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Secouriste, pourquoi pas vous ?

Alors que les accidents domestiques font 21 000 morts chaque année en France, seules 15 % de personnes sont formées aux gestes de premiers secours. Les formations ne manquent pourtant pas, notamment à Vénissieux.

Alors que les accidents domestiques font 21 000 morts chaque année en France, seules 15 % de personnes sont formées aux gestes de premiers secours. Les formations ne manquent pourtant pas, notamment à Vénissieux.

Dossier réalisé par Alain Seveyrat et Michèle Feuillet

Sept heures
pour acquérir les bases du secourisme

Le certificat prévention et secours civiques de niveau 1 (PSC1), est la formation de base aux premiers secours. Les principaux cas traités sont les malaises, les plaies, les brûlures, les traumatismes, l’hémorragie, l’étouffement, la perte de connaissance et l’arrêt cardiaque. Est aussi enseignée l’utilisation du défibrillateur automatisé externe (DAE). Elle dure sept heures et n’est pas sanctionnée par un examen.

« Un soir à table, mon fils de 10 ans a avalé un cornichon de travers. Il est devenu subitement tout rouge. C’était évident, il commençait à s’étouffer. Mais je ne savais pas comment réagir, j’étais terrifiée, se souvient Marie*. C’est alors que mon mari, pompier volontaire à l’époque, lui a donné des claques dans le dos et lui a fait la fameuse manœuvre de Heimlich**. Il a alors recraché l’aliment et s’est remis à respirer. Je suis persuadée que si mon mari n’avait pas été là, mon fils serait mort. »
De telles histoires ne se terminent pas toujours aussi bien. Car si le jeune garçon s’en est tiré sans séquelle, d’autres n’ont pas eu cette chance. En 2012, selon Santé Publique France, 2 040 personnes ont péri suite à une « fausse route », lorsqu’un aliment ingéré se retrouve bloqué accidentellement dans les voies respiratoires. C’est, aujourd’hui encore, la première cause de décès chez les moins de 5 ans. « Les gestes à effectuer sont pourtant simples, faciles à mémoriser, et cette manœuvre de Heimlich n’est à utiliser qu’en dernier recours, souligne Aïssa Azzouzi, formateur en secourisme auprès de l’Etablissement polyvalent jeunes (EPJ) Pyramide à Vénissieux.

Secourir, un acte citoyen
Retour en 2012. Cette année-là, on a recensé plus de 21 000 accidents domestiques mortels… alors que la route n’avait tué « que » 3 645 fois. Ces chiffres, les secouristes les connaissent bien. Ils savent aussi qu’ils pourraient être revus sérieusement à la baisse si les « gestes qui sauvent » étaient mieux connus, mieux enseignés… et désacralisés. « Le secourisme n’est pas une priorité en France, regrette Aïssa Azzouzi. Dans les pays scandinaves, 80 % des personnes sont formées aux gestes qui sauvent, alors que chez nous on est à 15 ou 20 %. »

« Ce devrait être un acte citoyen. Tous autant qu’on est, on peut avoir un souci avec un proche, ou se trouver dans la rue face à une situation d’urgence, abonde Samir Toumi, responsable de l’EPJ Pyramide. Même sans être médecin ou infirmier, on peut déjà protéger la personne et alerter les secours, sans se mettre en danger. Tout cela s’apprend en quelques heures, et permet déjà de faire 70 % du travail en cas d’accident. Si après on a le courage de faire un massage cardiaque ou un autre geste parce qu’on a été formé pour, c’est encore mieux ».

30 à 50 jeunes formés tous les ans
Dans cette structure municipale qui accueille des jeunes de 12 à 17 ans toute l’année et pendant les vacances scolaires, on se montre particulièrement sensible au problème. Plusieurs actions en direction des jeunes ont donc vu le jour depuis 2015. « Au départ, l’idée est venue du fait que pas mal de jeunes circulent dans le quartier en scooter sans casque. On avait la crainte d’un grave accident, relate Samir Toumi. Il ne suffit pas de dire que les jeunes doivent mettre des casques et respecter le Code de la route. Ils doivent aussi apprendre à gérer des situations de danger ou à aider des personnes en détresse. » D’où la mise en place de formations PSC1 (Prévention et secours civiques de niveau 1) en lien avec la Fédération française de secourisme et de sauvetage aquatique. Désormais, 30 à 50 jeunes – dont des animateurs – sont formés ou recyclés chaque année aux gestes de premiers secours.

Quelques adresses
> EPJ Pyramide : 53 rue des Martyrs de la Résistance – 04 78 90 46 82
> Protection civile du Rhône : 158 Avenue Francis de Pressensé – contact [at]protectioncivile69.org
> Union nationale des sauveteurs secouristes (UNASS) : 100, route de Vienne, 69008 Lyon – rhone@secouristes.com, 04 72 76 69 69
> Participer à la chaîne de secours : www.permisdesauver.info
> Une mine d’informations sur le secourisme : www.secourisme.net

De la théorie à la pratique, il n’y a parfois qu’un pas. « Il y a quelque temps, près de la Maison des fêtes et des familles, il y a eu un accident entre une voiture et un scooter, se souvient Aïssa Azzouzi. Le conducteur du scooter était inconscient, mais il respirait. Lorsque je suis arrivé, il y avait déjà des jeunes en train d’intervenir. Ils l’ont mis en PLS (position latérale de sécurité), l’ont couvert et ont appelé les secours. » Là encore, l’histoire se terminera bien. « Comme ils ont bien respecté le protocole, l’état de la victime ne s’est pas dégradé. On a eu des nouvelles depuis, il s’en est bien sorti. », note Aïssa Azzouzi.

Depuis l’été 2016, il est demandé à tous les établissements scolaires du second degré de proposer à leurs élèves une formation à la PSC1. Ceux qui ne l’ont pas reçue sont censés suivre une sensibilisation de deux heures aux gestes qui sauvent. Quant au premier ministre Édouard Philippe, il avait rappelé le 26 mars l’objectif du président de la République, de voir « 80 % de la population formée aux gestes de premiers secours ». Un objectif réaffirmé dans une circulaire du 2 octobre dernier, ayant pour objet la généralisation auprès de 80 % des agents publics des formations aux gestes de premier secours. Il était temps.

* Prénom d’emprunt
** geste de secourisme qui consiste à comprimer les poumons par le bas pour déloger l’objet coincé


Thomas Janin : « Ne faut pas avoir peur de se former »

Thomas Janin est président de la Protection civile du Rhône, dont le siège est à Vénissieux. L’association, qui revendique plus de 21 000 heures de bénévolat en 2 018, a formé 506 personnes au PSC1 durant cette année. Toujours en 2018, elle a participé à 130 dispositifs prévisionnels de secours et effectué 375 prises en charge. Au niveau national, la Protection civile s’est notamment illustrée ces dernières années dans l’assistance aux victimes des attentats de Paris et de Nice, dans l’accueil des familles suite au crash de l’avion de la Germanwings, ou encore dans l’aide aux populations sinistrées par l’ouragan Irma à Saint-Barthélemy et Saint-Martin.

Kevin, 26 ans, éducateur sportif, secouriste bénévole à la Protection civile
« J’ai été sapeur-pompier volontaire il y a plusieurs années, et j’ai dû arrêter pour des raisons professionnelles. Mais le secours à personne me manquait. Je voulais aussi repasser mes formations PSE1 et 2, qui peuvent toujours être utiles dans mon travail d’éducateur sportif, et c’est ce que m’a permis la Protection civile. En un an, j’ai aussi participé à une trentaine de postes de secours de 3 à 12 heures chacun. L’année prochaine je compte passer d’autres formations, pour devenir à terme chef d’équipe. »

Quel est concrètement l’intérêt de se former aux gestes de premiers secours ?
Le plus important, c’est d’acquérir de bons réflexes face à une situation d’urgence. Qu’elle se produise chez vous ou dans la rue, qu’elle implique des membres de votre famille ou des inconnus, vous devez réagir sereinement. Une formation vous aide à faire les choses dans l’ordre : ne pas vous mettre en danger, protéger la victime, alerter les secours et éventuellement effectuer des gestes. Il ne faut pas avoir peur de se former.

Peut-on former aussi les enfants ?
Oui, ils disposent d’une capacité d’apprentissage très importante. À trois ans, on peut très bien apprendre à mettre une victime en PLS ! Simplement, pour les plus jeunes, on utilise un mode ludique qui permet de faire passer les messages nécessaires sans les choquer. En primaire, il existe notamment un module d’apprentissage des gestes qui sauvent, d’une durée de deux heures. Et le PSC1 est accessible dès 10 ans.

Vos missions ont-elles évolué depuis les attentats de 2012 et 2015 ?
Non, elles sont identiques. Mais nous sommes plus sollicités qu’avant sur les dispositifs prévisionnels de secours mis en place pour des événements pouvant générer un nombre important de victimes.


« Permis de sauver » en route vers le secourisme 3.0

C’est une application pour smartphones qui pourrait sauver de nombreuses vies. Créée par deux pompiers lyonnais, « Permis de sauver » a pour mission, en lien avec le Samu et les pompiers, d’alerter des secouristes en cas de situation d’urgence. « Nous avons ciblé les interventions qui présentent un caractère d’urgence : arrêts cardiaques, hémorragies, étouffements, accidents, attentats, entre autres, nous précisait début 2018 Mehdi Boudjema, l’un des concepteurs. Ce sont des situations qui nécessitent une prise en charge très rapide des victimes, mais pour lesquelles des gestes relativement simples peuvent être déterminants ».

Grâce à la géolocalisation, les services d’urgence peuvent choisir d’orienter un certain nombre de secouristes vers les lieux d’une intervention, et leur permettre ainsi de préparer le terrain aux pompiers. Tout-un-chacun peut s’inscrire sur l’application, mais ne peuvent participer à la chaîne de secours que les secouristes diplômés.
Téléchargée plus de 40 000 fois en un an, l’application est désormais utilisée par les services d’urgence de quatre départements (le Gard, la Vienne, les Alpes de Haute-Provence et La Réunion), qui l’ont testée avec succès sur plus d’une cinquantaine d’interventions. Selon Mehdi Boudjema, la Savoie, puis le Rhône, devraient rejoindre la liste d’ici moins de deux mois.

Secourisme au travail : à l’école des bons gestes

Lycée professionnel Hélène-Boucher – Salle 20, rez-de-chaussée du lycée professionnel Hélène-Boucher. Allongé sur le sol, Marius joue la victime tandis qu’Alex s’affaire autour de lui. En fin d’année, les 80 élèves de terminales CAP vente, hôtellerie, restauration, hygiène propreté et stérilisation, passeront le certificat SST (Sauveteur secouriste du travail). Une formation de douze heures réparties sur l’année. Elles-mêmes formées, Amélie Valotaire, professeur de biotechnologie santé-environnement, et Émilie Paulet, professeur de biotechnologie, dispensent les cours. « Nos élèves deviendront des opérateurs dans des filières ou les accidents du travail ne sont pas rares, ils se doivent donc d’avoir ce certificat. Le SST est sans aucun doute une plus value sur leur CV. Au cours de leur formation ils répètent les quatre actions chronologiques du secourisme : protéger, examiner, alerter et secourir. »

À chaque cours, les enseignantes confrontent leurs élèves à une situation. Ce jour-là, Nora a inhalé des produits chimiques toxiques dans une petite pièce de stockage. Inconsciente, elle a été retrouvée par un témoin, Cassandra. Fanta tient le rôle du sauveteur. Tandis qu’elle tente de prodiguer les gestes de premiers secours, ses copains de classe l’examinent, cherchant la moindre erreur. Après l’action, c’est le temps du débrief pour corriger les mauvais gestes. À l’issue de leur formation, les élèves passent un examen d’une vingtaine de minutes. Tous ne le réussissent pas.

Une obligation légale
Code du travail – Selon le Code du travail français, « un membre du personnel doit avoir reçu obligatoirement l’instruction nécessaire pour donner les premiers secours en cas d’urgence dans chaque atelier où sont effectués des travaux dangereux, ainsi que dans chaque chantier occupant 20 personnes au moins pendant plus de quinze jours où sont effectués des travaux dangereux. »

Un sauveteur secouriste du travail (SST) est chargé par l’employeur de dispenser les gestes de premiers secours en cas d’accident du travail. Il s’agit d’une délégation de l’employeur en matière d’hygiène et sécurité du travail. Le SST est un diplôme – dont la validité est valable deux ans – sanctionnant la formation du sauveteur-secouriste du travail, contrairement au PSC1 (Prévention et secours civiques de niveau 1) qui n’est qu’une attestation.

À la fin de la formation le SST est capable de connaître les principes de base de la prévention, rechercher les risques pour protéger, examiner une victime, alerter les secours et secourir une victime 
jusqu’à la prise en charge des secours spécialisés.

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