Préparer le portrait d’Olivier Fischer, c’est se poser une question à laquelle il est difficile de répondre seul : faisons-nous le portrait de l’entrepreneur, fondateur de l’agence Terre de Sienne devenue sous le nom de Sienne Design la troisième agence de communication de Rhône-Alpes ? Ou celui de l’artiste, dont les dessins comptent sur Facebook quelque 1 500 fans, et qui vient d’exposer ses toiles à Lyon ? Autant l’interroger directement. “Je suis un peu des deux. À la fois chef d’entreprise et fondamentalement pas chef d’entreprise. Je me considère tout autant comme un artiste.” Bref, difficile de trancher, même en questionnant le principal intéressé. Alors, comptons les points.
Le fait est qu’Olivier Fischer, 44 ans, a une formation d’artiste. Durant toute sa jeunesse, il suit à Vénissieux les cours des ateliers municipaux d’arts plastiques Henri-Matisse. Jeune adulte, il s’inscrit à l’École des arts appliqués de Lyon. “Une formation large, commente-t-il. Nous avions des cours de dessin, de sculpture, sur le textile ou l’architecture d’intérieur… Cela m’a permis, déjà, d’exposer un peu.” Le premier point va donc à l’artiste. 1 à 0. “Quand j’ai terminé mes études, je me suis dit : une carrière d’artiste ? très peu pour moi. Je suis devenu en 1989 graphiste indépendant, puis j’ai participé, avec Thierry Renard, à la création d’Aube Magazine.” En 1992, il crée l’agence Terre de Sienne. “Je pensais que mon travail de graphiste me permettrait de peindre, en parallèle. Erreur fondamentale !” Le chef d’entreprise marque son premier point. Un partout.
L’étiquette qui gratte
L’aventure Terre de Sienne occupera la majeure partie du temps d’Olivier Fischer, à partir de la moitié des années 1990. Un métier ? Une passion, surtout. “Ce qui m’intéresse dans la phase de création, c’est le dialogue. Faire passer un supplément d’âme.” L’agence grandit, recrute, évolue et devient Sienne Design en 2008. Un succès vécu “bizarrement” par le chef d’entreprise. “C’est étrange d’avoir l’étiquette de patron, assure-t-il. Parce qu’on a de l’argent, une voiture neuve, les gens s’imaginent qu’on a changé. Mais je n’ai aucun regret. Sienne Design m’a demandé beaucoup de travail. Un investissement personnel très important.” Chef d’entreprise, 2. Artiste, 1.
Mais “naturam expellas furca, tamen usque recurret” (“chassez le naturel, il revient au galop”, c’est moins cliché en latin). “J’ai longtemps pensé que travailler avec des artistes m’apporterait ce côté créatif dont j’ai besoin. Un jour, je me suis dit “merde, c’est pas moi, ça”. Il fallait que je reprenne les crayons.” Et cette fois, pas pour noter des rendez-vous. Il dessine le matin, en prenant son café. Dans son carnet, durant les réunions. Tous les jours, pendant un an et demi. Il touche à beaucoup de styles : portraits, nus, abstrait, retouches de photos, noir et blanc… Le texte est souvent présent. Il “expose” virtuellement ses créations sur ses pages Facebook et MySpace. “Grâce à ces nouveaux médias, on reçoit beaucoup de réactions. Elles ont souvent été positives, dans la continuité de ce qui m’avait poussé à reprendre le dessin et à combler ce manque que je ressentais en moi.” L’artiste effectue un retour en force. Deux partout.
Un “vrai défenseur” de Vénissieux
L’histoire de cet artiste entrepreneur est aussi celle d’un Vénissian “passionné” par sa ville. Sa mère s’installe à Vénissieux en 1966. “Un an avant mon père”, rappelle Olivier. Car oui, nous ne l’avons pas encore précisé, mais Olivier est le fils de Guy (Fischer) qui assume depuis 1977 de multiples responsabilités électives, locales, départementales, nationales : premier adjoint au maire de Vénissieux, conseiller général, sénateur depuis 1996, vice-président de la haute assemblée depuis 2001. “Moi, je milite autant que les responsables politiques, estime Olivier. Faire en sorte que Sienne Design reste à Vénissieux, c’est une forme d’engagement. J’ai grandi à Vénissieux, je me considère comme un vrai défenseur de cette ville, peut-être pas au sens politique, mais dans le sens où je l’aime et où je crois en son énorme potentiel. J’ai installé le siège de l’agence rue Jean-Jaurès, en 2003. J’aurais pu partir dans le centre de Lyon. Certains clients me demandent d’ailleurs “ce que l’on fout à Vénissieux”. Mais quand ils viennent, ils se rendent compte de l’intérêt de cette ville.”
Un engagement qui semble proche d’un engagement politique. L’ombre du père ? “Aux élections municipales de 2008, j’étais sur la liste menée par André Gerin, en position non éligible. Encore récemment, je me suis interrogé. J’ai une forme d’envie de m’engager. Mais je sais ce que cela implique en terme de temps de travail, cela ne doit pas se faire à la légère. Si engagement politique il y a, il faut pouvoir être présent au quotidien, dans le concret.”
Revenons à notre fiction, opposant l’artiste au chef d’entreprise. Pour nous, le match est à égalité. Mais Olivier, de quel Olivier souhaite-t-il qu’on se souvienne dans quarante ans ? “D’un artiste. C’est ce qui correspond le plus à ma personnalité. Mon côté chef d’entreprise, c’est une carapace. »
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