Malek Boutih, ancien dirigeant national du Parti socialiste, a préfacé l’édition actualisée du livre que vient de publier André Gerin, « Les Ghettos de la République, encore et toujours ». Nous lui avons posé demandé de nous expliquer pourquoi il a accepté de rédiger cette préface et s’il partageait tous les analyses et diagnostics du député de la 14e circonscription du Rhône.
– Pourquoi avez-vous accepté de préfacer ce livre d’André Gerin dont les analyses sont loin de faire consensus, pas plus dans son parti, le PCF, que plus généralement à gauche ? Et le faisant, ne craignez-vous pas de voir resurgir à votre propos le même qualificatif de « sécuritaire » qui lui est souvent attribué ?
Malek Boutih : – « J’ai accepté de préfacer ce livre parce que peu de responsables politiques vivent aujourd’hui dans une « cité » et ont encore la volonté de sortir de la logique de ghetto qui s’est imposée. Il ne s’agit pas pour moi de dire que je suis d’accord à 100% avec toutes ses idées, mais renvoyer André Gerin au simple qualificatif de « sécuritaire », parler de dérives quand il a au moins le courage de parler, en dit long sur les lâchetés qui parsèment les propos lénifiants sur les banlieues. »
– Vous dénoncez la violence dans les banlieues, comme « stigmate des valeurs d’une société à la dérive ». Faites-vous le même lien qu’André Gerin entre violence et intégrisme ?
M.B. : – « Non, mon propos vise à faire un lien entre la dérive ultra-libérale de nos sociétés, le règne de l’argent facile et sans limite, à la destruction de tous les acquis collectifs contre l’illusion du bonheur individuel construit sur le malheur du plus grand nombre. »
– Dans son livre, André Gerin assure que « l’islam en France a un rôle historique à jouer pour sortir nos cités de la ghettoïsation et lutter contre les cancers qui les rongent ». Partagez-vous cette opinion ?
M.B. : – « Complètement. Le fait religieux, l’islam, n’est en rien contradictoire avec l’esprit républicain tant que la laïcité est respectée. Beaucoup d’experts et de politiques se trompent en réduisant le fait religieux à l’intégrisme. Il faut reconnaître que dans de nombreuses familles populaires, la religion est une structuration morale forte pour résister aux dérives délinquantes et destructrices. Reste que la violence politique appliquée par les forces fondamentalistes empêche un Islam de France de s’épanouir, de s’organiser et de redorer l’image de millions de musulmans qui aiment notre pays et rêvent de retrouver un rôle constructif pour la communauté nationale. Pendant que l’extrême droite et certains à droite mangent dans la main des obscurantistes d’Arabie Saoudite, André Gerin, lui au moins, tend la main aux musulmans républicains. »