Culture

À l’école du théâtre

Deux classes du collège Michelet et de l’école Saint-Exupéry travaillent avec l’écrivain Gilles Granouillet à l’écriture de quatre petites pièces. Les enfants les joueront en mai au Théâtre de Vénissieux.

Du nouveau, c’est sûr que les classes de 6e du collège Jules-Michelet et de CM1 de l’école Saint-Exupéry vont en avoir. Ce n’est pas pour rien que l’expérience à laquelle elles participent a pour thème « Du nouveau » ! Financé par la Fondation Casino et piloté par le metteur en scène Philippe Zarch, le projet associe le dramaturge Gilles Granouillet aux deux classes vénissianes. Baptisé « Passage », il se concrétisera en mai au Théâtre de Vénissieux sous le nom de Fourmilière.

« Dans un premier temps, je dois leur faire écrire une pièce de théâtre d’une quinzaine de minutes, explique Gilles Granouillet. Chaque classe étant divisée en deux demi-groupes, nous aurons donc à la fin quatre petites pièces. » Les élèves travailleront ensuite avec un metteur en scène et des comédiens afin qu’ils jouent leurs propres textes.

« C’est un projet extrêmement ambitieux, reprend Gilles Granouillet. Faire écrire des enfants, c’est faisable. Mais leur faire écrire une fiction avec un début, un milieu et une fin, c’est plus compliqué. Surtout lorsqu’on s’écarte de la poésie et du ressenti. Une pièce de théâtre est fondamentalement très difficile à écrire. Elle met en place des stratégies de scène qui sont complexes pour un enfant. »

En quelques séances, l’auteur et les élèves se mettent d’accord sur un scénario. « A partir de cette chose d’une dizaine de lignes, nous nous sommes demandé comment découper tout cela en scènes et comment faire dialoguer les personnages. La question que je me suis également posée, c’est comment me situer honnêtement dans le projet. Si j’écris la pièce, ce ne sera pas leur travail. Si je les laisse écrire l’histoire, elle risque de s’avérer maigrissime, ce qui serait les envoyer ensuite au casse-pipe sur scène. Le théâtre est comme une course hippique : il vous faut un bon jockey et un bon cheval. Si le texte n’a pas grand chose à défendre, cela devient très difficile. La solution consiste à se mettre dans un entre-deux assez malin… que les jeunes se retrouvent dans l’histoire et que j’y apporte ma patte pour qu’elle ait une tenue sur le plateau. »

Pour l’instant, après plusieurs séances, l’écrivain n’a pas fait lire ses propres textes aux élèves. « Pour ne pas les polluer », dit-il.

Gilles a d’abord fait approfondir la thématique aux enfants. « Nous sommes partis sur la notion de naissance et en avons décrypté les différents sens : les nouveautés technologiques, les catastrophes qui arrivent, la naissance dans une famille, l’arrivée d’un nouveau maître ou d’une nouvelle maîtresse dans une école. De là, nous avons débouché sur l’histoire d’un gamin qui arrive dans une classe et qui ne parle pas la langue. Il est exclu du groupe. Nous verrons ensuite comment, à la suite d’un voyage en Angleterre, sa patrie d’origine, il va être valorisé aux yeux de ses camarades. C’est une histoire assez sociale qui traverse aussi le magique et les contes de fées, avec des récits d’enfants perdus dans la forêt et de sorcières. Ces jeunes sont encore dans une féérie style « Charlie et la chocolaterie ». Je leur ai dit qu’il fallait qu’il se passe quelque chose dans leur histoire, qu’il y ait un problème à résoudre. »

Dans un autre scénario concocté par les élèves, un enfant extraterrestre débarque sur la Terre. Il a la possibilité de se transformer en garçon sympathique. Mais, la nuit, il redevient un être monstrueux. Comme il dort dans la même chambre que des enfants terriens, les frères et sœurs décident de le perdre dans la forêt pour l’éloigner de leur famille. La mère alien débarque et fait du porte-à-porte pour retrouver son gamin égaré. Elle raconte l’histoire de sa planète, ce que n’a pu faire son fils : la vie n’y est plus possible et ils ont dû la quitter. « Franchement, je ne leur ai rien soufflé, indique Gilles Granouillet. À travers leur récit, on lit bien les histoires de migrants, avec le côté fantastique et naïf d’un enfant de 12 ans. Maintenant que nous avons bien avancé, nous allons entrer dans un aspect plus technique : découper en scènes, voir ce qui se passe à l’intérieur de chaque scène, écrire les dialogues… »

Ce travail va se prolonger jusqu’à Noël. Nous y reviendrons.

 

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