L’ancien attaquant de l’Olympique lyonnais, Alain Caveglia, fait aujourd’hui trembler les filets des adversaires de l’équipe Vétéran de l’AS Minguettes. Vénissieux, carrière pro, coupe du Monde et deuxième vie : celui qui a tapé ses premiers ballons à Léo-Lagrange se livre, en quatre chapitres, pour Expressions.
Alain le Vénissian
Gueugnon, Sochaux, Le Havre, Lyon, Nantes, Caen, Vénissieux. Voilà le raccourci non exhaustif du parcours sportif d’Alain Caveglia Scale qui, à 46 ans, est loin d’avoir refermé la page de son livre de football.
“Cavé”, diminutif affectueux qu’il tient de ses amis vénissians, est très attaché à des valeurs simples : l’amitié, la simplicité, la discrétion. Né le 28 mars 1968 à Lyon 8e, c’est au Charréard, puis rue Georges-Lyvet qu’il passe le plus clair de son enfance, fréquentant ainsi le collège Paul-Eluard puis le lycée Jacques-Brel. “J’étais un élève comme tous les autres. Aller jusqu’au bac aurait surtout fait plaisir à ma mère. Mais je ne pensais qu’au ballon rond.” Nordine Ben Mabrouk, un de ses amis d’enfance qui habitait près du Concorde, le confirme : “Au proviseur de Jacques-Brel qui lui demandait ce qu’il voulait faire, Alain a répondu : “être footballeur pro”. Déjà.
« Pour aller taper le ballon, de chez moi, il me suffisait de lever la tête : les Caveglia habitaient dans les étages. Je l’appelais et on partait rejoindre d’autres fanas comme Patrice Gerin, le fils d’André, qui habitait dans la même résidence. En dehors du foot, il nous arrivait d’aller à la Part-Dieu, le mercredi après-midi, pour jouer à la “babasse”. Alain n’a jamais aimé perdre, quel que soit le sport, même au tennis de table où j’aimais le taquiner. Mais qu’il s’agisse du foot, du tennis ou de n’importe quel jeu, Cavé était précis et d’une adresse incroyable…”
Chez Alain, le foot reprend toujours le dessus : “On rentrait de l’école, on posait nos cartables et on allait se taper des heures de ballon.” Pourtant, bien que vivant aux Minguettes, Alain ne signe pas à l’ASM mais au CORPS parce des potes et son frère y jouaient. « Ensuite, Saint-Priest s’est intéressé à moi, puis j’ai intégré le centre de formation de l’OL. Et là, j’ai fait une erreur. J’étais le seul joueur de la région à y vivre. J’avais 16 ou 17 ans, j’avais du mal à faire mes devoirs… J’ai dû redoubler ma seconde… et je suis retourné à Jacques-Brel.” Exit la pension complète à l’OL.
À Vénissieux, Alain fréquente les incontournables frères Reale, Barbier, Jeannot Blanc et René Montagne. Dirigeant influent de l’ASM, ce dernier emmène Alain à Gueugnon, pour faire un essai. Il y fera ses débuts de pro.
Vénissieux, il y reviendra cependant, à la fin de sa carrière professionnelle. Comme il l’avait promis à son épouse, retour sur Lyon et l’agglo. Alain Reale, fin tacticien, ne le lâche plus, pour qu’il vienne signer chez les vétérans de l’AS Minguettes. Et c’est ainsi que “Cavé” est aujourd’hui licencié à l’ASM.
Le parcours pro de Caveglia : l’OL en guise d’apothéose
Caveglia et l’OL, c’est l’histoire d’un supporter qui en vient à porter le maillot de son équipe fétiche. Une histoire de passion, donc. “J’ai intégré l’Olympique lyonnais en minime deuxième année. L’OL, ça reste mon club de cœur. J’y allais tout petit avec mon père et mon frère, puis avec mes potes. Je me souviens des derbies contre Saint-Étienne. Alors jouer pour l’OL…”
Pourtant, en 1987, ce n’est pas encore le tour d’Alain Caveglia. “Je voulais un contrat, mais ils ne m’en ont pas donné.” Cavé décide donc de quitter Gerland. Sans amertume. “Dans les histoires d’amour, rien n’est jamais tout blanc. Ça m’a donné une bonne claque. Mais partir de Lyon à ce moment-là m’a aidé puisque j’ai rencontré René Montagne, qui m’a fait faire un essai à Gueugnon, où j’ai tout de suite été pris.”
Il restera trois saisons dans la ville bourguignonne, entre 1987 et 1990. Le début de la « grande aventure”. “La troisième saison, je marque 24 buts. Deuxième meilleur buteur de la D2, derrière Didier Monczuk à 26 buts !”
De quoi donner des idées à des équipes de Division 1. Il aurait pu signer au Paris Saint-Germain ou à l’AS Cannes mais choisit Sochaux. “Le club jouait la coupe d’Europe, et il me ressemblait par son côté travailleur. Pour passer le palier de la D2 à la D1, c’était ce dont j’avais besoin.” Les trois premières années sont difficiles. Positionné au milieu de terrain, il peine à trouver sa place. Pour sa dernière année de contrat, la machine se remet en route. Après une “bonne préparation”, il joue à sa place d’attaquant et marque 14 buts en 38 matchs.
Son contrat terminé, c’est Le Havre qui accueille notre homme. “J’ai signé là-bas pour une seule personne : le coach Guy David. Il avait un projet pour le HAC, avec des joueurs formés au club (Vikash Dhorasoo, Christophe Revault, Teddy Bertin…), des transferts de qualité et un projet de jeu. Il m’a dit qu’on allait s’éclater. Ça m’a emballé.” Et ça marche : Le Havre boucle la saison 1994-1995 à la 12e place, après être resté longtemps dans le top 6 du championnat. En coupe de la Ligue, le HAC atteint les demi-finales ; en coupe de France, les quarts. “On s’est écroulés physiquement sur la fin de la saison. Mais pendant un temps, on était proches de la dernière place européenne. On a fait une superbe saison.”
L’aventure havraise se poursuivra une année de plus. C’est alors que Lyon revient dans la vie d’Alain Caveglia. “Bernard Lacombe, alors entraîneur, m’a téléphoné pour me dire qu’il me voulait. Alors, j’ai dit à mon agent qu’il pouvait bien m’amener une proposition du Milan AC, s’il voulait. Moi, j’avais trouvé ma prochaine destination !”
“J’avais bien une petite appréhension de jouer devant la famille et les potes. Le premier match à domicile, je pense avoir battu le record d’invitations : tous ceux que j’aime étaient dans les tribunes. Mais le retour s’est bien passé. Et je me suis éclaté à Lyon pendant trois ans.”
Le public de Gerland en fait même son chouchou, transformant Alain Caveglia en “Cavegol”. Le buteur trouvera, entre juillet 1996 et mai 1999, les chemins des filets adverses à 46 reprises. Mais le développement de l’Olympique lyonnais, qui souhaite devenir le grand club français des années 2000, mettra un frein à cette orgie de buts. Jean-Michel Aulas recrute du lourd : Tony Vairelles, Pierre Laigle… Et surtout, un certain Sonny Anderson. “Le président de l’OL m’a appelé pour me prévenir qu’il avait la possibilité de signer Anderson. Je lui ai répondu de ne pas hésiter une seconde.” Bernard Lacombe lui assure que l’OL va jouer avec deux attaquants (Vairelles et Anderson) et deux milieux offensifs (Dhorasoo et lui). Ce sera le cas pendant la première partie de la saison. Mais un début de championnat poussif et une élimination au tour préliminaire de la Ligue des Champions par les Slovènes de Maribor feront changer le coach d’avis. Caveglia est poussé sur le banc et vers la sortie. A la trêve hivernale, il rejoint le FC Nantes. “Ça a été difficile”, commente-t-il sobrement.
Il y obtiendra pourtant le seul titre de sa carrière : une Coupe de France, le 7 mai 2000, contre les amateurs de Calais. C’est lui qui obtient le penalty décisif pour les Canaris. “Après, j’ai eu plusieurs possibilités. J’aurais pu signer à Caen, mais le nouveau président du Havre me voulait absolument.” C’est au HAC que “Cavegol” terminera sa carrière. Deux saisons en D2, pour 16 et 13 buts. Une remontée pour le club, et la fin de l’aventure pour le joueur.
La deuxième vie d’Alain
Une fois les crampons raccrochés, pas question pour l’attaquant aux 108 buts en L1 et 59 buts en L2, de se lancer dans une carrière d’entraîneur ou d’éducateur. Mais le foot continue à le démanger et il débute dans le métier de collaborateur d’agent de joueurs, d’Henri Zambelli pour être précis. Ce qui l’amène à multiplier les rencontres, faire signer des contrats, notamment du côté du Stade Malherbe de Caen.
“Je connaissais depuis longtemps le président Jean-François Fortin et l’entraîneur Franck Dumas. Travailler avec eux me plaisait. Le SM Caen, c’est un club sain, avec des valeurs qui me correspondent et depuis trois ans, je m’y épanouis. Je touche à tout, je vais voir des matches, je rencontre les jeunes du centre de formation, je m’occupe des contrats…”
Désormais, Alain effectue d’incessants allers et retours entre Caen (les trois-quarts de son temps), la région lyonnaise et Vénissieux. “C’est une question d’organisation. Il m’arrive bien de rater quelques matches ou entraînements de l’ASM mais bon, les liaisons aériennes sont quotidiennes entre Caen et Saint-Exupéry. Et les Minguettes, j’y tiens, cette équipe de vétérans avec le président me tient à cœur. Quand je peux leur donner un coup de main, je n’hésite pas. Pour moi, c’est important.”
A-t-il pensé à devenir consultant comme le font de plus en plus d’anciens joueurs pro ? “Avant de finir ma carrière, je savais déjà ce que j’allais faire, être agent. Je n’ai pas cherché plus loin. J’ai bien fait quelques piges pour OL-Télé, mais ça s’arrête là. Je n’ai pas le temps de consacrer des soirées à commenter des matches.” Et un retour à l’OL comme directeur sportif ? “Pourquoi pas ? Mais pour l’heure, Caen me plaît bien.”
Bon alors, la coupe du Monde ?
Nous ne pouvions achever cet entretien avec Alain Caveglia sans lui demander son avis sur la coupe du Monde qui se déroule jusqu’au 13 juillet au Brésil. S’il aurait bien vu « une surprise, comme la Colombie ou l’équipe de France, laquelle a répondu aux attentes de ses supporters », il se dit « content du niveau affiché par les joueurs ».
L’occasion d’évoquer le seul gros regret de sa carrière : n’avoir jamais été sélectionné en équipe de France. “J’ai été appelé avec les A’ en 1993. Mes coéquipiers s’appelaient Barthez, Zidane, Karembeu, Leboeuf… Autrement dit, les futurs champions du Monde 1998. Dans une carrière, il faut bien quelques regrets, n’est-ce pas ?”
Grégory Moris et Djamel Younsi