Même s’il a tendance à se « tasser », le mouvement de grève dans les cantines de Vénissieux, entamé en avril pour contester le projet de loi El Khomri, a perturbé de nombreux restaurants scolaires. Pour Véronique Callut, maire adjointe chargée de l’Éducation, de l’Enfance et de la Jeunesse, la Ville a fait tout son possible pour répondre aux difficultés d’organisation des familles, sans attenter au droit de grève.
Comprenez-vous que les parents râlent contre l’absence de cantine ?
Bien sûr. C’est pourquoi un système d’encadrement de « paniers-repas » froids fournis par les parents a été organisé dans les écoles élémentaires pour répondre aux difficultés d’organisation des familles qui ne peuvent pas récupérer leurs enfants à midi. C’est la première fois que cette mesure est appliquée à Vénissieux.
Pourquoi ne pas avoir organisé de tels « piques-niques » en Maternelle ?
Les petits ne sont pas assez autonomes pour ce type de repas. Il aurait fallu un encadrement plus important et nous ne voulions pas que les enfants se retrouvent avec des gens qu’ils ne connaissent pas.
Combien de cantines ont été touchées, depuis avril ?
Moins de 25% puisque plus de 75% des accueils ont été assurés, et même plus que ça si on compte les piques-niques. Par exemple, le 7 juin, la cantine était fermée dans cinq écoles mais un pique-nique a été assuré dans trois d’entre elles. Pendant ce mouvement de grève, aucun enfant n’a été privé de repas, même ceux qui venaient sans pique-nique, d’ailleurs.
Pourquoi les parents ne sont-ils informés que la veille pour le lendemain ?
Le préavis déposé permettait une grève reconductible chaque jour. La loi n’oblige pas les grévistes à se déclarer longtemps à l’avance. Ils peuvent le faire le jour-même. Les équipes des services municipaux « Enfance – Education » et « Ecoles – Bâtiments » ont dû faire un travail de titan pour communiquer avec les familles, par mail ou par affichage, pour qu’elles soient informées au moins la veille. Les directions d’école ont aussi joué le jeu en affichant l’information chaque jour.
Les employés municipaux qui travaillent sur le « temps méridien » dans les écoles (Atsem, agents des écoles, animateurs…) font-ils grève uniquement sur un thème national ou également sur des revendications qui s’adresseraient à leur employeur, c’est à dire la Ville ?
Le préavis dans lequel s’inscrivent les personnels grévistes est national. Il a été déposé par la fédération CGT des services publics et porte sur la loi Travail. Il n’y a aucune revendication locale portée à notre connaissance. Un premier préavis permettant une grève reconductible chaque jour courrait jusqu’au 30 mai, un deuxième jusqu’au 14 juin. Peut-être y en aura-t-il un troisième.
Avez-vous procédé à des réquisitions ?
Pas du tout, et ce n’est pas notre intention. Même si nous cherchons à assurer le plus de repas possible pour limiter les désagréments, notre municipalité respecte le droit de grève. Nous « jouons aux chaises musicales » d’une école à l’autre avec du personnel non gréviste pour assurer l’encadrement minimum, quand c’est possible. Quand le taux d’encadrement d’un adulte pour 23 enfants ne peut pas être atteint, nous annulons le service.
La mairie appuie le le mouvement pour le retrait de la loi El Khomri. N’est-ce pas un peu compliqué de gérer une grève de son propre personnel qui va surtout gêner les habitants ?
La majorité municipale est contre cette loi de régression sociale, en effet. J’ai moi-même été manifester, en compagnie du maire, Michèle Picard, ce 14 juin, à Lyon. Vénissieux est une ville militante, où existent des traditions de lutte bien ancrées, c’est quasiment dans son ADN ! Je ne suis donc pas étonnée de voir les territoriaux se battre avec les salariés du privé sur des problématiques qui ne les concernent pas directement, même sur des questions nationales. Bien sûr, ça complique sérieusement la vie de leur employeur… Qui doit tenir compte des difficultés des parents qui sont dans la précarité ou qui ont de petits salaires, et qui comptent sur la cantine pour que leurs enfants aient au moins un repas équilibré chaque jour.
Les jours de grèves seront-ils payés aux grévistes ?
Non. Les retenues correspondant aux jours de grève du mois d’avril seront étalés sur plusieurs mois car il y a eu, de la part des grévistes, une communication correcte en direction des services de la Ville, bien en amont. Les jours de grève du mois de mai seront tous retenus en juin.
Quel sera le coût de ce mouvement pour la collectivité ?
Nous attendons la fin du mouvement pour faire ce calcul. A la date d’aujourd’hui, il y a eu une vingtaine de jours de grève, sur deux mois. Pendant les trois premières semaines de mai, entre 18 et 23 restaurants scolaires ont été fermés ponctuellement, puis une douzaine pendant la dernière semaine de mai. Depuis début juin, il y en a environ 4 ou 5 par semaine. Le 14 juin, il n’y a eu aucune cantine ouverte mais c’est parce que la cuisine centrale était en grève ce jour-là, et n’a fourni aucun repas.
Voir aussi l’interview de Nadera Hamitouche, responsable CGT des Atsem : Cantines fermées : « On ne fait pas grève pour le plaisir d’embêter les gens »
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