Infirmier à Vénissieux depuis une dizaine d’années, Abdel (prénom d’emprunt) évoque son vécu et son ressenti depuis le début de la crise sanitaire.
Qui y a-t-il de changé depuis le début de cette crise sanitaire ? Et dans votre manière de travailler ?
Sincèrement, on ne peut pas parler de bouleversement. Je fais davantage de prises de constantes (tension, température, pouls). Mais dans mon secteur qui couvre les Minguettes, le Charréard et le Centre, j’ai le même rythme de travail, les mêmes patients à soigner, les mêmes règles d’hygiène élémentaires (lavage des mains, asepsie…). Pour être plus précis, 70 % de mes visites concernent des personnes âgées, retraitées depuis une dizaine d’années. On se connaît parfaitement, je les suis pour des pathologies chroniques.
Je constate que parfois, on nous applaudit, c’est gratifiant. Mais je le répète, mon travail n’a pas vraiment changé. Pour l’anecdote, on se fait parfois interpeller par des jeunes qui nous demandent s’ils peuvent avoir des masques pour leurs parents. Bien évidemment, cela nous est impossible.
Mais l’émergence du Covid-19 n’a-t-elle pas modifié quelque peu certaines de vos habitudes ?
Sur tout ce qui concerne l’hygiène de manière générale, on est plus attentifs, plus rigoureux, il y a plus de sécurité.
Automatiquement, on se désinfecte les mains avant et après chaque soin. Parfois pour le même patient, on peut le faire à plusieurs reprises. Je porte un masque et je suis équipé en lingettes bactériologiques et désinfectantes. Il m’arrive d’utiliser une solution javellisée pour nettoyer mon matériel, et certaines surfaces. À la fin de la tournée, il convient de décontaminer le volant et tous les accessoires du véhicule qui ont été touchés, avec un détergent désinfectant virucide.
Vous êtes suffisamment fourni en matériel ?
Pour être franc, en début de crise les pharmacies ont été dévalisées. Il manquait des thermomètres, du gel et surtout des masques FFP2, en raison d’une forte demande des citoyens. Et dans ce cas précis, c’est la solidarité entre collègues qui a prévalu.
Comment réagissez-vous quand l’un de vos patients a contracté le virus ?
Je n’ai pas encore rencontré ce cas de figure. Mais la démarche est connue. Suivant son état, je peux dans un premier temps orienter mon patient vers son médecin traitant, ou lui demander de contacter le 15 s’il le faut.
J’interviens également dans un foyer d’accueil de Vénissieux. Et là, la vigilance est accrue, mais le dispositif mis en place est rigoureux car les patients sont logés dans le même bâtiment, et forcément les risques de propagation plus grands.
Votre rythme de travail ?
En moyenne, j’interviens une vingtaine de jours par mois, avec une amplitude de onze heures au quotidien. J’ai la chance de travailler en binôme avec une infirmière.
Êtes-vous concerné par la tournée Covid-19 qui doit se mettre en place à Vénissieux ?
Ma collègue fait partie du groupe de travail qui est en pleine réflexion sur la question, mais à ce jour rien n’a été programmé.
La protection est plus accrue avec vos proches ?
Naturellement. Je n’entre pas avec mes chaussures à la maison, les vêtements sont vite mis au sale, le lavage des mains est plus long et la douche essentielle.
Que penser de cette crise ?
Cette crise est tellement inédite, qu’il y aura forcément un après. Je suis surtout curieux de voir comment les gens vont se comporter après le confinement, une fois qu’il n’y aura plus de doute sur un retour à la normale. Et je vais être observateur du comportement social de tout un chacun, au niveau des contacts, des rencontres et des habitudes. Concernant plus particulièrement le secteur de la santé, j’espère que les leçons auront été tirées, que nous serons vraiment épaulés par nos principaux partenaires, les commissions paritaires locales et les politiques.
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