Louise n’aurait jamais imaginé vivre une telle épidémie au cours de sa carrière. Technicienne de laboratoire, elle prélève quotidiennement des patients. Plusieurs de ses consœurs sont contaminées.
Est-ce que vous êtes surprise par l’ampleur de l’épidémie ?
Sincèrement, au départ comme beaucoup de personnes je voyais ça de loin, en Chine. On entendait certains médecins dire que ce n’était pas plus grave qu’une grippe. Et puis un jour, une de mes proches, médecin, m’a alertée en disant que nous devrions nous préparer au pire. Elle avait eu entre les mains des revues scientifiques qui expliquaient la gravité de ce nouveau virus.
Comment travaillez- vous aujourd’hui ?
Avant tout il faut se protéger et protéger les autres. Dès que nous arrivons nous mettons gants, masques, lunettes, surblouses. Depuis peu, une entreprise nous a fait des visières en plastique pour davantage de protection. Quand je fais des prises de sang par exemple, je ne peux pas respecter la distanciation sociale d’un mètre. Actuellement, on ne fait pas de tests diagnostiques au labo, mais souvent les médecins prescrivent une prise de sang pour savoir s’il y a infection ou pas. Les patients attendent dehors et entrent un par un afin qu’ils ne se retrouvent pas à plusieurs dans les salles d’attente. Devant les postes de secrétariat des plexiglas ont été installés. Nous changeons de gants bien entendu à chaque patient. Depuis hier (5 avril) nous avons constaté une hausse de personnes portant des gants et masques. C’est rassurant.
Malgré toutes ces protections, est-ce que des membres de votre équipe ont été contaminés ?
Oui, plusieurs de mes consœurs sont atteintes. Elles ont été diagnostiquées positives au virus. Malgré tout, nous nous sommes proposées pour travailler encore davantage pour accueillir nos patients. Nous avons peur que toute l’équipe soit contaminée, car nous avons travaillé ensemble. Nous aimerions être testées afin de savoir où nous en sommes. Ce qui me fait le plus peur comme tout le monde ce serait une hospitalisation. C’est très angoissant de travailler en cette période. L’autre nuit, par exemple, je n’ai rien dormi. Je veux également protéger mes proches. Dès que je rentre, je relave mes mains et je désinfecte toutes mes affaires personnelles avec soins.
Vous pensez qu’on devrait prendre encore davantage de précautions ?
Certains de nos patients pourraient attendre pour une analyse non urgente ou un bilan de routine. Et puis il faudrait déjà que les règles soient respectées par tous. Quand je vois les gens se promener dans les rues sans respecter la distanciation sociale et sans aucune protection, je me dis effectivement qu’on ne prend assez de précautions. Il faut écouter le personnel médical et paramédical : nous sommes au travail pour vous, s’il vous plaît restez à la maison pour nous. Quand le plus dur sera passé, la période du déconfinement va également être difficile, car il faudra à tout prix éviter une seconde vague. Il y aura sans aucun doute une autre manière de travailler et de vivre, un avant et après Covid-19.