À quelques semaines des épreuves du BEP et du bac, ces élèves sérieuses devraient être en train de réviser. Au lieu de ça, les deux sœurs se cachent, terrifiées. Elles sont sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et la menace d’un renvoi vers la République démocratique du Congo, où ne les attendent que la misère et la violence.
Des élèves exemplaires
Trois ans déjà qu’elles ont fuit l’asservissement et les mauvais traitements de l’oncle qui les avait recueillies après le décès de leur père et l’abandon de leur mère, partie en Angola. Prises en charge à leur arrivée à Lyon par l’association Forum Réfugiés, elles se conduisent depuis comme des élèves exemplaires, avides de réussir et de travailler dans un pays qu’elles aiment.
Il y a quelques semaines, les jeunes filles se sont donc présentées confiantes à un rendez-vous administratif. Une étape de plus dans leurs démarches pour obtenir un titre de séjour, pensent-elles. En fait, à peine arrivées, elles sont arrêtées par la Police aux frontières et conduites au centre de rétention administrative de Saint-Exupéry. Là, elles sont interrogées sur leur parcours, leur histoire, subissent des tests osseux. S’appuyant sur Visabio (fichier biométrique des étrangers sollicitant un visa), la police les soupçonne d’avoir menti sur leur âge à leur arrivée en France. La préfecture délivre une OQTF à chacune, « avec prise d’effet immédiate » et interdiction de retour.
Faux papiers, vraie détresse
Remises dehors par le juge des libertés, elles sont toutefois assignées à résidence. Et convoquées en urgence devant le tribunal administratif de Lyon. L’administration s’appuie sur des documents qui les présente comme étant majeures. Elles n’auraient donc dû bénéficier des protections et prises en charge réservées aux mineurs isolés. Ces documents sont des faux, admettent Glodia et Médie, ils ont été établis par des passeurs pour leur donner une identité d’adulte leur permettant de quitter la République démocratique du Congo. Insensible à cet argument et à la vie sans histoires des deux sœurs, la préfecture ajoute même au dossier un risque de troubles à l’ordre public ! La juge unique valide l’OQTF mais ne fait pas interpeller immédiatement les deux soeurs, qui ont le temps de se cacher.
Hélène-Boucher se mobilise
A l’annonce du jugement, la communauté éducative et administrative du lycée Hélène-Boucher, où Glodia est scolarisée, se mobilise aussitôt : pétition en ligne, courrier adressé à la rectrice, alerte aux parents d’élèves, à RESF. « Glodia fait partie intégrante de notre communauté scolaire, explique une enseignante qui souhaite conserver l’anonymat. Elle donne entière satisfaction, tant par sa mise au travail que par sa pugnacité, pour être une élève à part entière. Son comportement est également irréprochable. Glodia et sa sœur doivent pourvoir poursuivre leur scolarité en France ».
Glodia doit passer dans un mois sa certification intermédiaire BEP, qui lui permettra de poursuivre sa formation et de valider un bac pro « hygiène, propreté et stérilisation » l’an prochain. Médie, sa grande sœur, en terminale à la Maison familiale et rurale de Belleville, n’est qu’à quelques semaines des épreuves du Bac.
Rappel à l’idéal républicain
« Nous n’avons pas à nous préoccuper de prétendus problèmes d’identité, mais de garantir l’égalité d’accès à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture inscrite dans notre Constitution » écrivent les enseignants et les personnels d’Hélène-Boucher à la rectrice d’académie, arguant également de la Convention internationale des droits de l’enfant. « Nous ne nous immiscerons pas dans la procédure judiciaire en cours, en tant qu’enseignants et personnels de l’éducation nationale. Mais c’est bien en tant que tels et fiers d’accomplir notre mission éducative dans le cadre de l’idéal républicain que nous sollicitons votre bienveillante intervention à fin de laisser l’opportunité à Glodia et Médie de continuer leur scolarité, d’obtenir leur baccalauréat et de poursuivre leurs démarches citoyennes », concluent-ils.
RENARD
3 mai 2017 à 18 h 06 min
Ces 2 jeunes doivent rester en France pour continuer leurs études qui leur donneront un métier. Ensuite, ce seront à elles de décider de leurs choix.