveloppe [globale] de 300 000 euros doit permettre une remise à niveau si l’association a pâti de difficultés financières conséquentes de la crise sanitaire », expliquait alors Idir Boumertit, adjoint au maire en charge du grand projet de ville et du patrimoine.
Car les conséquences économiques de la crise sanitaire pour les associations, sont réelles. Près d’un tiers des associations disait, cet été, manquer de visibilité à court et moyen terme sur le plan financier.
« Dès l’annonce du confinement, les services de la ville se sont réorganisés pour répondre aux sollicitations des habitants, rappelle, pour sa part, Saliha Prudhomme-Latour, adjointe au maire en charge notamment de la lutte contre la grande pauvreté. Le CCAS a ainsi continué de fonctionner et d’assurer l’instruction des demandes d’aides sociales. Beaucoup d’actions de solidarité ont été menées, souvent en lien avec les associations. Agents municipaux et élus ont par ailleurs assuré la livraison des colis de fin d’année aux personnes âgées de la ville. La cellule de veille a également été réactivée, avec un contact hebdomadaire pour les seniors isolés. Bref, élus, agents municipaux et militants associatifs n’ont pas ménagé leurs efforts pour que ce second confinement soit le moins difficilement vécu par les habitants. »
« Le monde de demain, que nous promettait Emmanuel Macron, n’a fait qu’accentuer les inégalités déjà existantes, relevait début décembre le maire de Vénissieux, Michèle Picard. Ce monde, c’est à nous de le créer par nos luttes, en mettant au cœur de toutes nos actions, l’humain et l’intérêt général. » Les acteurs locaux de la solidarité montrent la voie à suivre.
Association Aider son prochain : ASP met les bouchées doubles
Dans le garage de la vice-présidente de l’association ASP (Aider son prochain), un petit groupe de cuisinières bénévoles est à pied d’œuvre depuis 7 heures du matin, ce 19 décembre. Elles concoctent un couscous qui sera distribué le soir même à des SDF, derrière la gare de la Part-Dieu. « Tout est cuisiné dans la journée, puis réparti dans des barquettes et transporté dans des glacières », précise Hanane, la responsable du pôle social d’ASP. Ce soir-là seront également distribuées plus de 150 couvertures neuves, des bonnets, des gants et des écharpes en très bon état pour aider les très nombreux bénéficiaires (plus d’une centaine) à lutter contre le froid.
ASP mène cette action depuis 2014, une fois par mois. Mais depuis peu les bénévoles innovent en offrant aux plus démunis et aux SDF un petit-déjeuner complet de type brunch avec des viennoiseries et des boissons chaudes. La demande est croissante depuis le Covid et la précarité grandissante, avec un nouveau public, celui des étudiants. « Nous le voyons très clairement sur le terrain », soulignent les bénévoles d’ASP.
Mosquée de Parilly : « Tendre la main à son voisin »
Au sein de la communauté turque de Vénissieux, qui fréquente la mosquée Eyup Sultan de Parilly, l’entraide n’est pas un vain mot. Depuis plusieurs semaines, ses membres mènent des actions solidaires.
« Nous avons organisé des maraudes dans le centre de Lyon, afin de venir en aide aux personnes sans abri, explique Murat Yazar, le responsable jeunesse. Nous avons notamment pris le temps d’échanger pour maintenir le lien social. La crise sanitaire a eu d’énormes conséquences, beaucoup de personnes sont tombées dans la précarité. »
Pendant les vacances de fin d’année, une distribution de paniers solidaires sera organisée à la mosquée. Ils seront composés d’une dizaine de produits (pâtes, riz, huile…). « Il s’agit d’une aide ouverte à toutes les familles, sans justificatif. Nous souhaiterions pouvoir faire plus, donc nous espérons que les lecteurs du journal n’hésiteront pas à faire circuler l’information et, s’ils peuvent trouver une utilité à nos paniers, à venir nous voir pour en récupérer un. En ces temps troublés, c’est important de tendre la main à son voisin. »
Pour plus de renseignements sur les paniers solidaires : 06 59 04 89 22.
Parilly en Action : des boîtes à chaussure garnies pour les plus démunis
Les femmes du groupe Parilly en Action, en partenariat avec l’association vénissiane La Terre des lions, a collecté plus de 250 boîtes à chaussures garnies par des gens du quartier. Cette initiative locale s’inscrit dans le cadre d’un projet national à destination des sans-abri. Le principe est simple : remplir des boîtes à chaussures de bonbons, chocolats, produits d’hygiène, gants, écharpes, petits jouets… puis les emballer dans un papier cadeau. Elles seront distribuées le 26 décembre au matin à Lyon, par les bénévoles de La terre des lions, dans les quartiers Hôtel de Ville, Perrache et Part-Dieu.
Resto du cœur : pas de jour férié pour les bénévoles
Veille de fête ou pas, l’ensemble des bénévoles des Restos seront à pied d’œuvre les 24 et le 31 décembre. « Nous ne changeons rien à nos habitudes, les distributions auront lieu aux horaires habituels. En cette période difficile, il faut penser aux personnes les plus en difficultés. Pas question de baisser la garde. Il n’y a pas de jour férié quand il s’agit d’aider les plus démunis. Si nous voulons qu’ils puissent se nourrir correctement, nous nous devons de les accueillir. »
Comité local du Secours populaire : des colis par centaines
Au 1er étage du local du Secours Populaire, l’ambiance est animée ce 10 décembre. Des bénévoles terminent d’emballer les jouets prêts à être distribués quelques jours plus tard aux 150 enfants des familles suivies par l’association : tous recevront un cadeau neuf, un livre, ainsi qu’un goûter. D’autres s’affairent à confectionner les colis de Noël offerts aux mêmes familles, qui contiennent des produits de premières nécessité, mais aussi des papillotes, une bûche, des clémentines… « Les fêtes de fin d’année sont préparées très en amont, précise Josy Ingargiola, la responsable. C’est un travail considérable. » Et l’action ne s’arrête pas là, puisque les ventes solidaires de vêtements, jouets et vaisselle restent ouvertes en parallèle. Face à la crise inédite que nous traversons, le comité vénissian du Secours populaire est mobilisé comme jamais. « C’est très difficile en ce moment, témoigne une bénéficiaire. Mon mari qui avait un petit contrat dans un bar ne bosse plus. Sans le SPF, je ne sais pas comment on pourrait s’en sortir. »
Association Ymmne : à la Darnaise, une aide ponctuelle pour une centaine de familles
À la maison de quartier Darnaise, depuis le 26 novembre, les bénévoles de l’association Ymmne, emmenés par l’infatigable et incontournable Maeva Ah-Sha, distribuent chaque jeudi après-midi des produits de première nécessité aux familles dans le besoin. Parmi les bénéficiaires, ce jour-là, nous rencontrons Basma, maman de trois enfants, adressée par les services sociaux de la commune. « J’ai l’habitude de venir régulièrement à la maison de quartier, explique-t-elle. Maeva m’a fait part de cette distribution. Avec le Covid, tout est devenu compliqué, mon mari faisait des remplacements qui n’ont plus lieu actuellement. C’est une situation excessivement difficile. » Dans le colis qu’elle récupère, du lait, du sucre, de la farine, des pâtes, des gâteaux secs… sans oublier quelques papillotes de saison. Au total, une centaine de familles, habitant pour la plupart aux Minguettes, auront ainsi bénéficié de cette aide ponctuelle, rendue possible par un soutien financier de l’État et la contribution de divers commerces locaux. « Nous remercions notamment Casino Vénissy et Carrefour qui nous permettent d’acheter à moindre coût ces produits », tient à souligner Mavea Ah-Sha.
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