Le projet de construction de la nouvelle cuisine centrale de Vénissieux a été adopté lors du conseil municipal du 10 octobre. Porté par la majorité qui défend une production locale et publique des repas destinés aux écoliers et aux personnes âgées, le projet est combattu par l’opposition qui y voit un investissement inutile et coûteux.
Un débat relevé. Dans la vie municipale, certains projets mijotent doucement et passent tout seul. D’autres cuisent à feu vif et semblent trop épicés pour certains palais. La construction de la nouvelle cuisine centrale municipale fait partie de la seconde catégorie. L’avant-projet définitif, le coût prévisionnel de l’opération et le lancement de l’appel d’offres aux entreprises étaient au menu du conseil municipal du 10 octobre. Le nouvel équipement doit ouvrir dans deux ans. “Ses bénéficiaires seront les écoliers vénissians, dont les effectifs ne cessent d’augmenter, les enfants dans nos crèches, et les personnes âgées dans nos résidences, explique d’entrée Michèle Picard. Pour des jeunes enfants vénissians, il peut en effet s’agir du seul repas consistant, de qualité et équilibré de la journée. Garder une maîtrise publique d’un tel enjeu, à la fois sanitaire et social, c’est primordial, crucial, surtout en temps de crise” poursuit le maire.
A couteaux tirés. Ce que les opposants de droite et socialistes trouvent indigeste, c’est justement le financement essentiellement municipal du projet. “Notre groupe est contre le principe d’une petite cuisine municipale qui produira des repas plus chers que ceux des communes voisines, explique Pascal Dureau, au nom des élus socialistes et républicains. Nous sommes pour une mise en commun au niveau de la Métropole des moyens de production, seule manière de concilier l’efficience et la qualité, la diversité des repas pour tous, chaque jour de la semaine.” Christophe Girard, chef de file du Rassemblement pour Vénissieux (Droite), en remet une louche. Pour lui, ce projet est une “aberration” et “une gabegie”. “Par parti pris collectiviste vous avez opté pour une solution qui pénalise les familles par le prix des repas, pousse à la massification et gène la diversité, égrène l’élu. Cet investissement de presque 9 millions d’euros va être principalement porté par la Ville. On peut s’interroger sur le pourquoi de cette frilosité de nos partenaires institutionnels qui habituellement soutiennent de tels investissements. Ne faut-il pas y voir leur refus de cautionner cette gabegie financière fruit d’un aveuglement idéologique ?”
Une addition salée ? Des arguments déglacés par Saliha Prudhomme-Latour, intervenant au nom des élus communistes et apparentés. “C’est notre volonté politique de produire nous-même des repas de qualité et de ne pas privatiser ce service public. Les tarifs sociaux pratiqués répondent aux besoins de nos administrés, avec un prix maximum de 3,57 euros par repas, contre 4,80 euros à Meyzieu ou 6,40 euros à Lyon, par exemple.” Reprenant la parole avant de mettre la délibération au vote, Michèle Picard passe au grill les arguments de l’opposition, dénonçant “la solution de facilité de tout déléguer à des opérateurs extérieurs*. Mais une fois que vous aurez confié l’ensemble de vos leviers au privé, que restera-t-il de vos politiques de proximité, quels seront vos moyens d’intervention, auprès des familles les plus fragiles, auprès des Vénissians ? Vous les aurez bradés au plus offrant, et ce n’est pas ma conception du développement de notre ville. Vos soi-disant économies du moment se transforment en démission politique du lendemain, sur des enjeux aussi sensibles que la santé, l’enfance, l’école publique. À travers l’attribution de la DPV (pour un montant de 1,2 million d’euros, N.D.L.R.) à la construction de la nouvelle cuisine centrale, l’État lui-même a reconnu l’utilité publique, et la notion d’intérêt général, que portait le projet.”
Au final, le projet a été adopté à la majorité. La droite et le PS ont voté contre, le FN s’est abstenu.
*La ville de Lyon délègue la restauration collective de ses écoles à Elior Group, la Métropole celle des collèges à Elior Group et Scolarest (groupe Eurest).
Le cabinet villeurbannais Aamco, le Berim (bureau d’études), Atelia (ingénierie de grande cuisine) et Ergos (spécialistes de l’ergonomie) sont les lauréats du concours d’architecture lancé par la Ville en vue de la construction de la nouvelle cuisine centrale. Sur la trentaine d’architectes ayant répondu, quatre dossiers ont été retenus, avant que le jury ne choisisse le cabinet Aanco qui possède une solide expérience dans ce domaine. On lui doit notamment la réalisation de la cuisine centrale de Villeurbanne.
Construit à proximité de l’actuelle cuisine centrale, avenue Jean-Moulin, sur un terrain de 6 000 m2, le futur équipement présentera une superficie de 2 225 m2. Au premier niveau, on trouvera tous les locaux destinés à la production. Au premier étage, moins étendu que le rez-de-chaussée, les bureaux réservés au personnel ainsi qu’à l’administration. Enfin au sous-sol le vide sanitaire et technique. Les travaux devraient commencer au printemps 2017, pour une ouverture prévue en septembre 2018.
La construction de cet établissement représente un très important chantier du mandat. Son coût est de 8 800 000 euros, avec un financement d’État d’1,2 million au titre de la Dotation de la politique de la Ville (ex-DDU). Pour Michèle Picard, la création de cette cuisine répond à un besoin grandissant : “Créée en 1976, notre cuisine actuelle permet la réalisation de 4 000 repas par jour au maximum. Le nouvel équipement pourra aller jusqu’à 6 300 repas. Notre objectif n’a pas évolué : proposer à tous les enfants un repas équilibré, avec des produits bio et des fournisseurs de proximité. La construction de cette entité est un véritable enjeu social et familial. À Vénissieux, beaucoup d’enfants ont pour seul repas équilibré celui de la cantine scolaire.”
Michèle Feuillet
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