L’écrivain Mathias Énard discutera avec les élèves des lycées Jacques-Brel à Vénissieux et Georges-Brassens à Givors le 27 novembre à 15 heures (et non 15h30, comme précédemment annoncé). Ils débattront sur le roman « Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants » mais certainement que « Boussole » sera également évoqué, qui a valu à l’auteur le prix Goncourt le 3 novembre dernier.
Publié en 2010, « Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants » avait reçu la même année le prix Goncourt des lycéens, comme quoi les jeunes ont fait preuve d’un bel esprit d’initiative, cinq ans avant leurs aînés !
« Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants » évoque déjà ce rendez-vous qui sera au centre de « Boussole » : celui de l’Orient et de l’Occident. Dans « Parle-leur », Michel-Ange débarque en 1506 à la cour du sultan de Constantinople tandis que, dans « Boussole », Énard décrit l’attraction d’un musicologue autrichien pour Istanbul, Damas, Alep, Palmyre et Téhéran… et pour une jeune femme, Sarah, croisée ici et là dans ces pérégrinations orientales.
L’écrivain aime ce qu’il nomme « le barzakh », un entre-deux, « le monde entre les mondes où tombent les artistes et les voyageurs ». Féru d’Orient, il apprend l’arabe et le persan et fait de sa passion le décor de ses romans. « La perfection du tir » parle d’une guerre civile anonyme que beaucoup situent au Liban. « Zone » est le récit d’un voyage en train entre Milan et Rome où, en une seule phrase de près de 500 pages — à l’exception d’une lecture du narrateur sur le conflit israélo-palestinien —, se mêlent des souvenirs d’Algérie et du Proche-Orient. « Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants », déjà mentionné, prend pour cadre la Turquie du XVe siècle et « Rue des voleurs » le parcours d’un jeune Marocain en Espagne, à l’heure des printemps arabes. Illustré par Pierre Marquès, « Tout sera oublié » revient, vingt ans après, sur le conflit des Balkans. Enfin, « Boussole » est, ainsi que l’annonce l’éditeur en quatrième de couverture, « une main tendue — comme un pont jeté entre l’Occident et l’Orient, entre hier et demain, bâti sur l’inventaire amoureux de siècles de fascination, d’influences et de traces sensibles et tenaces, pour tenter d’apaiser les feux du présent ».
Formidable d’érudition, de cette érudition qui vous donne envie, à chaque nom de personnage ou de lieu cité, d’aller faire des recherches pour en savoir plus, « Boussole » jette tout autant les bases d’un rapprochement entre les deux continents — Énard cite, pour dire qu’il n’est pas le premier, les exemples du colosse de Rhodes et d’Hercule qui, tous deux, avaient un pied sur chaque rive — que celles d’un lien fort entre le XIXe siècle et notre époque. Son goût des phrases longues (ainsi, la première page du roman n’est constituée que d’une seule phrase), son style recherché et jamais ennuyeux à lire, ses évocations des grands musiciens et artistes qui donnèrent à l’Europe de la fin du XIXe son rayonnement international, tout semble être le récit d’une histoire se déroulant du temps de l’empire austro-hongrois — le héros est un Autrichien de mère tourangelle —, si ce n’était de temps en temps un éclair de contemporanéité. Énard nous prend par la main et nous entraîne avec bonheur dans un périple étonnant dont il devient le Baedeker, du nom de ce guide de voyage du XIXe cher à Thomas Pynchon.
Ce 27 novembre à 15h30, à la médiathèque Lucie-Aubrac, les lycéens et le public présent pourront donc échanger avec Mathias Énard dans le cadre du festival Mode d’emploi. Initié par la Villa Gillet, celui-ci a démarré le 16 novembre et se tient jusqu’au 29 novembre dans toute la région Rhône-Alpes en présence de plus de soixante-dix invités, philosophes, écrivains, chercheurs, journalistes, sociologues, historiens, etc. Ainsi, Mathias Énard sera également à la librairie Le Square, à Grenoble, le 26 novembre à 18h30 pour parler de « Boussole » et le lendemain, après Vénissieux, aux Subsistances (Lyon 1er, à 19h15) pour s’entretenir avec Romain Bertrand et Emmanuel Laurentin des « Vérités de l’Histoire ».