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Zine Bakhouche : une radioscopie de l’Algérie

Pour son deuxième roman, « De là, on voit Alger », l’auteur vénissian Zine Bakhouche place un groupe d’affairistes algériens aux mains d’un bandit qui va les faire parler de leurs trafics. Un regard sans concession sur l’Algérie.

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« Ce n’est pas parce qu’on est pauvre qu’on n’y arrive pas » a-t-il toujours dit à son copain Amar, natif du même village que lui en Kabylie et que Zine Bakhouche a retrouvé à Vénissieux, où il s’est installé depuis plusieurs années. Malgré une enfance difficile passée à garder les troupeaux, Zine a sauté tous les obstacles jusqu’à devenir maître-assistant à l’Institut d’architecture de Biskra puis obtenir un doctorat en géographie urbaine à l’université d’Aix-en-Provence. Auteur de deux ouvrages dans sa partie (« Structures commerciales et dynamique urbaine en Algérie » et « Aurès-Nemencha, mutation d’une région »), Zine s’est lancé dans la rédaction d’un premier roman, publié l’an dernier aux éditions Baudelaire sous le titre « L’enfant des Aurès » — dont « Expressions » avait parlé (numéro 564 du 10 septembre 2014).

« Ce livre a reçu beaucoup d’échos positifs, raconte aujourd’hui Zine Bakhouche, et j’ai été surpris que les gens l’aient autant aimé. Je suis devenu le porte-parole de ces enfants démunis de tout. J’ai vécu depuis des moments quasiment magiques : être connu, réclamé, passer dans ma ville de Khenchela et voir, dans les cafés, des personnes en train de lire mon livre. J’ai une sentiment de fierté de prouver que l’on peut se valoriser autrement que par l’argent ! C’est une position sociale nouvelle dans l’échiquier de la société. Habituellement, on réussit lorsqu’on a de l’argent ou un poste politique. Là, j’ai vécu la réussite par l’écriture d’un livre. »

Ce livre s’est bien vendu tant en France qu’en Algérie. L’idée d’une nouvelle histoire avait déjà germé dans son esprit et il ne manquait à Zine que cette poussée pour lancer notre jeune écrivain et le remettre sur la voie de l’écriture. « Depuis 1999 et l’arrivée de Bouteflika au pouvoir, on a constaté beaucoup d’entrées d’argent dans la société algérienne. Les caisses étaient pleines, la société s’est stabilisée, le gouvernement a lancé une politique de réconciliation. Malheureusement, l’argent a plus servi à la corruption qu’à accroître la richesse du pays. On ne demande pas à celui qui s’enrichit d’où provient son argent. J’ai recensé les scandales relatés dans la presse et imaginé à partir de là une histoire : ces nouveaux riches d’Algérie ont voulu se réunir pour fêter leur réussite et ont monté une expédition de plaisance dans le sud. Je présente les acteurs des malheurs algériens, caractérisés par la casquette et la barbe. Un bandit, qui n’est pas un terroriste mais quelqu’un qui a souffert, les prend en otage et cherche à comprendre comment ils ont acquis cette richesse. Il les interroge séparément, avec cette seule question… Ils vont tous divulguer les réseaux, les affaires, les scandales. »

À ses amis qui s’inquiètent, Zine répond : « Qui va parler de cela sinon ? Le journaliste Tahar Djaout a été assassiné par des tôliers, des peintres, des ignorants. Si je n’écris pas, je considère que je l’ai trahi, lui et toutes les autres victimes. »

Il évoque aussi le rôle des femmes, très importantes dans « De là, on voit Alger », joli titre donné à ce deuxième roman. « De 1962 aux années quatre-vingt, il n’y a aucun cliché pris en Algérie où l’on voit des hidjabs. L’Algérie était une société tolérante. Puis, le voile est arrivé et, comme on a couvert la femme, on a voulu couvrir son intelligence. Surtout dans les années quatre-vingt-dix, un travail de terrain a assimilé la femme à une voiture qui irait toujours en marche arrière. Dans mon expédition masculine, j’ai fait place à trois femmes qui ont chacune leur histoire. Malgré toutes les tensions que je décris, je laisse toujours la place à l’espoir, la tolérance et l’amour. »

Déjà, Zine Bakhouche s’est attelé à l’écriture d’un troisième texte, « Le double jeu ». Le résumé qu’il en donne est très alléchant : parfaitement identique à sa sœur mais sourde-muette, Katia tombe malade et est remplacée auprès du baron chez qui elle travaille par sa jumelle Leila. Mais elle, elle entend ce qui se dit dans cette maison. La suite prochainement, dans toutes les bonnes librairies !

Zine Bakhouche : « De là, on voit Alger », Édilivre. Le livre est disponible à la Fnac, Amazon, Decitre et sur le site de l’éditeur : www.edilivre.com

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