Si vous avez un jour croisé Sam Cannarozzi (par exemple en juillet, au pique-nique républicain de Fêtes escales), vous vous souvenez forcément de lui : le cheveu blanc dru, coupé court, la barbiche en pointe, la petite moustache et cet inimitable accent américain qui colore si bien les histoires qu’il aime raconter, pour notre plus grand plaisir. C’est ce natif de Chicago, installé depuis fort longtemps dans la région lyonnaise, que l’Espace arts plastiques a choisi pour animer sa balade contée artistique, dans le cadre des Journées européennes du Patrimoine.“Il manque un mot à ces Journées, remarquait, narquois, Sam Cannarozzi lors du départ de la promenade, ce 17 septembre devant le cinéma Gérard-Philipe. Elles devraient se nommer les Journées européennes éclectiques du Patrimoine, ce qui, en abrégé, ferait JEEP.”
Pour bien préciser qu’il va être le guide qu’il faudra suivre, Sam exhibe sa panoplie : des casquettes différentes et un blouson constellé de petites plaques qui serviront de catadioptres en cas d’obscurité soudaine.
Puis, tapant sur un minuscule xylophone, il commence : “Il était une fois, il y a très longtemps, une promenade à Vénissieux…”
À Monmousseau, quelques enfants ont déjà posé sur leurs oreilles les casques qui pendent d’une tente. Non loin de là, Serge Sana et Xavier Saïki, deux musiciens de la Tribu Hérisson, paraissent fébriles. La pluie tombée le matin et qui menace encore en ce début d’après-midi, peut remettre en cause leur balade sonore. Distillant une chaleur lourde, le soleil tente des percées qui rassurent progressivement tout le monde.
Sur la “place rouge”, quelques mamans sont déjà installées sur des chaises. D’autres vont encore arriver, accueillies chaleureusement. “Dans ce quartier, expliquent les hôtesses, on entend beaucoup les chants des oiseaux. Ailleurs, aux trois tours, ce sont plutôt les bruits du marché.”
La balade sonore démarre, avec des cris de jeux d’enfants qui semblent partir du bâtiment situé en face de l’assistance. Les piaillements tournent autour des spectateurs, partent de la droite, puis du fond, puis de la gauche. Un curieux son est aussitôt expliqué par une des personnes qui accueillent : “Ce sont des billes qu’on a lancées de chez moi et qui dégringolent les escaliers.”
Soudain une voix s’impose : “Si je m’amusais à déménager ailleurs, je ne retrouverais pas ce que l’on a ici.”
Comme une véritable symphonie, les sons se suivent, se mêlent, ici les fameux oiseaux, que l’on entend très nettement, là de la musique, jouée par l’Ensemble Odyssée et des enfants de Vénissieux. Là encore, ce sont les klaxons d’un mariage et des témoignages d’habitants, captés par Xavier et Serge.
“Cela fait plaisir d’entendre cette animation sur la place, témoigne une habitante qui dit résider là depuis 42 ans. Ça nous change tellement des voitures qui passent comme des bombes, sur la place et dans la contre-allée, entre le bâtiment et l’avenue Jean-Cagne.”
À la médiathèque Lucie-Aubrac, un petit groupe de personnes est bien décidé à tout connaître du bâtiment de l’architecte Dominique Perrault. Un équipement qui ne désemplit jamais. Le public va suivre jusque dans les étages et au sous-sol la directrice, Laurence Khamkham, et Mamadou Seck, le responsable du secteur multimédia. Ce dernier lance trois mots clefs, qui caractérisent la médiathèque : “Visibilité, ouverture, continuité”. Après la visite, Stephan Martinez, responsable des animations culturelles, présente l’exposition qu’il a initiée sur dix années de projets du cabinet Dominique Perrault Architecture, expo à voir encore pendant tout le Grand Rendez-vous.
Pendant ce temps, la balade contée artistique suit son cours. Après le dôme de la station de métro Parilly, conçu par Patrice Giorda, et la sculpture de Françoise et Michel Turin, rue Joannès-Vallet, Sam Cannarozzi a conduit le groupe à la maison des associations Boris-Vian pour admirer “L’homme qui marche” de Madeleine Lambert. Et justement, l’artiste est présente, elle a même suivi la balade depuis son démarrage.
À 17 heures, les portes de l’école de musique Jean-Wiener s’ouvrent pour une prestation de l’ensemble Sonorien, composé d’élèves de l’école. Tandis qu’à Renault Trucks on contemple les véhicules anciens et récents, à la chapelle de l’hôpital Saint-Jean-de-Dieu, une création sonore et vidéo rend hommage au poète surréaliste Stanislas Rodanski, qui séjourna ici.
Sam Cannarozzi a ramené pendant ce temps ses promeneurs vers le centre Michel-Delay et l’œuvre de Marie-Noëlle Décoret, avant de finir avec “Le Regardeur” de Bachir Hadji, sur le toit du cinéma Gérard-Philipe.
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