Dix ans que Marie Ermakoff, documentaliste au lycée Marcel-Sembat, essayait de se glisser dans le circuit de Renvoyé spécial, une opération montée par la Maison des journalistes, à Paris, en collaboration avec l’Éducation nationale. Elle a réussi cette année à inviter Wareth Kwaish, un jeune cinéaste irakien auteur de plusieurs courts-métrages documentaires et réfugié politique en France. Et à organiser au sein du lycée une rencontre avec deux classes de 1e ES. Cela se passait le 18 mai dernier et le jeu de questions/réponses fut passionnant jusqu’au bout.
Wareth parle arabe, anglais et quelques mots de français. Quand il s’exprimait en arabe, il bénéficiait des talents d’une traductrice. Les élèves ont, quant à eux, posé leurs questions en français, en anglais et en arabe.
La discussion s’est essentiellement portée sur l’Irak, son histoire, sa culture, ses guerres et ses religions. « Saddam Hussein a dirigé l’Irak pendant 35 ans. Il y a eu quatre guerres pendant ce temps. C’est une nouvelle culture : la guerre, l’oppression des médias, l’exclusion des pays autour. Cela crée de nouvelles générations de guerre. »
Un élève demande alors ce qui pourrait permettre de stopper tout cela. « La culture, le cinéma, la reconstruction, la société civile ! »
Wareth aborde ainsi plusieurs sujets géopolitiques et les questions des élèves deviennent de plus en plus précises : ce qui se passe sur place correspond-il à ce qu’on nous montre ici ? « Ce n’est pas toujours la réalité », répond Wareth. Ou « que pensez-vous des Kurdes indépendantistes » ? Un autre élève remarque que Wareth affirme qu’il est en faveur de la démocratie tout en reconnaissant qu’elle représente un problème. « La démocratie et la compréhension de la démocratie sont deux choses différentes. Toute personne devrait être libre et vivre en démocratie. En Irak, nous vivons dans une soi-disant démocratie qui laisse les gens se faire tuer. »
Il parle encore des différences entre chiites et sunnites, des yazidis — adeptes d’une religion antérieure à l’islam et que Daech a éliminés à 80% —, des rassemblements réguliers de quelque 5 millions de personnes sur le square de la Liberté à Bagdad, de son arrivée en France — « parce que j’étais menacé en Irak et que la France, c’est les frères Lumière et le pays du cinéma » — et conclut : « En tournant mes films, j’aurais pu me faire tuer. » On lui demande alors quel message délivrait ses films. « L’humanité, c’est tout ! »
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