Si le steak haché et la clef USB sont en noir et blanc, les pubs d’un soda pour chiens ou le sondage sur les femmes enceintes qui mangent des fraises sont, eux, en couleurs. Dans l’exposition « Sketch in, Sketch out », proposée jusqu’au 4 juillet à l’espace arts plastiques Madeleine-Lambert (Maison du peuple), les peintures murales en noir et la maquette grise de « Traumaville », dues à Ludovic Paquelier, viennent tout à la fois perturber les compositions en couleurs de Lucy Watts et les conforter. Comme si le premier, parodiant Baudelaire, s’écriait « Sois sage ô ma couleur », tandis que la seconde s’évertuait à redonner de la vigueur et du fard, disons le mot, du Technicolor, à des images noires et blanches. Le mariage de ces créations, toutes liées par le même humour ravageur, est on ne peut plus heureux.
« Cette exposition a été sollicitée par l’association Bizarre ! dans le cadre de son projet « Mosaïque urbaine », expliquait Françoise Lonardoni, directrice du service municipal des arts plastiques, le soir du vernissage. Une trentaine d’années après les débuts du street art, l’univers en noir et blanc de Ludovic Paquelier est proche du langage surréaliste tandis que Lucy Watts aborde les questions de l’affichage et de la prolifération sur les murs, avec une dimension critique. »
« Mosaïque urbaine » a d’ailleurs été l’occasion pour Ludovic de mener un atelier avec les jeunes de l’EPJ Charréard. Le résultat, une grande peinture en… noir et blanc, sera apposée sur la façade de la Halle à grains. Quant à Lucy, elle nous a fait le plaisir d’illustrer avec malice l’actualité au fil des pages du n°579 d’Expressions.
La jeune artiste commente les lithographies exposées, telle cette série de vingt, sorte de carnet de voyage d’un périple au Canada déployé sur le mur. « Chaque image correspond à un épisode de mon séjour. Les autres œuvres sont des prélèvements, des anecdotes, des informations issues du quotidien. La série des chats est une publicité pour un soda pour chiens aromatisé au bœuf, redessinée et mise en scène dans le processus d’impression. J’ai obtenu 27 images différentes en utilisant trois couleurs et trois plaques, combinées en une multitude de possibilités. »
L’humour et l’ironie revendiqués par Lucy se retrouvent également dans le travail de Ludovic. Des peintures murales du fond de la salle – « Détendez-vous », « Prix massacrés » – à l’impressionnante maquette industrielle centrale, il utilise les univers de la bande dessinée et du cinéma de série B. Ainsi, « Traumaville » est également un hommage à Troma, compagnie américaine ultra-fauchée mais aux productions ô combien sympathiques.
L’adjoint à la culture Bayrem Braiki en profitait pour annoncer, en juin et juillet, la venue en résidence de Bruce Clarke, artiste internationalement reconnu, en lien avec « Mosaïque urbaine ». Et saluer la dernière manifestation organisée par Françoise Lonardoni avant son départ vers d’autres fonctions au MAC, musée d’art contemporain de Lyon.