Bars et restaurants rouvrent leurs salles et terrasses demain 2 juin, à la satisfaction des amateurs de bonne chère et de convivialité, mais surtout des professionnels, durement touchés par ces 80 jours au régime sec. Comment s’organisent-ils ?
Avec ses 30 couverts terrasse comprise, l’Épicerie Comptoir Porte-Pôt (route de Vienne) joue dans la catégorie des petits restos de quartier. Pour sa patronne, l’ouverture est un soulagement mais les contraintes sanitaires exigées pour reprendre l’activité lui ont causé quelques migraines… « C’est un mal nécessaire, consent Muriel Brevet, il faut en passer par là pour que nos convives viennent confiants, mais alors, quel casse-tête ! » Avant l’apéro, il faudra d’abord prendre une rasade de gel hydro-alcoolique, puis suivre un sens de circulation strict pour gagner sa place dans la petite salle ou dans la courette-terrasse. Le service en salle et aux fourneaux se fera avec masque, gants et visière. L’espacement obligatoire entre les tables a réduit sérieusement le nombre de couverts. Pour espérer ne pas passer trop en dessous du seuil de rentabilité et éviter de faire attendre les clients, il y aura désormais deux services, l’un à midi, l’autre à 13 heures, les deux sur réservation obligatoire. Et des plats à emporter. La réouverture est bienvenue mais elle comporte de nombreuses inconnues. « Beaucoup de nos habitués sont encore en télétravail, constate la chef, et on reprend juste avant la période estivale, la plus creuse pour nous ».
À la Brasserie de Parilly, rue du Clos-Verger, Anne Schulz a décidé d’attendre le 8 juin pour rouvrir, avec une équipe réduite. « Je préfère me donner un petit recul, le temps de premiers retours d’expérience, pour faire les choses correctement. » Malgré la différence de taille de leurs établissements respectifs, Anne Schulz a les mêmes préoccupations que sa consœur de la route de Vienne. Elle aussi joue la carte de la sécurité sanitaire : climatisation nettoyée et désinfectée, sens strict de circulation pour les clients et les serveurs, masque obligatoire pour se déplacer dans la salle. Et comme le diable est dans les détails, les corbeilles de pain seront remplacées par un petit pain individuel à l’assiette. Elle aussi a dû réduire le nombre de couverts, passant de 130 à une cinquantaine, et s’inquiète du nombre de clients encore en télétravail. La parade est la même : « On va faire trois services, à 11h30, 12h15 et 13 heures. J’espère que les entreprises vont jouer le jeu et laisser leurs salariés partir déjeuner un peu plus tôt ou revenir un peu plus tard ».
Au Café de la Paix, l’espoir renaît chez Samir Soliman, qui peut enfin tirer parti de sa terrasse située dans la rue piétonne du centre-ville. Mais il s’inquiète du respect des gestes barrière. « En terrasse, une tablée de deux personnes qui boivent un café ou une boisson fraîche est souvent rejointe par des amis qui passent, et qui se joignent aux premiers, observe-t-il. C’est normal, c’est la convivialité, le plaisir d’être ensemble, après le travail ou le marché. Mais en ce moment, c’est interdit, hélas. Ça me fatigue de devoir jouer les rabat-joie ! » Persuadé qu’il ne rattrapera pas le chiffre d’affaires perdu pendant le confinement, M. Soliman restera ouvert tout l’été, « pour limiter la casse ». S’il fonde peu d’espoir sur la mansuétude de ses créanciers (banque, organismes sociaux, propriétaire des murs…), il espère un geste de la commune pour l’aider à passer le cap.