On aura rarement vu autant de personnalités pour le lancement d’une réhabilitation : le maire Michèle Picard, le sénateur Guy Fischer, la conseillère générale Marie-Christine Burricand, le conseiller régional Guy Paluy, sans oublier des représentants du Grand Lyon, de l’État, de l’Agence nationale de l’amélioration de l’habitat (ANAH)… Il s’agit, il est vrai, d’une réhabilitation hors normes. Par la taille (300 logements), la hauteur des investissements publics (près de 6 millions d’euros), et surtout parce qu’elle concerne une copropriété privée.
Perchée sur la butte qui surplombe d’un côté la rue des Martyrs-de-la-Résistance et de l’autre l’avenue Jean-Moulin, Grandes Terres des Vignes est typique des constructions de la fin des années soixante : imposante, monolithique, pas moche mais vieillie, d’autant que l’entretien a longtemps fait défaut. Durant les années quatre-vingt-dix, victime d’un cercle vicieux, la copropriété a vécu des heures difficiles : le prix de l’immobilier a baissé, des familles très modestes ont acheté des appartements, les charges et les travaux sont devenus de plus en plus durs à financer, l’état général s’est dégradé, entraînant une nouvelle chute des prix… Claude Dilas, le, président du conseil syndical, le répète souvent : “On pouvait alors acheter un logement pour une bouchée de pain”.
Ce lundi 31 mai au matin, avec le vice-président du conseil, Jacques Thomas – tous deux ont joué un rôle clé pour persuader l’ensemble des copropriétaires d’approuver cette ambitieuse opération – il prend un plaisir non dissimulé à accueillir les personnalités. On lance « enfin » le chantier de réhabilitation issu du Plan de sauvegarde décidé par les partenaires publics en 2002. Deux ans de travaux et 7,4 millions d’euros d’investissement vont redonner une seconde jeunesse à Grandes Terres des Vignes. À ce prix-là, évidemment, il ne s’agit pas d’un simple coup de peinture. Une isolation de 15 cm d’épaisseur est posée sur les façades, les menuiseries sont intégralement changées, les ascenseurs refaits, des VMC installées, les escaliers et les coursives repeints…
Une consommation énergétique réduite de moitié
Le défaut majeur de la copropriété est d’être énergivore. L’isolation est si médiocre que les charges s’élèvent à 200 euros par mois et par appartement. À la fin des travaux, la consommation énergétique sera réduite de moitié. “Nous allons passer de la classe E à la classe C”, indique fièrement Claude Dilas. Le président du conseil syndical souligne également le montant “tout à fait exceptionnel” des aides publiques, grâce auxquelles chaque copropriétaire n’aura à débourser en moyenne que 6 000 euros, soit environ 25 % de la valeur réelle des travaux.
“Des subventions publiques vers le privé pour renforcer la mixité sociale, améliorer les conditions de vie des habitants et revaloriser le patrimoine, c’est ce que j’appelle l’intérêt général”, déclare le maire, Michèle Picard. Avant de s’inquiéter de l’attitude de l’État pour les années à venir : “Nous avons besoin de financements multipartenariaux pour rénover en profondeur, et non en façade, les territoires les plus fragilisés. Or les maires des villes populaires expriment de très vives inquiétudes ! Que sont devenus les plans Marshall de Nicolas Sarkozy et Espoir banlieues de Fadela Amara ? (…). Les leçons de 2005 ont-elles été réellement tirées ou attend-on que l’histoire se répète ?”
Marie-Christine Burricand, conseillère générale du canton nord de Vénissieux et habitante de Grandes Terres des Vignes depuis quatorze ans, rappelle pour sa part combien il a fallu de patience et de volonté avant de toucher au but : “Je me souviens des premières assemblées générales de copropriétaires où certains affirmaient qu’il était préférable de tout faire sauter. On peut dire que Grandes Terres des Vignes revient de loin. »