On les dit égoïstes, individualistes, ne s’intéressant qu’aux jeux vidéos et aux réseaux sociaux. Ils passeraient leur temps à « smser » ! Rien à voir avec les générations précédentes. Faux.
À Vénissieux, nous le constatons souvent, les collégiens sont nombreux à s’investir pour les autres dès la classe de 6e. Les principaux sont unanimes. Certains sont même toujours prêts à donner de leur temps et à s’engager dans les actions qui leur sont proposées. Ainsi, au collège Aragon, le club solidarité fonctionne très fort. À Honoré-de-Balzac, les BoliBalzac se sont fait un nom en Bolivie, en menant campagne pour le déparasitage, tandis que leurs copains ont couru pour le Téléthon.
Au collège Elsa-Triolet, MM. Piejak-Milko et Descaillot, respectivement enseignant d’histoire-géographie et de SVT, ont l’habitude de sensibiliser leurs élèves au développement durable, sur la base d’un projet de classe. Cette année, il a été élaboré en partenariat avec l’entreprise Solvay de Saint-Fons et la Ville de Vénissieux.
“C’est du concret, on sait que tout ce que nous avons collecté va être distribué.”
Grâce au travail de fond effectué depuis plusieurs années par Claire Lenfant, la directrice adjointe de la Segpa d’Elsa-Triolet, un projet en faveur d’un village du Togo a rapidement pris forme. Fariz, Nasurdine, Fatoumata et Fares, tous élèves de 4e, ont remué le collège, interpellé les enseignants, se sont démenés pour récolter fournitures scolaires, maillots, sacs à dos… L’entreprise Solvay a mis la main à la poche, offrant quelque 200 calculatrices, un vidéo-projecteur. La municipalité de Vénissieux a recyclé et offert une dizaine d’ordinateurs portables. “La chaîne a idéalement bien fonctionné, se réjouit Christine Gourjux, principale de l’établissement. Le travail de longue haleine entrepris par les enfants va permettre à Basile Dakey, responsable d’une association qui vient en aide à ce village togolais, de repartir dans quelques semaines dans son pays afin de livrer tout ce matériel.” Et pour les ados, ce type de solidarité est gratifiant : “C’est du concret, on sait que tout ce que nous avons collecté va être distribué.”
Qu’il s’agisse des collégiens d’Elsa-Triolet, des élèves d’Aragon (Sirine, Angelina, Nina et Celia) qui ont passé des « moments authentiques avec des personnes âgées », ou encore des « balzaciens » Romain, Sofiane et Idriss qui ont couru pour le Téléthon « en pensant aux enfants malades », tous conviennent que donner « un peu de temps permet de s’ouvrir au monde, de se sentir citoyens”. Ils observent aussi, tout simplement, qu’il est « agréable de rendre des gens heureux ».
Les modes d’engagement restent majoritairement les mêmes
La sensibilité des jeunes générations à la valeur solidarité est aujourd’hui solidement établie et se confirme de sondage en sondage. Selon une enquête réalisée par le Centre d’étude et de recherche sur la philanthropie (CERPHI), la solidarité s’exprime d’abord dans les relations de proximité. Pour un adolescent sur deux, être solidaire c’est aider les personnes en difficulté au quotidien. Ils distinguent ainsi la solidarité de l’engagement, qu’ils jugent davantage propre au monde adulte où l’on trouve des dimensions politiques ou humanitaires.
On constate que leurs actions restent majoritairement les mêmes que celles des générations précédentes. Les adolescents décrivent des pratiques ponctuelles, élaborées sous l’influence de la famille et du contexte scolaire : participation aux collectes alimentaires, opérations pièces jaunes finançant des projets qui permettent aux parents de rester auprès de leurs enfants hospitalisés, dons de vêtements, de jouets…
La conception qu’ont les jeunes de la solidarité est dans le droit fil du discours caritatif traditionnel, en termes de dévouement, compassion, don de soi. Et fidèle à la tradition sociale en termes de communauté, de partage et d’entraide. « Il ne faut pas penser qu’à soi, disent-ils. C’est enrichissant de se consacrer aux autres, c’est un accomplissement personnel comme de recevoir un sourire. »
Pour tous ces jeunes, le bénévolat est indissociable de la présence physique, de la rencontre personnelle. En revanche, peu s’engagent directement au sein des associations caritatives telles que les Restos du cœur ou le Secours populaire.