Le 15 janvier, l’inspection du travail du Rhône a rejeté la demande de licenciement d’une quinzaine de représentants du personnel présentée par Robert Bosch Vénissieux (1).
Ce refus s’appuie sur une sévère remise en question des motifs présentés par Bosch pour justifier la fermeture du site fin 2017, et la centaine de licenciements qui en découlait, dans le cadre d’un » plan de sauvegarde de l’emploi » (PSE) signé en octobre 2016.
Selon l’industriel, le site de Vénissieux était « inadapté aux conditions modernes de production » et ne fabriquait plus que des pièces « obsolètes » (des éléments de pompe d’injection de moteurs diesel pour poids lourds), inadaptées à la législation européenne, alors que le groupe dispose de capacités de production suffisante de ces produits à plus bas coût hors d’Europe (Turquie, Brésil, Chine…). Bosch invoque également la baisse du chiffre d’affaire du site en 2015 et 2016.
Pour la Direccte (2), ces arguments ne tiennent pas. Elle estime d’abord que l’entreprise avait largement la possibilité et le temps d’adapter l’usine et ses ouvriers aux évolutions réglementaires et aux mutations technologiques, mais ne l’a pas fait. D’autant que la crise des moteurs diesel ne concerne pas les poids lourds.
Ensuite, l’inspection du travail conteste la réalité des difficultés économiques mises en avant par l’équipementier. Elle relève même que le résultat net de la division diesel pour poids lourds du groupe allemand est florissante. « Bosch a manifestement cru pouvoir s’appuyer sur la loi El Khomri, qui permet à un groupe en bonne santé de licencier dans une filiale en difficulté, sans tenir compte du reste de l’entreprise, analyse Serge Truscello, responsable PCF de Vénissieux et salarié de Bosch en pré-retraite. Une situation facile à fabriquer en jouant sur les flux financiers ou en laissant volontairement se dégrader une situation pendant deux ans, sans réaliser d’investissements par exemple ».
« C’est exactement ce qu’il s’est passé à Vénissieux et c’est ce qui va se passer dans bien d’autres boites, maintenant que la loi El Khomri est passée, explique Kamal Ahamada, délégué CGT et membre du CE. Sauf que le PSE de Bosch a été lancé avant l’entrée en vigueur de cette loi le 1er décembre 2016 : il doit donc obéir au dispositions précédentes du Code du travail ». La conclusion de l’administration est d’ailleurs claire : « le motif économique ne peut donc être considéré comme suffisamment établi ».
Enfin, l’inspection du travail juge que « l’employeur n’a pas rempli son obligation de recherche de reclassement (des représentants du personnel NDLR) avec suffisamment de sérieux et de loyauté », alors qu’elle était en mesure de leur proposer des postes correspondant à leurs qualifications.
La direction de Bosch a jusqu’au 15 mars pour faire appel de cette décision auprès du ministère du travail.
(1) Le licenciement d’un représentant du personnel (DP, élu au CE ou au CHSCT) doit faire l’objet d’une demande d’autorisation auprès de l’inspection du travail. Les autres salariés doivent contester – a posteriori – leur licenciement devant le tribunal des Prud’hommes.
(2) Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi.